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 Heidi.news

De la curatelle au cauchemar: les leçons d’une enquête qui a secoué le Landerneau

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/49ca1c44-2a15-4122-9e10-ab137c593e73/medium" /><p>L’exploration sur le fonctionnement des curatelles privées à Genève a suscité de très nombreuses réactions et incité des députés genevois à déposer un projet de loi pour réformer le système. Deux mois après la publication des épisodes les concernant, les principaux témoins de l’enquête relatent ce qu’ils sont devenus.</p><p>Une avalanche. Ou plutôt un flux quasi-quotidien de courriels, téléphones, courriers ou prises de contact via les réseaux sociaux ou par le biais de personnes connues de la rédaction. Rarement une enquête publiée par <em>Heidi.news</em> avait suscité autant de réactions que cette Exploration sur les curatelles privées à Genève. Les commentaires ne se sont pas limités aux frontières du canton. Plusieurs messages, évoquant des situations parfois tragiques, nous sont aussi parvenus des cantons de Vaud et du Valais.</p><p>De nombreuses personnes nous ont fait part de leur émotion à la découverte des difficultés auxquelles sont confrontés les protégés dont nous avons retracé les parcours. Parmi ces lecteurs, des citoyens ordinaires, des députés – <em>«Je partage entièrement vos préoccupations et vous soutiens complètement»</em>, écrit l’un d’eux –, et même une ambassadrice suisse à l’étranger, qui nous a envoyé ce message: <em>«Vous faites un travail absolument extraordinaire et je tiens à vous remercier toutes et tous!»</em></p>Beaucoup d’interlocuteurs, aussi, sont apparus dans l’urgence de partager leur propre expérience. *«Les cas que vous mentionnez dans vos articles sont loin d’être isolés»*, souligne une dame. *«La machine curatelle m’a broyée, mais avec cette bataille publique je revis»*, relate une autre. Ou encore celui-là:  *«J’ai dû prendre un avocat et j’ai gagné. Mais toute l’affaire a jeté une ombre d’insécurité sur ma mère.»* Nous n’avons malheureusement pas pu documenter les situations de toutes les personnes qui se sont manifestées: elles étaient trop nombreuses, et nous ne pouvions redémarrer l’investigation à laquelle nous avions déjà consacré des mois.

### **«Un loup pour surveiller des moutons»**

«*Je voulais signaler que la curatelle de ma mère s’est très bien passée, sans bizarrerie. L’avocate désignée a été très correcte et sympathique»*, a tenu a nous écrire l’un de nos lecteurs. Bien sûr, toutes les curatelles ne se transforment pas en chemin de croix. Mais à ce message près, la tonalité générale des témoignages adressés à la rédaction esquisse un tableau d’ensemble problématique, cohérent avec le sentiment de malaise qui se dégage des situations particulières d’Alice, Edwige, Patrick, Paul et des autres protégés sur lesquels nous avons enquêtés.

Parmi les lecteurs qui ont réagi, certains ont reconnu en l’avocat Luc Elaret *(nom modifié à sa demande)*, qui figure dans plusieurs épisodes de l’exploration, le curateur auquel ils avait eux-même eu affaire. C’est notamment le cas de ce Carougeois qui s’est dit disposé à transmettre des informations sur ses *«méthodes»*, ou d’une autre personne qui considère que les démêlés de sa famille avec Me Elaret ont englouti dix années de sa vie. *«Nous avons eu la bonne-mauvaise idée de demander la mise sous protection de notre oncle quand il a rencontré des difficultés cognitives. Ce dernier a cordialement détesté  son curateur»*, relate ce témoin. *«Me Elaret devrait être immédiatement éjecté de toutes ses curatelles»*, assène pour sa part un confrère genevois de l’avocat-curateur.

### **S’abriter derrière un écran de fumée**

A notre connaissance, Me Elaret est toujours le curateur d’Emilie *(voir les [épisodes 1 ](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/qui-se-souvient-d-emilie)[et 2](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/le-lit-est-fait-le-frigo-est-plein-qu-est-ce-que-cela-peut-bien-vous-faire))*. Cette dame âgée de 96 ans vit recluse chez elle depuis une dizaine d’années sous la férule de deux gouvernantes, une mère et sa fille faisant usage de sa maison comme si elle était la leur. Deux mois après la publication de l’enquête sur cette protégée et en dépit de toutes les réactions qu’elle a soulevées, la situation de la nonagénaire n’a pas évolué. Les deux gouvernantes sont toujours en poste.

C’est même pire que cela. La manière dont Me Elaret exerce cette curatelle semble d’autant moins avoir été remise en cause que nous avons appris qu’il s’était attelé, dans la foulée des articles exposant ce cas, à jeter le discrédit sur une voisine et amie d’Emilie, notamment par le biais d’un courrier adressé à une autre voisine de la même rue. D’après la version élaborée par le curateur, que l’une des représentants du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE) a contribué à colporter dans Genève, le problème ne tiendrait pas tant à la situation effective d’Emilie qu’aux *«manipulations»* dont l’autrice de ces lignes aurait été l’objet de la part de cette amie qui, sous couvert de dénoncer la réclusion de la vieille dame, convoiterait sa maison depuis des années.

*Heidi.news* réfute toute manipulation, et les éléments à notre disposition invalident catégoriquement l’hypothèse des intérêts mal placés d’un témoin de l’enquête. Pendant que les uns et autres s’abritent derrière des écrans de fumée, Emilie, elle, reste cloîtrée.

### **«Dégoûté du système»**

Patrick Spitzner, cet ancien policier cantonal qui se demandait si son curateur l’avait *«roulé dans la farine»* en lui ponctionnant plus de 25’000 francs pendant les deux ans et demi de sa curatelle *([épisodes 3 ](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/curatelles-a-geneve-mode-d-emploi)[et 4](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/curatelle-cherement-payee-j-ai-besoin-de-savoir-si-je-me-suis-fait-rouler-dans-la-farine))*, a appris début novembre 2023 que le recours qu’il avait introduit contre ces honoraires avait été rejeté. *«Je suis dégoûté du «système»»*, nous a-t-il écrit au moment de s’envoler pour l’étranger où, libéré de sa curatelle, il est déterminé à refaire sa vie.

Sylvie, dont le frère est devenu SDF dans une ville étrangère quelques mois après que le TPAE ait jugé qu’il devait bénéficier de mesures de protection *([épisode 7](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/place-sous-curatelle-un-financier-genevois-se-retrouve-sdf))*, n’a pas reçu la moindre nouvelle du tribunal ni d’aucune autre autorité genevoise. En l’absence de soutien institutionnel, elle continue de chercher, seule, une solution pour faire bénéficier Paul de soins conformes à ses besoins.

Edwige, une autre protégée dont nous avons relaté l’histoire, a pu reparler à son frère avec qui elle était en froid. Ce dernier a exprimé le regret d’avoir demandé au TPAE sa mise sous protection en 2018 (épisodes [3](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/curatelles-a-geneve-mode-d-emploi), [4](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/curatelle-cherement-payee-j-ai-besoin-de-savoir-si-je-me-suis-fait-rouler-dans-la-farine) et [5](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/face-a-des-curateurs-indelicats-la-detresse-de-certains-proteges)). Il pensait alors agir pour le bien de sa sœur et non l’exposer à une pénible et coûteuse curatelle, finalement levée en 2022.

### **Une facture «extravagante»**

Dans l’épisode 5, nous avions raconté comment Nicolas Burgy, sur les conseils d’un avocat, avait enfin obtenu d’être nommé curateur de sa mère en juillet 2023, cinq ans après avoir fait des démarches pour la signaler au TPAE, alors qu’elle commençait à avoir des absences. Pour ce journaliste à la retraite, une question de taille restait en suspens: celle des honoraires facturés à sa mère par le curateur désigné en 2018, Me P. Ergote *(nom d’emprunt)*. L’équivalent de 500 francs par mois, 1000 francs ou plus encore?

Cet ancien de la RTS n’avait pas la moindre idée des montants en jeu, jusqu’à ce qu’il accède lui-même aux comptes de sa mère. Un courrier officiel lui confirme alors que la rétribution du curateur s’élevait à 67’085 francs pour la période allant d’avril 2018 et mars 2022, soit un coût mensuel moyen de 1400 francs, une somme approuvée par le TPAE. Nous avons proposé à Me Ergote de la commenter, mais il n’a pas donné suite.

Plus encore que cette facture jugée *«proprement extravagante»* par l’avocat de Nicolas, ce sont les 5809 francs *«d’émoluments de contrôle»* réclamés en plus à sa mère par le  tribunal qui ont fait sortir le jeune retraité de ses gonds. *«Je suis tout simplement choqué»*, indique ce dernier.

Pour peu qu’un protégé dispose de quelques économies, il lui est impossible d’échapper à ces frais fixés par le Règlement sur les tarifs des frais en matière civile (RTFMC). *«L'émolument forfaitaire de décisions pour l'examen des comptes de curatelle est fixé à 100 francs, majoré d'un émolument complémentaire égal à 2‰ de la valeur nette de la fortune si elle dépasse 50 000 francs et de 3‰ si elle dépasse 300 000 francs»*, précise ainsi l’article 53. *«C’est comme si le tarif horaire d’un comptable était fonction de la fortune de son client et non du travail effectué»*, s’étrangle Brigitte Pivot, la présidente de l’association SOS Curatelles-Tutelles qui accompagne les protégés et leur famille.

Nicolas n’a pas encore décidé s'il allait contester la note de Me Ergote. Pour l’instant, entre deux visites à sa mère qui *«va bien»*, il a bouclé son rapport d'entrée en fonction et satisfait aux diverses requêtes administratives liées à son nouveau rôle de curateur, un travail qui *«ne prend tout de même pas des dizaines d'heures»*, fait-il remarquer.

Il a aussi pris le soin de recruter une aide ménagère à mi-temps plutôt que de continuer à dépendre de prestataires extérieurs. La bonne surprise est venue lorsqu’il a établi un budget prévisionnel, ainsi que le TPAE le demande. Il a réalisé que les finances de sa mère allaient mécaniquement être revalorisées de près de 1400 francs par mois, maintenant qu’elle n’avait plus à supporter les honoraires d’un curateur privé.

### **Les politiques face à leurs responsabilités**

Plus significatif encore pour les témoins et protégés dont l'expérience a nourri cette enquête, l’espoir soulevé par les réactions du monde politique à [la lettre ouverte de Serge Michel, rédacteur en chef de ](https://www.heidi.news/sante/curatelles-lettre-ouverte-aux-deputes-genevois)*[Heidi.news](https://www.heidi.news/sante/curatelles-lettre-ouverte-aux-deputes-genevois)*. *« Gageons que ces nouvelles révélations sauront intéresser les membres de votre assemblée, dans le cadre de la mission de contrôle de l’action publique qui vous échoit »*, écrivait-il aux membres du Grand Conseil le 16 septembre dernier, après la mise en ligne des premiers épisodes. Plusieurs députés, tous courants politiques confondus, se sont manifestés en retour.

Un collectif de citoyens réunis par l’association SOS Curatelles-Tutelles a lui aussi reçu de nombreuses réponses au courrier faisant référence à notre investigation, qu’il avait adressé courant septembre aux chefs de groupe du Grand Conseil, aux conseillers d’Etats responsables de la santé et de la protection sociale ainsi qu’aux autorités judiciaires de Genève. *«Le TPAE se doit d’être au service des protégés et de leur famille, afin d’aider les plus vulnérables et non de causer d’irrémédiables dégâts qui brisent des vies entières en grand nombre»,* souligne les signataires de la missive, qui demandent entre autres une réforme du mode de désignation des curateurs et la création d’un organe de surveillance véritablement indépendant.

### **Un projet de loi au Grand Conseil**

Le résultat le plus tangible de ces initiatives est le [projet de loi destiné à réviser le système des curatelles](https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL13366.pdf) déposé par l’UDC le 25 septembre 2023. *«Le système des curatelles à Genève et son fonctionnement en vase clos me scandalisent depuis des années »*, explique le député Guy Mettan, l’un des signataires du projet. Renvoyé devant la Commission judiciaire, le «PL 13366» prévoit notamment que le TPAE, sauf cas exceptionnel, « *désigne d’office aux fonctions de curateur des proches de la personne protégée ou une personne désignée par celle-ci* ».

*«Le curateur remet chaque mois à la personne concernée et à ses proches un décompte succinct des dépenses effectuées ainsi qu’un extrait des relevés de comptes »* prévoit aussi ce texte, qui abaisse en outre la rémunération du curateur à 75 francs de l’heure pour la gestion courante. Guy Mettan attend désormais d’être auditionné, et se dit *«raisonnablement optimiste»* quant à la suite que les députés réserveront à cette proposition de loi. *«Ce n’est pas un projet polémique,* relève l’élu. *Il n’est pas marqué idéologiquement ou partisan, et porte sur une problématique qui intéresse aussi bien à droite qu’à gauche.»*

### **Silence radio des intéressés**

Si cette exploration et les courriers adressés aux autorités ont su retenir l’attention des parlementaires, en revanche, le silence radio est en revanche de mise du côté de l’exécutif et du pouvoir judiciaire genevois. Enfin, pas tout à fait. *Heidi.news* a appris que la représentante du TPAE citée plus haut avait fait part de son exaspération vis-à-vis de la publication de notre lettre ouverte. Comme s'il était plus grave de s’adresser aux députés de la République et de se soucier du bien-être des protégés, que de laisser les plus fragiles de notre société aux prises avec des curateurs indélicats.

https://www.heidi.news/articles/de-la-curatelle-au-cauchemar-les-lecons-d-une-enquete-qui-a-secoue-le-landerneau

#Presse #heidi #Suisse 
 Heidi.news

Qui sont ces data brokers qui s’arrachent nos données comme si c’était de l’or?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/b9afabe8-8d8c-4957-9c20-45652a7348cf/medium" /><p>A l&#39;abri des regards, c’est un écosystème de l’ombre qui prospère à travers la collecte et la revente de nos données personnelles. De l’analyse de risques financiers au ciblage publicitaire, les possibilités sont légion, démultipliées par les possibilités de traçage offertes par les apps mobiles. Les obligations légales restent légères, du moins en Suisse, où domine encore une certaine culture du «pas vu, pas pris».</p><p>Imaginez. Vous vous réveillez un matin, ouvrez l’application des CFF pour réserver un billet de train, mais l’achat n’aboutit pas. A la place, un message d’erreur s’affiche: vous ne présentez pas les garanties suffisantes en matière de solvabilité, quand bien même vous n’avez pas une seule facture impayée. Vous réessayez le lendemain, puis le surlendemain… Rien n’y fait: vous êtes désormais privé de transaction. Cette mésaventure, <a href="https://www.srf.ch/news/schweiz/aerger-mit-kreditrating-firma-inkassofirma-intrum-drueckt-familie-sippenhaftung-auf" rel="nofollow noopener" target="_blank">relatée par la SRF</a>, Philipp B. l’a vécue en 2020.</p><p>Que s’est -il passé? Il s’avère que les CFF évaluent la solvabilité des clients via Intrum, une société de recouvrement qui s’appuie sur la «solvabilité négative dans un ménage». Deux informations sont employées pour identifier les mauvais payeurs: l’adresse et le nom de famille. Et si Philipp n’a rien d’un mauvais payeur, ce n’était pas le cas de son fils, récemment parti du domicile familial.</p>Le système a ainsi attribué par erreur au père le score de solvabilité du fils. Il a fallu que celui-ci saisisse le préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PPFDT) – le «gendarme» de la Confédération en la matière — pour que les entreprises du secteur mettent un terme définitif à cette pratique, et simplifient les recours pour les clients victimes d’erreur.

Durée totale de la procédure: [trois ans.](https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-95069.html)

### **«En Suisse, les data brokers sont un peu tabous»**

A l’abri des regards, des sociétés collectent, traitent, et parfois revendent nos données. On les appelle *data brokers*, ou courtiers en données personnelles. *«Les data brokers, en Suisse, restent un secteur un peu tabou»*, commente Sylvain Métille, professeur à l’Université de Lausanne et spécialiste de la protection des données. Il existe différents types de *data brokers*, spécialisés dans toutes sortes de données et de secteur d’activités: acteurs du marketing numérique et de la publicité ciblée souvent méconnus du grand public – le scandale [Cambridge Analytica](https://www.heidi.news/sciences/the-great-hack-cambridge-analytica-ou-la-grande-evasion-des-donnees-personnelles) a en partie levé le voile en 2018 –, annuaires en ligne agrégeant les informations publiquement disponibles sur une société ou une personne, sociétés de recouvrement spécialisées dans la collecte d’informations financières…

En Suisse, l’évaluation de la solvabilité financière bénéficie d’un traitement de faveur: il n’y a pas besoin de recueillir le consentement de la personne dont les données sont traitées, explique Sylvain Métille.  *«C’est une logique d’intérêt public prévue par la loi, afin d’éviter que les personnes insolvables n’empêchent l’accès à leurs données*, explique-t-il. *Il faut toutefois que les données aient moins de 10 ans, que la personne soit majeure, et que les grands principes généraux de la loi sur la protection des données (proportionnalité, finalité, etc.) soient respectés.»*

Et pour le transfert de ces données à des prestataires? *«Dans le cadre de la nouvelle loi sur la protection des données entrée en vigueur en septembre 2023, les personnes concernées devront en principe être informées sous 30 jours – soit par la société qui cède les données, soit par le data broker qui les acquiert»*, poursuit l’avocat.

Quand ce sont des données personnelles dites «sensibles» qui sont traitées, le consentement doit être recueilli explicitement. Leur liste est arrêtée par la loi: opinions et activités religieuses, philosophiques, politiques ou syndicales, données de santé ou relevant de l’intime, mesures d’aides sociales, et enfin éventuelles poursuites pénales ou administratives.

Malgré ce garde-fou, il est possible d’établir des profilages très intrusifs, car les données exploitables sont légion. Il y a les traces que l’on laisse derrière soi en magasin ou en ligne: réseaux sociaux, recherches en ligne, nombre de visites sur tel ou tel site, transactions… Il y a aussi le smartphone, qui nous suit partout et en sait long: déplacements, activités sur les réseaux sociaux, voire détails de la vie intime. Les apps qu’on y installe ont tendance à «cafter» auprès d’acteurs tiers, pour toutes sortes de raisons plus ou moins légitimes: mesure des audiences, rapports de plantage, collecte d’informations pour la publicité ciblée…

> *«On peut faire un portrait de moi et de ma famille très précis, qui constitue une atteinte à ma vie privée, mais ne constitue malheureusement pas une atteinte illicite aux yeux de la loi suisse»*, résume un juriste spécialisé dans le droit des données personnelles, fin connaisseur du secteur.

### **Des mouchards et des apps**

*«Pour tous les traitements de données personnelles, y compris via les applications mobiles, il est obligatoire qu’un responsable du traitement soit clairement identifié aux yeux de la loi»*, rappelle Sylvain Métille. Dans les faits, les développeurs ont de plus en plus souvent recours à des SDK (*Software Development Kits*), des bibliothèques fournies clés en main… au risque d’une perte de contrôle.

*«Ce sont l'équivalent des parpaings et des fenêtres pour les codeurs, qui évitent de devoir réinventer la roue à chaque fois»*, explique Esther Onfroy,  experte en sécurité informatique. *Les SDK sont des boîtes noires, des briques logicielles déjà compilées. Or, pour savoir ce qu’il y a à l'intérieur, nous sommes tenus de croire leurs créateurs sur parole….»*

Pour en avoir le cœur net, il faut ouvrir les boîtes noires. Et pour cela, passer chaque app sur une sorte de banc d’essai numérique afin d’analyser les flux de données entrants et sortants. C’est ce que fait le projet [Exodus Privacy](https://exodus-privacy.eu.org/en/), créé en 2017 par Esther Onfroy, qui permet à chacun de passer ses applications Android au banc d’essai pour en révéler les mouchards, les classant en plusieurs catégories: *crash reporting*, *analytics*, publicité, géolocalisation… La plate-forme montre aussi les autorisations demandées au téléphone: microphone, GPS, caméra, par exemple. La société HestiaLabs, créée à Genève par le mathématicien Paul-Olivier Dehaye, développe des outils comparables.

Ces expertises indépendantes sont essentielles pour vérifier les allégations des entreprises sur le traitement des données. Lesquelles tombent parfois des nues. En 2022, Google avait ainsi désactivé le téléchargement de dizaines d’applications – dont des applis de prière musulmane très populaires – suite à la découverte, dans un SDK de ciblage marketing, de lignes de code visant à exfiltrer des données sensibles à l’intention du[ renseignement américain](https://www.protocol.com/bulletins/google-android-apps-data-harvesting).

### Rencontres du troisième type

Le secteur se distingue par son opacité. En 2020, l’autorité norvégienne de protection des consommateurs a testé 10 apps mobiles très populaires, notamment de rencontre (Tinder, GrindR, OKCupid, Happn). Dans son[ rapport](https://storage02.forbrukerradet.no/media/2020/01/mnemonic-security-test-report-v1.0.pdf), elle liste des centaines d’acteurs de l’ombre qui collectent les données (géolocalisation, genre, préférences sexuelles, identifiant mobile…) des utilisateurs à leur insu.

En Europe, ces pratiques contreviennent au Règlement général sur la protection des données (RGPD), qui exige le consentement explicite des utilisateurs lorsque leurs données sont transmises à des tiers. Elles posent aussi problème en Suisse: le Préposé fédéral à la protection avait été [saisi fin 2020 à propos de l’app de rencontre Once](https://swissprivacy.law/242/), conçue par une startup domiciliée à Schwytz, qui ne permettait pas aux utilisateurs de supprimer leurs données.

L’enquête avait aussi montré que la société transmettait les données à des prestataires extérieurs sans en avertir clairement ses utilisateurs, et qu’elle ne s’assurait pas que leur exploitation restait dans le cadre du service demandé –  ce qui est pourtant un impératif légal. La société suisse a accepté les propositions du préposé [à l’issue de la procédure en 2023](https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-95660.html)…  mais ne sera pas en mesure de les appliquer elle-même, ayant été rachetée en 2021 par le géant international Dating Group.

### **Un marché opaque de la donnée**

C’est dire si le business des données est opaque, tant les rachats successifs à l’international compliquent encore leur suivi. *«Les traceurs que nous avons identifiés avec Exodus Privacy ne sont que la partie émergée de l’iceberg*, avertit Esther Onfroy. *Car les data brokers peuvent revendre les données à d’autres société, via [par exemple ce type de portail](https://datarade.ai/). Sans compter que les données numériques se copient, et peuvent facilement se retrouver à vendre en ligne au plus offrant sur le dark web à la faveur d’un piratage.»*

Un secteur d’activité où opèrent également des firmes suisses. En 2021 la revue en ligne *[Das Netz Ist politisch](https://dnip.ch/2021/09/28/auch-in-der-schweiz-gibt-es-data-brokers-die-millionen-von-user-profilen-beherbergen/)* notait, dans le rapport norvégien de 2020 sur les apps de dating, une référence à 42matters. Cette start-up de l’EPFZ a depuis changé de modèle d’affaires, mais elle a agi au moins jusqu’à 2019 en qualité de *data broker*, permettant à ses clients de cibler les utilisateurs de telle ou telle app mobile… et cela, sans jamais avoir à recueillir leur consentement explicite. De façon parfaitement légale, en l’espèce.

Cette faille légale repose sur l’identifiant mobile, attribué de façon unique à chaque smartphone pour suivre l’évolution de certains comportements dans le temps. Utilisé pour le ciblage publicitaire, il n’est pas considéré comme une donnée personnelle sensible ou comme un élément de profilage par le droit suisse. *«L’annonceur ne connaît pas l’identité de la personne à qui il envoie telle ou telle publicité»*, précise le spécialiste Sylvain Métille, pour expliquer cette curiosité.

### **David contre Goliath au pays des données**

Dans l’Union européenne, un tel traitement est interdit à moins de disposer d’une base juridique comme le consentement explicite de l'utilisateur. En Suisse, la philosophie est inverse: la pratique est autorisée, à moins qu’elle ne viole un des principes de la loi sur la protection des données (LPD). Encore faut-il, pour la personne lésée, le démontrer. Et les entreprises peuvent arguer d’un intérêt privé ou public prépondérant pour justifier leur pratique, explique Sylvain Métille. *«Il faut prouver que le traitement est disproportionné ou a été mené à son insu. Pour les entreprises, cela constitue un avantage, car cette justification intervient souvent après coup.»*

En pratique, faire respecter le droit en vigueur est une gageure, précise Esther Onfroy, qui y voit avant tout un problème politique. *«Il existe des centaines de milliers d’apps téléchargeables en Europe susceptibles de collecter des données personnelles, avec des acteurs privés qui ont beaucoup plus de moyens que les structures nationales chargées de les contrôler* (comme le Préposé fédéral en Suisse, ndlr.)*.»*

*«Les enjeux liés aux données personnelles sont intangibles, tant pour les individus que pour les entreprises, qui vont avoir tendance à se défausser en invoquant l’ignorance,* poursuit-elle. *A leur tour, les régulateurs vont dire que c’est aux citoyens d’exercer leurs droits  – d’accès, d’opposition…  – auprès des entreprises.*

> *L’action doit être collective, pas individuelle, sinon le combat est perdu d’avance.»*

Or, si le RGPD ouvre la porte à des *[actions de groupe](https://swissprivacy.law/147/)* en justice, la loi suisse, y compris [dans sa nouvelle mouture](https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/que-vaut-la-nouvelle-loi-suisse-en-matiere-de-protection-des-donnees-personnelles), ne le permet pas.

François Charlet, auteur d’un [ouvrage](https://www.helbing.ch/fr/detail/ISBN-9783719042769/Protection-des-donn%C3%A9es-en-entreprise) sur la protection des données en Suisse, dénonce aussi la disproportion des rapports de force. *«Certes, les clients ont un droit d’accès aux données qui les concernent. Mais les entreprises ou organes fédéraux ne fourniront ni plus ni moins que les informations requises par la loi, et c’est bien là la seule information gratuite. Pour aller plus loin et vérifier si elles disent vrai, il faudra en passer par des procédures civiles, administratives, voire pénales…»*

Pour le juriste, la seule solution viable à grande échelle serait de *«démonétiser»* enfin les données personnelles. *«Tant que les gens seront prêts à payer pour des services “gratuits”, comme le téléchargement d’un jeu mobile, avec leurs données plutôt que financièrement, le modèle actuel va persister»*, analyse-t-il. Et l’industrie parallèle de la donnée pourra continuer à prospérer.

https://www.heidi.news/articles/qui-sont-ces-data-brokers-qui-s-arrachent-nos-donnees-comme-si-c-etait-de-l-or

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Auprès d’un prêtre russe, je découvre que Dieu aime la bombe atomique

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/2a62d95e-26d3-4d32-bec5-0f005b265f64/medium" /><p>Mon périple le long de la Volga touche à sa fin. A Balakovo, une petite ville de la Haute Volga — autant dire, au milieu de nulle part —, je fais la rencontre du père Mikhaïl Rodin, qui me donne un sermon d’Apocalypse nucléaire. Après tout, que vaudrait un monde sans la Russie pour l’éclairer de sa flamme sacrée? </p><p><em>«[En cas de guerre nucléaire], nous irons au ciel en tant que martyrs, tandis que les agresseurs de la Russie mourront, tout simplement, sans avoir eu le temps de se repentir.»</em></p><p>Vladimir Poutine, au club Valdaï à Sotchi en 2018</p><a href="/articles/aupres-d-un-pretre-russe-je-decouvre-que-dieu-aime-la-bombe-atomique">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/aupres-d-un-pretre-russe-je-decouvre-que-dieu-aime-la-bombe-atomique

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Sur Gaza, la diplomatie d’Ignazio Cassis peine à trouver le ton qui rassemble

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/39e2bc13-8356-4384-8001-e0df8d645b6b/medium" /><p>En Suisse, la ligne hésitante du ministre des affaires étrangères sur le conflit entre Israël et le Hamas fragilise la diplomatie du pays. Au point que certains le verraient déjà bien changer de département.</p><p>Il est le «Prügelknabe» du Conseil fédéral. Traduisez le bouc émissaire. La formule est de la NZZ qui, <a href="https://www.nzz.ch/meinung/entzauberung-der-schweiz-die-aussenpolitische-schwaeche-schadet-dem-land-ld.1764832" rel="nofollow noopener" target="_blank">dans un éditorial du samedi 11 novembre</a>, relève la position délicate du ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis, pour qui le conflit entre Israël et le Hamas se transforme en un champ de mines.</p><p><strong>Trop, trop peu ou trop tard.</strong> Le ministre peine à trouver le ton juste dans un conflit qui divise profondément les opinions publiques.</p><a href="/articles/sur-gaza-la-diplomatie-d-ignazio-cassis-peine-a-trouver-le-ton-qui-rassemble">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/sur-gaza-la-diplomatie-d-ignazio-cassis-peine-a-trouver-le-ton-qui-rassemble

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Une révolution venue des cuisines

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/ea4d3301-76b1-402e-822c-749dcbb1afb1/medium" /><p>En novembre 2019, votre média préféré démarrait la publication de mon reportage <a href="https://www.heidi.news/explorations/et-si-l-on-cuisinait-comme-on-medite" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Et si l’on cuisinait comme on médite?»</a>. D’un monastère coréen au Jura suisse, d’un chef parisien à un génie japonais, je vous racontais comment la haute-gastronomie redécouvrait le sens de la nourriture et lui redonnait une sacralité. Quatre ans et une pandémie plus tard, ce reportage s’est étoffé. Il est devenu un livre sorti cette semaine, <a href="https://www.editions-stock.fr/livres/essais-documents/cuisine-et-spiritualite-9782234092228" rel="nofollow noopener" target="_blank">Cuisine et spiritualité</a>, aux éditions Stock. En voici, en bonnes feuilles, le préambule.</p><p>C’est une première et un vrai choc culturel.</p><p>Début mars 2022, le très sélect jury des Asia’s 50 Best Restaurants décernait un Icon Award – l’équivalent d’un Oscar de la gastronomie – à Jeong Kwan, un choix aux antipodes du <em>star system</em>, du luxe et de la sophistication extrêmes qui prévalent dans cet univers depuis deux ou trois décennies. Celle qui a renoncé à la viande, au poisson et aux laitages pour œuvrer à la préservation des ressources de la planète et des êtres sensibles éblouissait l’assemblée avec sa philosophie d’ascèse et de sobriété joyeuse.</p>#### **Lire ou relire notre Exploration (2019)** «[Et si on cuisinait comme on médite?](https://www.heidi.news/explorations/et-si-l-on-cuisinait-comme-on-medite)»

Jeong Kwan? Une silhouette menue qui paraît toujours danser dans ses amples tenues déployées comme des ailes de papillon, un visage à l’ovale parfait, illuminé par un large sourire, des yeux pétillants sous le crâne lisse des nonnes bouddhistes zen.

### Un monastère isolé au cœur de la «foodosphère»

Une première? La dame exerce son art dans un monastère bouddhiste isolé des montagnes de Corée du Sud, à l’orée d’un parc national, à des lieues de Séoul. Jeong Kwan sunim, ou la Vénérable comme la désigne sa communauté, est une dignitaire respectée de l’ordre Jogye – branche la plus importante du bouddhisme coréen –, désormais à la tête de l’ermitage Chunjinam.

![Untitled (1).png](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/27d738c1-c4e2-4b4a-a40b-28e619eca167/large)

«Elle n’est pas une cheffe, n’a jamais eu de restaurant, et la cuisine est pour elle une pratique spirituelle», témoigne Éric Ripert, lui‐même à la tête du Bernardin, établissement triplement étoilé à New York. Il porte aussi au crédit de Jeong Kwan son respect absolu des ingrédients et de l’environnement, et son souhait de rendre les gens heureux grâce à l’énergie positive infusée dans ses plats...

La Vénérable a pratiqué loin des yeux du monde la méditation et l’art culinaire durant près de quarante ans, jusqu’à ce qu’un journaliste du *New York Times* croise son chemin, écrivant qu’elle créait les mets les plus exquis qui soient, subjugué notamment par l’esthétique, le rituel et la symbolique de son thé à la fleur de lotus.

### Sans jamais prendre des cours

Une première donc, et un choc culturel dans la mesure où cette femme à la petite étincelle au coin de l’œil et au véganisme militant a traversé deux ou trois plafonds de verre pour conquérir l’univers de la haute cuisine. Et pas seulement. Sa passion pour les saveurs et sa créativité la placent dans l’avant‐garde des chefs visionnaires, estime en substance l’académie d’experts des World’s 50 Best.

L’influence de celle qui n’a jamais suivi d’enseignement technique ni œuvré au sein d’une brigade dépasse largement les portes du monastère de Baekyangsa, l’horizon de Séoul et le continent asiatique pour inspirer de nombreux créateurs internationaux, de New York à Paris ou Copenhague, et tous ceux qui comme eux sont sensibles à la qualité de l’alimentation et au devenir de la planète.

### Alain Ducasse à la manœuvre

Cette histoire n’est pas seulement celle d’une «nonne philosophe». Elle débouche sur de nombreuses autres rencontres. Un Japonais qui communie littéralement avec le règne végétal, médite longuement en pilant chaque jour le sésame du *gomadofu* traditionnel, cuisine selon les préceptes millénaires de la *shojin ryori,* sans aucun produit animal ni électricité, préceptes toujours en usage dans certains monastères du Japon contemporain.

Autre personnalité étonnante, Toshio Tanahashi est venu initier la brigade du Plaza Athénée à un savoir japonais remontant aux premiers siècles de notre ère, voici quelques années, à la demande d’Alain Ducasse. Le chef et entrepreneur multi-étoilé a rendu hommage à Toshio pour sa contribution au concept de naturalité; plusieurs instruments et techniques, mais aussi un certain état d’esprit, ont désormais été adoptés par ses équipes.

### Le Suisse meilleur cuisinier du monde s’y met aussi

New York, printemps 2021, en pleine pandémie. Le Suisse Daniel Humm – élu meilleur chef du monde en 2017 par la même académie des 50 Best – crée une onde de choc en annonçant sa conversion au véganisme. Et la réouverture prochaine d’Eleven Madison Park, après une mue complète. On retrouve ici la patte du même Toshio à ses côtés, dans un des restaurants les plus vibrants et encensés de la «foodosphère». Daniel Humm et son équipe n’ont sans doute jamais été aussi créatifs, inspirés et cohérents qu’au lendemain de ce virage radical.

Autre étoilé en quête de spiritualité, marqué depuis toujours par l’Asie, Pascal Barbot est allé récemment se ressourcer auprès de la Vénérable Wookwan, personnalité éminente du bouddhisme coréen, à la veille de la réouverture de l’Astrance, son nouveau restaurant parisien.

De l’autre côté des montagnes, dans le Jura suisse, Ming Shan, premier centre d’études taoïstes de référence en Europe – dont les idéogrammes solaires et lunaires pourraient se traduire par «montagne de clarté» –, a ouvert en 2019. La cheffe suisse Judith Baumann, pionnière de la cueillette sauvage et grande connaisseuse de la flore et des ressources végétales, désormais taoïste, y explore les arcanes d’une cuisine marquée plus que jamais par les correspondances entre les éléments, les organes, les couleurs, le souffle de la nature.

### Le savoir lié aux plantes

L’enseignement multiple, holistique, qui y est dispensé suscite un grand engouement et fascine ; la voie du tao mêle ici les approches corporelles, intellectuelles, spirituelles, de la diététique chinoise à l’herboristerie et à la permaculture notamment.

La nature, sauvage ou apprivoisée. À Ming Shan comme ailleurs, un peu partout, on redécouvre les ressources du végétal, un savoir lié aux vertus des plantes, que nos couvents et monastères maîtrisaient tout particulièrement hier encore : des ressources thérapeutiques, nutritionnelles, médicinales, énergisantes, foisonnantes de saveurs. Une nouvelle génération de cueilleuses et de cuisiniers s’en empare, s’inscrivant dans la filiation de l’étonnante Hildegarde de Bingen (1098‐1179).

### Au programme des écoles

Le véganisme et le végétarisme ont gagné la haute cuisine, avec en filigrane un vrai respect du vivant et de la nature, de son offrande de beauté et de bien‐être, le refus du gaspillage, une conscience des enjeux de l’alimentation en termes de santé aussi. Les meilleures écoles de cuisine s’en inspirent et les inscrivent à leur programme depuis peu, à l’instar du CordonBleu: *sachal eumsik*, soit la culture culinaire des temples bouddhiques coréens, *shojin ryori* japonaise, cuisine du tao : ces traditions millénaires convoquent aussi la notion d’écologie spirituelle, comme elles semblent prémonitoires d’à peu près toutes les tendances contemporaines...

Il ne suffit pas, bien sûr, de se doter d’un beau potager ou même d’une ferme expérimentale – cultivés en biodynamie, en permaculture, en agroforesterie et selon toutes les méthodes pionnières et bonnes pour le climat.

Notre «maison commune» est menacée de toutes parts et le pape François lui‐même appelle à un changement radical. Perte de biodiversité, dégradation des écosystèmes, culture de la surconsommation et du gaspillage, épuisement des ressources et menaces sur l’eau : le souverain pontife invoque son homonyme et modèle François d’Assise pour prôner une « écologie intégrale », environnementale, économique et sociale.

### La sobriété joyeuse

La catastrophe actuelle est la conséquence de l’«anthropocentrisme moderne», dénoncent en substance les deux François à neuf siècles d’écart en invitant de même à une sobriété joyeuse, à dépasser les individualismes au profit d’une forme d’écologie spirituelle.

Les chefs sont aujourd’hui de plus en plus nombreux à s’engager au sein de leur communauté pour des causes diverses. La pandémie a remis en lumière la pauvreté et la précarité au cœur des villes: des *food trucks* se déploient, des réfectoires solidaires voient le jour et se multiplient; des repas sont cuisinés bénévolement. Les catastrophes naturelles se succèdent, de plus en plus souvent sous l’effet du changement climatique: des équipes de cuisiniers se mobilisent pour offrir leur aide. La guerre impensable hier se déchaîne à quelques heures de nos frontières: un formidable réseau de solidarité se met en place pour acheminer des denrées alimentaires, avec en première ligne les collaborateurs de plusieurs grands chefs internationaux, à commencer par José Andres.

### Les chefs se découvrent humanistes

«On assiste à une vraie révolution humaniste venue des cuisines», constate le formidable Massimo Bottura, parmi les premiers à s’être engagé en créant la fondation Food for Soul, dont les réfectoires solidaires ont essaimé sur tous les continents.

«La pandémie et les millions de personnes jetées à la rue du jour au lendemain m’ont rendu très conscient du sens de la nourriture. Conscient que nous devions avoir des objectifs plus élevés que juste servir les gens riches», note de son côté son ami et collègue Daniel Humm. Dénonçant la faillite d’un modèle, le New‐Yorkais a créé l’ONG Rethink Food une semaine après le début de l’épidémie, servant plus d’un million de repas aux gens dans le besoin durant cette période. Face à un système agroalimentaire devenu intenable, le futur sera végétal, estime le chef.

Cuisiner peut être une manière de méditer, nous disent de concert Éric Ripert et Jeong Kwan, Toshio Tanahashi et la Vénérable Wookwan. Bien plus, il y a lieu d’inverser les rapports de domination de l’homme sur la nature et de resacraliser celle‐ci. Prendre conscience de la coupure entre l’homme et le vivant pour retrouver cette intelligence et cet amour profonds des plantes, des animaux, cette continuité entre eux et nous. Réenchanter le monde en célébrant sa beauté.

Voici venir une cuisine habitée, qui apporte des réponses à la quête contemporaine, à la crise climatique et environnementale sans précédent. Au grand vide spirituel, de plus en plus obsédant, assourdissant, de nos sociétés, la fleur de lotus et ses avatars déploient leurs réponses discrètes.

Demain, l’humanité mangera *shojin*, ou ne sera plus, en somme...

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Le dessin de la semaine: le Conseil fédéral prêt à négocier de nouveau avec Bruxelles

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/77599cc6-004b-4844-a5e4-7eef3dc82d35/medium" /><p>Toutes les semaines, le dessinateur jurassien Pitch Comment croque un fait d&#39;actualité pour Heidi.news.</p><p>C’est imminent, on va voir ce qu’on va voir. Dans un <a href="https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-98509.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">communiqué</a> un rien cryptique, le Conseil fédéral a fait valoir mercredi 8 novembre 2023 qu’il était prêt à reprendre les négociations avec l’Union européenne, après l’abandon spectaculaire — et unilatéral — des discussions sur un accord-cadre par la Suisse en mai 2021.  Le Conseil fédéral <a href="https://www.letemps.ch/suisse/le-conseil-federal-veut-relancer-les-negociations-avec-l-ue-sur-un-accord-cadre" rel="nofollow noopener" target="_blank">marche sur des œufs</a>, sur ce dossier aux répercussions stratégiques importantes pour le pays, et politiquement très sensible .</p><p>La Confédération entend désormais d’avancer sur plusieurs dossiers séparés, parmi lesquels la libre circulation des travailleurs, les transport aériens et terrestres, l’échange d’électricité, sans oublier la contribution financière de la Suisse. Et comme il ne faudrait pas pousser Berne dans les orties, on en est encore à la définition d’un mandat de négociation qui, après avoir été validé par les Sept Sages d’ici la fin de l’année, sera soumis au Parlement.</p>Du côté de la Commission européenne, auprès de qui la Suisse n’est pas réputée en odeur de sainteté, on «prend note» en attendant que les choses deviennent sérieuses.

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Les Petits Repor'terres No 2: de la viande grillée qui cache des légumes

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/40d005c3-851e-4f83-8e54-f606cf179e19/medium" /><p>Les Petits Repor’Terres est un podcast sur l&#39;alimentation de demain animé par trois enfants. Des salades cultivées dans les airs à la viande de synthèse, ils sont immergés, micros en mains, au sein d’entreprises innovantes. L&#39;objectif? Comprendre, par leurs regards, le potentiel de ces nouveautés à séduire les consommateurs en herbe pour composer l&#39;assiette de demain.</p><p>Dans ce deuxième épisode de la série, les Petits Repor’Terres partent à la rencontre de la startup Planted Foods AG, à Kemptthal, près de Zurich.  Elle commercialise des substituts à la viande fabriqués à base de protéine végétale, qu’on peut trouver dans les magasins d’alimentation en Suisse.</p><p>Alors, le poulet à base de protéines de pois, d’eau et d’huile de colza, ça fait illusion? Et ça se fabrique comment, de la viande végétale? Ecoutez nos jeunes reporters — et gastronomes exigeants — découvrir la manufacture de Planted, où ça sent «comme quand on fait bouillir des légumes».  À vos écouteurs!</p><div id="podle-player-container"></div>

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Tous ciblés, en Suisse et ailleurs: le marketing web étend le domaine de la lutte

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/37a03296-4578-4cdf-9446-33b079593a3c/medium" /><p>La collecte et l’exploitation de nos informations intimes sont en général légitimées par des fins marketing. Si le fait d’être ciblé par de la publicité peut sembler anodin, c’est toute la chaîne de valeur qui interroge. La réglementation ne semble pas freiner l’appétit des plateformes, qui mettent en place des contre-mesures pour continuer leur business.</p><p>C’est un milieu dans lequel règnent les anglicismes et les acronymes. KPI, DSP, SSP, CPA, CRM… Difficile de s’y retrouver quand on ne maîtrise pas ce jargon. Pourtant, nous sommes en étroite relation avec ce secteur au quotidien, qui nourrit l’ambition de toujours mieux nous connaître pour influencer nos comportements.</p><p>Son nom? Le marketing numérique. C’est à lui qu’on doit toutes les publicités qui s’affichent sur nos écrans: réseaux sociaux, sites web, applications, télévisions connectées…</p>En Suisse, les dépenses publicitaires ont atteint 5,3 milliards de francs en 2022. La publicité en ligne pèse 63% de ce montant, [selon Statista](https://www.statista.com/outlook/amo/advertising/switzerland#ad-spending). Les seules dépenses pour les annonces sur les moteurs de recherche s’élèvent à 1,76 milliard, perçus pour l’essentiel par Google. Cette domination a d’ailleurs fait l’objet d’une enquête du Surveillant des prix,[ publiée en avril 2023](https://www.preisueberwacher.admin.ch/dam/pue/fr/dokumente/studien/bericht_online_werbung_27042023.pdf.download.pdf/Rapport%20SPR%20Enqu%C3%AAte%20publicite%20en%20ligne.pdf), qui voit dans ce quasi monopole un facteur de hausse des prix.

Le commerce en ligne ne cesse lui aussi de progresser. Entre 2019 et 2023, [selon la faîtière du secteur](https://www.rts.ch/info/economie/13844651-lecommerce-a-enregistre-un-leger-repli-en-suisse-en-2022.html), il a enregistré une hausse de 44%. Les Suisses ont dépensé quelque 14 milliards de francs dans des boutiques en ligne. Les entreprises s’adaptent aux nouveaux modes de consommation, à l’image de[ Coop qui a fusionné ses sites d’e-commerce en 2020](https://www.ictjournal.ch/news/2020-06-18/coop-fusionne-ses-sites-de-commerce-en-ligne). Le marketing occupe une place stratégique dans cette transformation numérique de nos modes de vie.

### Pas de performance sans données

On distingue deux types de campagnes publicitaires, comme l’explique Damien Fournier, fondateur de l’agence de marketing numérique Bright: les campagnes de notoriété et les campagnes de performance.

* Les campagnes de notoriété visent, comme leur nom le suggère, à apporter de la visibilité à une marque.

* De leur côté, les campagnes de performance ont pour objectif de générer une action de la part du consommateur: cliquer sur un lien, remplir un formulaire – qui permettra à l’entreprise un ciblage ultérieur –, ou même procéder à une transaction, la finalité de ce qu’on appelle l’entonnoir marketing.

Ces deux axes sont complémentaires. En l’occurrence, ce sont les campagnes de performance qui nous intéressent ici. *«Les annonceurs utilisent les données des éditeurs pour cibler une certaine catégorie de consommateurs, essentiellement selon des ciblages sociodémographiques»*, indique Pierre Berendes, spécialiste en publicité numérique.

Prenons un exemple. Une entreprise qui vend des vélos sur sa boutique en ligne cherche à augmenter son chiffre d’affaires. Elle mandate une agence de marketing numérique qui va se charger de la campagne, et acquiert des espaces publicitaires sur Facebook, Google et certaines applications de médias suisses. Ces plateformes «vendent des audiences», c’est-à-dire qu’elles diffusent des publicités de ce magasin de vélo uniquement auprès des internautes qui correspondent aux critères définis par l’agence de marketing.

### De l’importance de connaître sa cible

Evidemment, pour fournir un tel service, les plateformes se doivent de connaître au mieux leurs audiences. D’où l’importance de collecter et exploiter de grandes quantités de données personnelles. Les annonceurs peuvent aussi transférer des données sur leur propre clientèle, pour permettre aux plateformes de cibler des profils similaires.

La segmentation des individus en fonction de leurs caractéristiques se fait de manière automatisée, et les géants du numérique, comme les autres entreprises, conservent jalousement les algorithmes qui leur permettent d’asseoir leur domination. Mais l[es critères qui peuvent être définis](https://support.google.com/google-ads/answer/2497941?sjid=264107785624427860-EU) pour[ cibler les utilisateurs](https://www.facebook.com/business/help/633474486707199) sont sans fin: géolocalisation, genre, âge, langue, statut marital, éducation, emploi, centres d’intérêt, habitudes comportementales…

A force de données récoltées, la connaissance des utilisateurs touche à l’intime. [Selon une enquête de ](https://themarkup.org/privacy/2023/06/08/from-heavy-purchasers-of-pregnancy-tests-to-the-depression-prone-we-found-650000-ways-advertisers-label-you)*[The Mark Up](https://themarkup.org/privacy/2023/06/08/from-heavy-purchasers-of-pregnancy-tests-to-the-depression-prone-we-found-650000-ways-advertisers-label-you)* parue en juin 2023, la base de données de la plateforme publicitaire de Microsoft, Xandr, disposerait ainsi de plus de 650'000 manières de catégoriser les consommateurs. Les annonceurs pourraient ainsi cibler de *«gros acheteurs»*, des habitués des lieux de culte ou encore des personnes qui se *«sentent facilement découragées»*.

*«Facebook est sans doute la plateforme la plus intrusive, mais Google n’est pas en reste»*, observe Rui de Freitas, cofondateur de C Wire, une société qui propose un ciblage publicitaire contextuel sans suivi des utilisateurs. Et d’ajouter: *«Lorsque les annonceurs collaborent avec ces plateformes, ils acceptent de faire confiance à des boîtes noires dont ils ignorent le véritable fonctionnement»*.

### Course à l’armement

L’entrée en vigueur du Règlement général européen sur la protection des données (RGPD) en 2018 a obligé les acteurs du marketing numérique à modifier leurs pratiques. Certains spécialistes du secteur prédisaient d’ailleurs que la régulation allait réduire drastiquement l’efficacité des publicités ciblées. Parmi les mesures perçues comme les plus impactantes pour le secteur figurait l’obligation pour tous les sites web de recueillir le consentement pour les cookies, ces petits fichiers qui enregistrent nos activités au long cours.

Initialement destinés à personnaliser les sites web, les cookies sont devenus une méthode industrielle de traçage des internautes. Le RGPD a surtout mis à mal les cookies tiers, utilisés par des plateformes extérieures à cette fin. *«Rien ne justifie que Facebook ou Google puisse connaître tous les sites que je visite»*, estime Rui de Freitas. En France, [près de 4 personnes sur 10](https://www.cnil.fr/fr/evolution-des-pratiques-du-web-en-matiere-de-cookies-la-cnil-evalue-limpact-de-son-plan-daction) refusent les cookies non essentiels, depuis que le RGPD offre cette possibilité. Google a annoncé la fin de ces cookies tiers pour 2024.

Mais si la régulation a gagné une bataille, le bras de fer avec les Gafam se poursuit. *«Facebook cherche des solutions plus persistantes, alors que l’objectif du RGPD est de rendre la navigation plus privée»*, regrette Rui de Freitas. L’entreprise a développé son propre service, [l’API Conversions](https://fr-fr.facebook.com/business/help/2041148702652965), comme alternatives aux cookies de traçage. *«Ces informations passent désormais sur les serveurs de Facebook plutôt qu’à travers le navigateur comme c’était le cas avec les cookies tiers»*, résume le spécialiste.

Google a pour sa part adapté son célèbre service d’analyse d’audience, utilisés par des millions de sites web dans le monde. Google Analytics 4 (GA4) a été recalibrée pour respecter les règles en matière de protection des données… tout en continuant de miser sur un ciblage massif. Elle intègre des algorithmes d’apprentissage machine, capables de faire émerger des tendances et de fournir des indicateurs prédictifs sur le comportement des utilisateurs d’un site, comme la propension à acheter ou décliner un service.

### Toujours plus de segmentation

Le succès du marketing se mesure à sa capacité à susciter des comportements. *«Par exemple, pour une campagne où l’objectif serait d’apporter des visites sur le site de l’annonceur, il faudrait un taux de clic compris entre 0,5% et 1% pour que celle-ci soit considérée comme un succès»*, indique Alexandre Cahagne, spécialiste des médias numériques au sein de l’agence Havas. Au-delà de 1%, c’est un excellent résultat.

En rendant le ciblage plus incertain, donc moins efficace, la régulation porte un coup à l’efficacité des campagnes de marketing web. *«La régulation réduit la qualité des audiences, donc celles-ci sont fatalement beaucoup plus larges,* analyse Damien Fournier. *Au final, la publicité coûte plus cher, puisqu’il en faut davantage pour atteindre les objectifs.»*

Le secteur multiplie donc les innovations pour rester compétitif, en segmentant toujours plus. L’agence Bright a développé[ un modèle qu’elle a nommé le «lifetime value»](https://bright.swiss/la-lifetime-value-ltv-ciblee-par-consommateur/) (LTV). Damien Fournier explique: *«Notre lifetime value est un indicateur qui permet à une entreprise de déterminer la valeur de ses clients, ce qui lui permet d’adapter ses campagnes marketing en tenant compte de cette information.»*

*«Il s’agit d’un modèle mathématique,* précise Darko Macoritto, data scientist chez Bright. *Nous analysons les données clients d’une entreprise – lesquelles sont anonymisées au moyen d’un identifiant individuel généré par l’entreprise elle-même. En tenant compte de la fréquence d’achat, du panier moyen et de la marge des produits, Bright détermine la valeur totale d’un client sur une période donnée.*»

Prenons un exemple: le client X a dépensé 300 francs les trois dernières années. Le modèle a estimé que ce client allait en dépenser encore 200 francs ces deux prochaines années. Sa valeur est donc fixée à 500 francs. *«Cette indication permet à l’entreprise d’adapter ses prestations*, indique Damien Fournier. *Elle peut choisir de traiter les demandes de ce client plus rapidement, parce qu’elle estime que sa valeur le justifie.»*

### L’irruption du numérique dans la rue

Les affiches publicitaires traditionnelles qui tapissent les murs de nos villes et de nos magasins ont désormais de nouveaux concurrents: des écrans où défilent des annonces dynamiques, dont la diffusion peut avoir été programmée selon des conditions spécifiques – en fonction de l’heure ou de la météo par exemple. De plus en plus d’enseignes recourent à ce procédé, intitulé «*digital out of home*» dans le domaine du marketing numérique. Vous pourrez en trouver aussi dans les grandes gares CFF. Certaines villes, comme Paris ou New York, ont de tels écrans géants installés sur des immeubles.

*«L’objectif du digital out of home est de s’intégrer à l’écosystème publicitaire en ligne»*, explique Mario Siano, co-fondateur d’Advertima. Sa start-up propose [une technologie de vision par ordinateur](https://advertima.com/) qui permet d’estimer le nombre de personnes, leur âge, leur genre et la direction de leur regard à proximité des écrans publicitaires. Une solution qui permettrait selon l’entreprise d’afficher les bonnes publicités au bon moment. Par exemple, des publicités pour de la mousse à raser si les clients alentour sont des hommes.

Les principes du *digital out of home* sont toutefois différents de la publicité en ligne. Les publicités dynamiques affichées sur des écrans dans des magasins s’adressent à plusieurs personnes en même temps (*one-to-many*), alors que les annonces en ligne sont personnalisées (*one-to-one*). Leur efficacité n’est donc pas comparable. Néanmoins, le *digital out of home* permet d’optimiser et d’évaluer les performances des annonces.

Advertima assure que les entreprises qui se dotent de sa technologie peuvent en tirer des revenus supplémentaires ainsi que de précieuses informations sur le parcours de leur clientèle dans leurs locaux – sous la forme de données agrégées, donc sans identification possible des individus. Les capteurs de l’entreprise équipent 700 écrans en Suisse, selon Mario Siano.

Si la solution d’Avertima n’est pas présente sur tous les appareils qui diffusent des publicités dynamiques, ceux-ci sont malgré tout de plus en plus[ équipés de capteurs d’audience](https://basta.media/Les-cameras-publicitaires-un-pur). Obtenir des indicateurs de performance toujours plus précis est un impératif dans le domaine du marketing numérique.

Dans la grande bataille pour occuper l’esprit des consommateurs,[ les annonceurs ne ménagent pas leurs efforts](https://services.apgsga.ch/fr/offre/innovate/). L’entreprise APG/SGA, leader en Suisse sur le marché de la publicité extérieure, a par exemple lancé en 2018 une offre de publicité ciblée basée sur la géolocalisation, intitulée Aymo. Concrètement, les entreprises clients peuvent délimiter des zones pour y envoyer des annonces sur les smartphones des passants. Dans les 300 mètres autour d’un point de vente, par exemple.

La géolocalisation est obtenue grâce à des applications partenaires – principalement des médias comme *20 Minutes*, *Blick*, *La Tribune de Genève*, etc. APG/SGA affirme traiter chaque jour 3,8 millions de points de données de localisation. Il faut donc que l’utilisateur ait accepté que l’une de ces applications puisse accéder à sa géolocalisation et qu’il l’ouvre dans la zone définie par l’annonceur pour que la publicité lui soit proposée.

### Un Léviathan hors de contrôle?

Malgré la régulation, nos comportements n’ont jamais autant été mesurés et analysés. Le marketing numérique redouble d’ingéniosité pour continuer de recueillir les précieuses informations qui lui permettent de mieux nous cibler.

En parallèle, de nouvelles technologies voient le jour, avec l’objectif de capter toujours plus de données, y compris lors de nos activités hors ligne. *«Les casques de réalité virtuelle et mixte développés par des entreprises comme Meta et Apple permettront de récolter encore plus d’informations, qui auront une grande valeur pour les annonceurs»*, estime Pierre Berendes.

Les efforts du régulateur n’ont donc pas permis de venir à bout de l’opacité qui entoure la collecte et l’exploitation des données personnelles. *«Nous n’avons pas connaissance de toutes les méthodes employées par les géants du numérique pour capter nos données»*, observe Walter Rudametkin, professeur associé à Polytech’Lille. Selon lui, il est très probable que certaines techniques de ciblage n’aient encore jamais été documentées.

Quant à l’industrie de la publicité et du marketing numérique, elle continue de prospérer. [Selon Statista](https://www.statista.com/outlook/amo/advertising/switzerland#ad-spending), les annonces en ligne devraient capter 74% des dépenses publicitaires en Suisse d’ici à 2027, contre 63% en 2022. Le *business model* de la donnée a donc encore de beaux jours devant lui.

https://www.heidi.news/articles/tous-cibles-en-suisse-et-ailleurs-le-marketing-web-etend-le-domaine-de-la-lutte

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A la faveur de la guerre, le retour en grâce de Staline en Russie

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/61ad8f93-a84a-4975-aa12-3f528fc29d14/medium" /><p>Vous le pensiez mort et enterré, avec les 15 à 20 millions de victimes du régime soviétique? Pourtant, le «petit père des peuples» n&#39;a jamais été autant à la mode en Russie. Non content d&#39;être une icône pour vétérans et babouchkas, il fait fureur auprès des jeunes en mal d&#39;orgueil national.</p><p><em>«La chute de l&#39;URSS a été la plus grande catastrophe géopolitique du siècle.»</em></p><p>Vladimir Poutine, adresse à la nation en 2005</p><a href="/articles/a-la-faveur-de-la-guerre-le-retour-en-grace-de-staline-en-russie">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/a-la-faveur-de-la-guerre-le-retour-en-grace-de-staline-en-russie

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Comment Israël fait «fleurir le désert» du Néguev avec sa technologie

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/81fd9753-c490-48b7-85c8-f60b1fe57512/medium" /><p>Pour le dernier épisode de cette Exploration, notre journaliste s&#39;est rendue dans le désert du Néguev. Ce reportage, réalisé début 2023, a un objectif: comprendre comment Israël parvient à cultiver des fruits et des légumes sur des terres aussi arides. Un savoir précieux, à l&#39;aube des désertifications mondiales.</p><p>Le terrain pierreux étend sa couleur ocre à perte de vue. Le Néguev, au sud d’Israël, s’offre dans toute son aridité. Et soudain, entre deux collines, surgissent un vignoble, des palmiers, des buissons fleuris. Une véritable oasis dans le désert. <em>«Personne ne croyait que ça pouvait marcher»</em>, lance Eyal Izrael, peau tannée par le soleil et voix profonde. <a href="https://www.rts.ch/info/monde/13559708-en-israel-le-desert-du-neguev-nouvelle-silicon-valley-de-lecologie.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">Il y a 25 ans, sa femme Hannah et lui se sont lancés</a> dans la production de vin au cœur de l’une des régions agricoles les plus hostiles au monde.</p><p>A l’époque, la ferme Carmey Avdat se résumait à un terrain aride, à l’image du désert alentour. Tout était à construire, dans ce milieu où il pleut quatre jours par an et où le mercure dépasse 30°C la moitié de l’année. L’homme poursuit:</p><a href="/articles/comment-israel-fait-fleurir-le-desert-du-neguev-avec-sa-technologie">Voir plus</a>

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Swisscom, que fais-tu de nos données? «Mh mh mh, la la la»

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/558173fb-b6f7-4412-91eb-ac667b39fda8/medium" /><p>Swisscom est omniprésent en Suisse, des particuliers aux entreprises et jusqu&#39;à l&#39;armée suisse. Prise entre l&#39;injonction à l&#39;innovation et l&#39;obligation de protéger les données personnelles de ses clients, l&#39;ancienne régie publique n&#39;a pas toujours brillé pour sa transparence. Elle cherche aujourd&#39;hui à redorer son blason... quitte à avoir la mémoire un peu courte.</p><p>A l’idée d’écrire sur Swisscom et son usage des données personnelles, j’ai d’abord été prise de vertige, tant le géant bleu est partout en Suisse. Sa présence s’étend bien au-delà des télécoms et de la box TV: infrastructures réseaux, services informatiques, programmation audiovisuelle, fonds d’investissement soutenant toutes sortes de start-up. Difficile de compter toutes les têtes de l’hydre. Swisscom s’est diversifiée à travers toutes sortes de prises de participation, comme les grands groupes savent le faire.</p><p>Je prends donc attache avec le service presse. Au téléphone, le ton est perplexe: <em>«Vous souhaitez obtenir une interview à quel sujet, au juste?</em>, s’étonne mon interlocutrice. <em>Notre utilisation des données, c’est une question très large…»</em> Moi aussi, au fond, je m’interroge. Je joue franc-jeu et invoque la tension – qui dans le numérique confine parfois à la fracture – entre impératifs réglementaires de protection des données personnelles et injonctions à l’innovation. Et puis, <em>«c’est une bonne occasion pour montrer ce que vous faites de positif»</em> Les portes finiront par s’ouvrir… à moitié.</p><a href="/articles/swisscom-que-fais-tu-de-nos-donnees-mh-mh-mh-la-la-la">Voir plus</a>

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L’armée suisse passe chez Microsoft, et une fois de plus, le pays se rend vulnérable

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/d7e07e84-af70-456b-a245-a51ab62ea6dd/medium" /><p>OPINION. L&#39;armée suisse passe chez Microsoft pour son organisation hors service. Un choix emblématique de la légèreté de la Confédération en matière de souveraineté numérique, brocarde notre journaliste Grégoire Barbey, spécialiste en nouvelles technologies.</p><p>L’information passera sans doute inaperçue dans le tumulte de l’actualité, mais elle montre l’urgence de débattre de la politique numérique de la Suisse. L’armée helvétique a<a href="https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques.msg-id-98466.html" rel="nofollow noopener" target="_blank"> annoncé ce lundi 6 novembre 2023</a> sa décision de recourir à Microsoft 365 pour «la planification des cours de répétition et les tâches réalisées hors du service». </p><p>Loin d’être anodin, ce choix traduit une absence de vision autour des enjeux de la numérisation et, plus largement, en matière de souveraineté.</p>«Toutes les personnes concernées ont la possibilité de planifier leurs prestations au moyen de leurs appareils privés et de communiquer avec les militaires de leur unité par voie électronique», peut-on lire dans le communiqué. Et l’armée de se réjouir: «L’envoi fastidieux de documents n’est plus nécessaire, et les dossiers d’ordres sont établis en commun, à distance et en toute sécurité».

A première vue, il s’agit simplement d’un processus de numérisation classique. Mais le choix du prestataire interpelle. L’armée le sait, et tente de rassurer en précisant que les données «seront stockées dans un cloud en Suisse», comme si l’enjeu se limitait au lieu de conservation des données. Le débat est pourtant beaucoup plus crucial.

### **Qui décide en dernier recours?**

A ce sujet, l’ancien conseiller national socialiste Jean Christophe Schwaab vient justement de publier *[Pour une souveraineté numérique](https://www.savoirsuisse.org/produit/229/9782889155613/pour-une-souverainete-numerique)*[ (éd. EPFL Press)](https://www.savoirsuisse.org/produit/229/9782889155613/pour-une-souverainete-numerique). Celui qui officie désormais en qualité de membre de l’exécutif de la commune vaudoise de Bourg-en-Lavaux résume dans son livre les enjeux de la souveraineté numérique pour un Etat à deux notions: choisir «qui décide» et «qui décide qui décide».

Pour l’élu, la Confédération peut tout à fait déléguer certaines tâches au privé, mais cette délégation ne doit pas l’empêcher de décider par la suite. Or, regrette-t-il, les entreprises américaines ne s’embarrassent en général pas de la législation helvétique et obéissent de surcroît aux injonctions extraterritoriales des Etats-Unis avec leur «US Cloud Act», une loi qui leur permet d’accéder aux données d’entreprises qui ont des activités sur leur territoire, même lorsqu’elles sont hébergées à l’étranger.

Jean Christophe Schwaab voit donc dans le recours à des solutions américaines les ferments d’une perte de souveraineté, parce que la Confédération se place à la merci des décisions d’une entreprise sur laquelle elle n’a en réalité aucun contrôle. Si demain, Microsoft effectue des modifications de son logiciel qui ne plaisent plus à l’armée, alors celle-ci n’aura pas de solution de repli, parce qu’elle sera bloquée dans un environnement propriétaire. Il en va de même en cas de changement de lieu d’hébergement des données.

### **Une Confédération sourde aux critiques**

Même le préposé fédéral à la protection des données, qui n’est pas réputé pour son ingérence dans le débat politique, a tenté de mettre en garde la Confédération contre l’usage de Microsoft 365. Mais celle-ci n’a pas écouté.

Le recours à cette suite du géant américain par l’armée suisse n’est qu’une étape. Toute l’administration fédérale utilisera la solution de Microsoft d’ici à fin 2025. Une décision qui n’a fait l’objet d’aucune contestation politique, même de la part de l’UDC, qui a fait de la souveraineté l’un de ses thèmes de prédilection.

Le débat est pourtant plus urgent que jamais. Plus le temps passe, et plus des pans entiers de nos processus administratifs et politiques sont confiés à des tiers, hors de notre champ de souveraineté, et dont le pouvoir ne fait que grandir d’année en année. La Suisse ferait bien de se réveiller avant qu’il ne soit trop tard.

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En Suisse, les barrages sont mieux contrôlés que les virus

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/e7c5faa7-4ace-4093-9927-523861e67754/medium" /><p>OPINION. La Suisse possède deux laboratoires P4 fédéraux, à Mittelhäusern et Spiez, destinés à manipuler des pathogènes ultra dangereux. Mais le contrôle de leur sécurité n&#39;est pas à la hauteur de l&#39;enjeu, pointe notre chroniqueur Michel Huissoud, ex-directeur du Contrôle fédéral des finances.</p><p>Nous avons un problème avec les laboratoires biologiques de très haute sécurité. La Suisse en exploite deux, dans le canton de Berne: un civil, l&#39;Institut de virologie et d&#39;immunologie (IVI), et un militaire, le laboratoire ABC de Spiez. Juste avant les vacances d’été, la très sérieuse Commission de gestion du Conseil national <a href="https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20233965" rel="nofollow noopener" target="_blank">estimait</a> qu’il était urgent d&#39;uniformiser et de renforcer l&#39;activité de contrôle des cantons sur ces installations, tout en intensifiant la surveillance de la Confédération.</p><p>Plus d’une quarantaine de ces laboratoires P4 (le plus haut niveau de sécurité biologique) ont été identifiés dans une vingtaine de pays, dont le fameux laboratoire de Wuhan. Ils mènent des recherches dangereuses, sur des virus létaux contre lesquels n&#39;existe pas de traitement efficace. Certains chercheurs vont plus loin et tentent des «<a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Gain-of-function_research" rel="nofollow noopener" target="_blank">gains de de fonction</a>». Ils ont ainsi réussi à rendre des pathogènes plus transmissibles, plus virulents, plus immunogènes. De nombreux scientifiques ont donné l’alerte sur les risques liés à ces manipulations de laboratoire.</p>Et en Suisse? Rien ne bouge et nous avons la situation classique… Notre chère vieille Constitution fédérale parle de la sécurité des barrages, mais pas des pathogènes. La Confédération surveille donc la sécurité des barrages, mais les virus sont l’affaire des cantons. De celui de Berne, en l’occurrence. Aucune loi ne définit les règles minimales de sécurité à respecter. L’IVI et le Département fédéral de l’intérieur l’écrivent tranquillement: la responsabilité principale en matière de sécurité des laboratoires biologiques de haute sécurité incombe aux institutions concernées.

Le canton de Berne semble bien se fendre de quelques inspections, mais à un rythme pas vraiment convaincant. Le dernier rapport disponible date de 2008, il a donc 15 ans…

Toute cette affaire a été mise au jour par un [audit](https://www.efk.admin.ch/images/stories/efk_dokumente/publikationen/_bildung_und_soziales/gesundheit/20417/20417BE-Endgueltige-Fassung-V04.pdf) du Contrôle fédéral des finances. Une petite précision oubliée par la Commission de gestion du Conseil national. Mais il y a un problème plus intéressant. Cette commission recevra probablement dans quatre mois la réponse classique du Conseil fédéral: «Il faut modifier la Constitution si vous souhaitez mieux contrôler les virus et les laboratoires de haute sécurité».

Modifier la Constitution fédérale? Et pourquoi pas?\
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**<section class=box>Un mot sur notre chroniqueur**

Juriste de formation, expert en audit, «shérif» pour les médias, Michel Huissoud a été chargé de la surveillance de l’administration fédérale durant plus de trente ans. Il milite aujourd’hui pour [une révision totale de la Constitution fédérale](https://www.demokratie.ch/blog/update-schweiz), et signe des chroniques pour le magazine alémanique *Beobachter* et *Heidi.news*.**</section>**

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Un an avant la présidentielle américaine, les élections se jouent déjà à Gaza

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/deb52622-ef0b-4dd0-a7a0-34849977d05e/medium" /><p>En voyage au Moyen-Orient, le secrétaire d’Etat américain Anthony Blinken continue de s’opposer à un cessez-le-feu à Gaza, privilégiant une pause humanitaire. Tandis qu&#39;Outre-Atlantique, l’administration Biden fait face à une fronde interne et externe sur la question palestinienne.</p><p>L’ombre des élections américaines de 2024 planait, ce samedi 4 novembre à Washington, sur la manifestation en faveur d’un cessez-le-feu immédiat à Gaza. «Nous ne voterons pas pour le Parti démocrate», a confié Jasmine Iman, une New-Yorkaise de 25 ans, <a href="https://information.tv5monde.com/international/des-milliers-de-manifestants-washington-pour-demander-un-cessez-le-feu-gaza-2674332" rel="nofollow noopener" target="_blank">à un journaliste de l’AFP</a>. Pour elle, hors de question de soutenir le président Joe Biden candidat à sa réélection. «Nous allons nous assurer que tous les gens que nous connaissons ne votent pas pour le Parti démocrate», poursuit-elle.</p><p>Comme elle, des milliers de personnes s’étaient rendues dans la capitale américaine pour manifester leur colère contre le soutien américain aux opérations israéliennes. Accusant le président démocrate de contribuer à «un génocide». Après les attaques du  7 octobre en Israël, qui ont fait plus de 1&#39;500 victimes dont une majorité de civils, Joe Biden a promis un appui inconditionnel à l’allié israélien. Au risque d’être accusé de ne pas suffisamment tenir compte des civils palestiniens, victimes de la riposte de Tsahal, l’armée israélienne. Samedi, <a href="https://www.france24.com/fr/moyen-orient/20231104-%F0%9F%94%B4-en-direct-l-onu-condamne-la-frappe-isra%C3%A9lienne-contre-une-ambulance-%C3%A0-gaza" rel="nofollow noopener" target="_blank">le gouvernement du Hamas</a> parlait de 9&#39;500 personnes tuées par les frappes israéliennes, dont près de 4&#39;000 enfants, des chiffres probablement amplifiés, mais révélateurs de la détresse humanitaire dans la bande de Gaza.</p><a href="/articles/un-an-avant-la-presidentielle-americaine-les-elections-se-jouent-deja-a-gaza">Voir plus</a>

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En Russie, la mobilisation c’est surtout pour les pauvres

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/a03e3e50-3a95-4f61-b30c-6e240d2af060/medium" /><p>L’«opération militaire spéciale» lancée par Poutine en Ukraine a fait 120’000 à 300’000 morts chez les Russes. Mais le front, c’est surtout pour les pauvres. Comme Pavel, chauffeur de taxi de Nijni-Novgorod, mort dans le Donbass quelques semaines après s’être engagé. Sa mère et sa compagne se disputent l’indemnité posthume.</p><p><em>«Aucun mot unique ne peut rendre toutes les nuances de toska. Dans son sens le plus profond et douloureux, c’est une sensation d’immense angoisse spirituelle, souvent sans cause précise. Dans des emplois moins morbides, c’est une légère souffrance de l’âme, un désir sans objet, une langueur, une vague agitation, des affres, une envie inassouvie. Dans des cas particuliers, ce peut être le désir de quelqu’un ou quelque chose, une nostalgie, un chagrin d’amour non partagé. Au plus bas, il peut qualifier une forme d’ennui ou de vague à l&#39;âme.»</em></p><p>Vladimir Nabokov, <em>Leçons</em></p><a href="/articles/en-russie-la-mobilisation-c-est-surtout-pour-les-pauvres">Voir plus</a>

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Guerre Israël-Hamas: les enfants d'abord

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/030405c5-c02f-49a5-a978-f69abbabcb50/medium" /><p>Plus de 3500 enfants auraient été tués par la riposte israélienne dans la bande de Gaza, depuis l’attaque du Hamas du 7 octobre. Tel-Aviv cherche à décapiter le management de l’organisation tapi dans les sous-sols de Gaza Nord, quitte à provoquer la mort de milliers de civils et susciter l’ire d’une partie de la communauté internationale. <em>«Entre douze et quinze»</em> hauts responsables du Hamas auraient été tués dans les opérations militaires israéliennes, <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2023/11/02/frapper-le-hamas-parmi-la-population-civile-l-impossible-strategie-de-l-armee-israelienne-a-gaza_6197857_3210.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">rapporte </a><em><a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2023/11/02/frapper-le-hamas-parmi-la-population-civile-l-impossible-strategie-de-l-armee-israelienne-a-gaza_6197857_3210.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">Le Monde</a></em> qui cite une source israélienne, ainsi que plusieurs dizaines à centaines de combattants affiliés au mouvement — qui en compterait 30’000, chiffre invérifiable. Pendant ce temps, le ministère de la Santé gazaoui, piloté par le Hamas, dénombre près de 9000 morts, civils et militaires confondus.</p>

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Comment les Gardiens de la révolution iraniens ont financé le foot européen grâce à leurs passeports des Caraïbes

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/06d31b28-fe80-49e0-8cc9-7cd03d53444c/medium" /><p>Des escrocs et hommes d’affaires iraniens connectés aux pasdarans, les Gardiens de la révolution islamique en Iran, se sont procurés des passeports auprès de la Dominique. Grâce à ces documents, ils ont pu voyager et contourner les sanctions occidentales, vendre du pétrole ou encore verser de l’argent à la Liga, le prestigieux championnat de foot espagnol. Pourquoi se gêner quand on est un pirate des Caraïbes?</p><p>En Iran, les voies de la richesse sont à l’ombre du pouvoir. Ali Reza Monfared est de ceux qui ont déjoué tous les pronostics. Quand il naît dans les années 1970, dans une famille modeste d’un quartier du sud de Téhéran, rien ne le prédestinait à devenir l’un des hommes d’affaires les plus prospères du pays. Cheveux en brosse rigidifiés par le gel, nez proéminent et costumes à quatre épingles, Ali Monfared est l’archétype de la <em>jet set</em> iranienne qui s’est enrichie par la grâce de mentors politiques pour ensuite mener grand train à l’étranger. Une vie de voyages et d’excès qui n’aurait pas été possible sans la nationalité dominiquaise dont il a fait l’acquisition en 2014.</p><p>Alors que la double nationalité n’est pas reconnue en Iran, nos partenaires de l’OCCRP et du média iranien indépendant <em><a href="https://en.radiozamaneh.com/35246/" rel="nofollow noopener" target="_blank">Zamaneh Media</a></em><a href="https://en.radiozamaneh.com/35246/" rel="nofollow noopener" target="_blank"> </a>ont identifié et confirmé la présence de plus de 1400 Irano-dominiquais parmi les 7700 dossiers auxquels nous avons eu accès. Il est difficile d’établir, dans cette masse de ressortissants de la République islamique, lesquels sont membres, ou proches, des Gardiens de la révolution, les fameux pasdarans. En revanche, des éléments compilés et recoupés ces deux dernières années permettent d&#39;établir que nombre de ces 1400 personnes ont contribué à des activités contrôlées par l’appareil sécuritaire iranien.</p><a href="/articles/comment-les-gardiens-de-la-revolution-iraniens-ont-finance-le-foot-europeen-grace-a-leurs-passeports-des-caraibes">Voir plus</a>

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Protection des données: «Les sanctions ne font pas assez peur», estime l'avocat Sylvain Métille

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/825d186d-c8bd-414b-8865-db5c75cf3425/medium" /><p>Dans le cadre de nos articles sur la nouvelle Loi fédérale sur la protection des données entrée en vigueur le 1er septembre 2023. Le législateur a-t-il été assez ambitieux en la matière? L&#39;avis de Sylvain Métille, avocat et spécialiste de la protection des données et de la sphère privée, ainsi que du droit de l&#39;informatique et des technologies.</p><h5><strong>Heidi.news — Les consommateurs sont-ils bien protégés par les lois aujourd’hui en Suisse?</strong></h5>
<p><strong>Sylvain Métille —</strong> Je pense que la nouvelle loi sur la protection des données offre une protection théoriquement suffisante. Le problème est plutôt son application. Il n’y a, aujourd’hui en Suisse, pas suffisamment d’application de la loi par l’autorité de surveillance. On peut alors se retrouver dans de nombreuses situations où c’est la personne dont la personnalité est atteinte qui doit se défendre seule. Et même si elle veut le faire, c’est souvent David contre Goliath.</p><a href="/articles/protection-des-donnees-les-sanctions-ne-font-pas-assez-peur-estime-l-avocat-sylvain-metille">Voir plus</a>

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Protection des données: le préposé fédéral aura-t-il les moyens d'accomplir sa mission?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/f110d2ea-bf69-48aa-b6fe-70680e151ba6/medium" /><p>Une nouvelle loi sur la protection des données personnelles est entrée en vigueur depuis le 1er septembre 2023. Elle renforce les pouvoirs du gendarme des données personnelles, le préposé fédéral Adrien Lobsiger. A quel point cela va-t-il changer la donne? Nous lui avons demandé.</p><p>Tous les regards sont tournés vers lui avec l’entrée en vigueur au 1er septembre 2023 de la nouvelle loi fédérale sur la protection des données (nLPD). Depuis 2016, Adrian Lobsiger dirige l’autorité de surveillance chargée de veiller au respect des règles en matière de collecte et d’exploitation de nos informations intimes. Une gageure, pour une institution qui souffre d’un manque chronique de moyens. </p><p>Mais les choses pourraient changer, car le préposé se voit doté de nouveaux pouvoirs par la nLPD. Comment le préposé fédéral, dont la réélection <a href="https://www.parlament.ch/press-releases/Pages/mm-gk-2023-05-24.aspx" rel="nofollow noopener" target="_blank">a été proposée par le Parlement pour la période 2024-2027</a>, compte-t-il en faire usage? Nous l’avons rencontré en juin dans ses bureaux bernois du quartier des ambassades, qu’il partage avec la Chancellerie fédérale.</p><a href="/articles/protection-des-donnees-le-prepose-federal-aura-t-il-les-moyens-d-accomplir-sa-mission">Voir plus</a>

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Que vaut la nouvelle loi suisse en matière de protection des données personnelles?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/725e2734-6f09-440e-893a-d69e88a3acf3/medium" /><p>En Suisse, la loi sur la protection des données encadre les pratiques des entreprises et des institutions. Une nouvelle mouture plus protective a vu le jour, qui s&#39;applique depuis le 1er septembre 2023. Au point de se rapprocher du standard européen? Voyons cela!</p><p>Qu’est-ce qui empêche des entreprises comme <a href="https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/amasser-des-donnees-par-tous-les-moyens-c-est-ca-migros" rel="nofollow noopener" target="_blank">Migros</a>, <a href="https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/coop-pour-moi-et-pour-toi-et-surtout-pour-google" rel="nofollow noopener" target="_blank">Coop</a>, Swisscom, ou CFF, de disposer de nos données intimes selon leur bon vouloir? En Suisse, c’est la loi sur la protection des données qui définit le cadre. Elle vient d’être revue de fond en comble, pour tenir compte de phénomènes de fond comme l’essor des réseaux sociaux, du cloud ou encore l’internet des objets.</p><p>En vigueur depuis le 1er septembre 2023, cette nouvelle loi sur la protection des données (LPD) s’inspire en partie de la référence internationale en la matière: le très protecteur Règlement général sur la protection des données (RGPD) de l’Union européenne, instauré en 2018. Mais les différences qui subsistent entre les deux approches en disent long sur l’exception helvète.</p><a href="/articles/que-vaut-la-nouvelle-loi-suisse-en-matiere-de-protection-des-donnees-personnelles">Voir plus</a>

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Israël face à sa «seconde guerre d’indépendance» s'apprête à mener une intervention contestée à Gaza

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/1c91637f-3b8e-43ae-bd0e-ab5505d71805/medium" /><p>Tandis qu&#39;une intervention terrestre israélienne se précise dans la bande de Gaza, cette intensification des opérations fait craindre une crise humanitaire majeure et entraîne la désapprobation d&#39;une majorité de nations.</p><p>Trois semaines après les attaques du Hamas en Israël qui ont fait plus de 1’500 victimes, dont une large majorité de civils, Benyamin Netanyahou s’est adressé samedi à la presse dans un discours aux accents churchilliens.</p><p>Israël livre sa «<a href="https://www.courrierinternational.com/article/conflit-pour-netanyahou-israel-livre-sa-seconde-guerre-d-independance" rel="nofollow noopener" target="_blank">seconde guerre d’indépendance</a>», a déclaré le Premier ministre israélien, encadré de son ministre de la défense Yoav Gallant et de Benny Gantz, général et membre du cabinet de guerre formé après le 7 octobre. Faisant régulièrement appel à une «unité nationale» face à un adversaire qui pose un «défi existentiel» à l’Etat juif, il a prévenu que «la bataille dans la bande de Gaza sera longue et difficile».</p><a href="/articles/israel-face-a-sa-seconde-guerre-d-independance-s-apprete-a-mener-une-intervention-contestee-a-gaza">Voir plus</a>

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Ce qui fait la guerre, au-delà du fracas des bombes

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/2b5bb9a1-6b72-4d07-9f6d-56383e4ddc43/medium" /><p>Comme vous sans doute, j’ai en tête les images de Gaza sous les bombes. Et comme vous je lis les nouvelles qui tombent d’heure en heure, égrenant les destructions et les postures diplomatiques avant la grande invasion terrestre que tout le monde dit imminente. Mais quitte à parler guerre, j’aimerais cette fois évoquer la Russie, l’un des grands vainqueurs de l’embrasement au Proche-Orient.<br/><br/>La communauté internationale est un cyclope, qui n’a plus d’œil que pour Israël et Gaza. Pour son malheur, Kiev se retrouve dans l’angle mort. L’aide militaire et financière américaine s’avère <a href="https://theconversation.com/funding-for-ukraine-is-anything-but-certain-after-us-elects-new-speaker-216154" rel="nofollow noopener" target="_blank">plus fragile que jamais</a>, face aux coups de collier de la droite trumpiste. Partout, l’émoi pro-ukrainien s’estompe. L’Europe promet un soutien sans faille – mais <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2023/10/27/les-europeens-tirailles-entre-les-fronts-ukrainien-et-israelien_6196678_3210.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">le souffle n’y est plus.</a><br/><br/>Quant à la contre-attaque promise par Kiev, elle <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2023/10/26/guerre-en-ukraine-pourquoi-la-contre-offensive-de-kiev-est-en-echec_6196499_3210.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">échoue toujours</a> à pénétrer les impressionnantes lignes de défense russes: les espoirs de percée avant l’hiver et la <em>raspoutitsa</em> sont proches du néant.<br/><br/>Dans ce contexte, nous venons de publier <a href="https://www.heidi.news/explorations/volga-blues-au-coeur-de-la-russie-profonde" rel="nofollow noopener" target="_blank">une Exploration</a> sur laquelle j’aimerais attirer votre attention. Avec le photographe Alessandro Cosmelli, le journaliste italien Marzio Mian, qui sillonne depuis trente ans les pays slaves, a voyagé l’été dernier le long de la Volga. Près d’un mois de périple, sur 6000 kilomètres, pour tâter le pouls de la Russie au bout d’un an et demi de guerre.<br/><br/>Un an et demi d’échecs militaires, de sanctions économiques, de pressions internationales, et de cercueils en zinc – entre <a href="https://www.lemonde.fr/en/international/article/2023/08/24/behind-the-secrecy-of-military-losses-in-ukraine-carnage-on-a-massive-scale_6107230_4.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">120’000</a> et <a href="https://www.minusrus.com/en" rel="nofollow noopener" target="_blank">300’000</a> soldats russes tombés au front. On est en droit de se demander si la société russe suit son cours ou déborde de son lit.</p>
<h3><strong>Un long fleuve intranquille</strong></h3>
Que nous relate Marzio Mian de cette Russie profonde, irriguée par la «petite mère» des fleuves? Laissons ses interlocuteurs dresser le tableau.

* Un oligarque communiste au revanchisme incandescent: **«S’il le faut, nous utiliserons des armes nucléaires, nous détruirons la Terre, nous détruirons tout, putain.»**

* Une directrice de supermarché désabusée, en route vers sa *datcha* d’enfance. **«Les Russes sont tristes et résignés depuis mille ans.»**

* Un néo-hippie en larmes, qui fuit la réalité de son pays dans une île secrète sur la Volga. **«Ma mère m’a toujours dit que les garçons ne devaient pas pleurer.»**

* Un pope orthodoxe exalté, aux confins de l’Oural. **«La guerre est la dernière chance de sauver l’âme humaine.»**

Saviez-vous qu’à la faveur des sanctions, les boulangeries traditionnelles font fureur, de même que la viande et le fromage russes? Que la nostalgie soviétique n’a jamais fait autant recette? Que Staline redevient une icône chez les jeunes? Que le quotidien, vu de l’arrière, n’est pas franchement bouleversé par la guerre? Que les travaux publics vont bon train?

D’une plume vivide, Marzio Mian nous décrit en somme un pays nostalgique, qui s’accommode bien de la guerre et achève de se refermer sur lui-même.

### **Aux sources de la guerre**

«Depuis décembre 2022, la société russe est entrée dans une phase de «normalisation» de la guerre», abonde la géopolitologue russe Vera Grantseva, qui vient de publier [un ouvrage](https://theconversation.com/le-soutien-de-facade-des-russes-a-la-guerre-en-ukraine-216314) sur le soutien à la guerre. Surtout motivée par la peur et la lassitude, soutient-elle, ainsi que le poids immense de l’histoire et celui, plus récent, de la propagande belliqueuse.

En tout état de cause, cette façon d’appréhender les conflits, par le temps long et la plume, à l’arrière des lignes, aide à saisir ce qui se joue. A voir que l’esprit de citadelle assiégée, la stigmatisation de l’étranger, le revanchisme et la nostalgie d’un temps fantasmé alimentent, prolongent et nourrissent la guerre.\
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Il est possible que la portée de cette leçon dépasse la Russie.

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Sur une île secrète au fin fond de la Russie, les larmes d'un hippie anti-guerre

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/78d2ff63-671b-4825-b5d2-35f168a2582d/medium" /><p>Pour comprendre la Russie en temps de guerre, notre journaliste se rend à Kazan, où il reçoit un cours de gastronomie nationaliste à la sauce tatare. En quête d’un contre discours, il finit par suivre une chamane jusqu’à une île secrète de hippies sur la Volga.</p><p>Je poursuis les méandres de l’âme russe le long de la Volga, alors que la guerre en Ukraine fait rage. Un jour, à Kazan, je suis invité à déjeuner par Farid Nafigullovitch, 48 ans, <em>«businessman»</em>. Ceux qui m’ont donné son contact le présentent comme <em>«un Tatar très influent dans la ville»</em>. Et de fait, sur Telegram, Farid me promet des rencontres intrigantes.</p><p>Lorsque je le retrouve à Tatarskaya Usadba, un restaurant renommé de la ville, il m&#39;attend dans une salle privatisée en compagnie de Mansur Hazvrat, mollah de la mosquée Al-Marjani. Sa mosquée est la seule à être restée active pendant l’ère soviétique, avant le renouveau religieux qui a vu en fleurir une centaine à Kazan.</p><a href="/articles/sur-une-ile-secrete-au-fin-fond-de-la-russie-les-larmes-d-un-hippie-anti-guerre">Voir plus</a>

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Les protéines, ce n’est pas que du muscle [VIDEO]

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/152b0bb5-9e3b-442e-b5f1-c8fae4e7bda9/medium" /><p>Chocolat aux protéines, poudre de protéines aromatisée à la vanille, yoghourt protéiné, protéines véganes… Les étalages regorgent de produits alimentaires enrichis en protéines. Mais de quoi parle-t-on vraiment? C&#39;est le sujet de ce nouvel épisode de PopScience, réalisé avec l&#39;Institut suisse de bioinformatique.</p><p>Les protéines, ce sont des petites machines moléculaires microscopiques. Elles sont présentes dans tous les organismes: des virus aux bactéries, en passant par les vaches, les champignons, les salades et nous. Dans notre corps, elles ne sont pas que dans nos muscles et ne vont pas forcément nous transformer en <em>bodybuilder</em>!</p><p>En fait, elles sont partout: elles sont indispensables à la vie et sont capables de faire des choses parfois surprenantes. Ce sont elles qui permettent à une luciole d’émettre de la lumière. Elles aussi qui permettent à vos yeux de détecter la lumière, ou à vos neurones de s&#39;activer pendant cette vidéo.</p>Pour faire simple, les protéines, c’est un peu comme des assemblages de petits blocs de Lego: selon les protéines, entre 2 et 35’000 blocs *(350 en moyenne)* sont assemblés linéairement les uns après les autres selon un ordre défini par l’information génétique. Ces blocs sont appelés des acides aminés. Dans le monde des protéines, contrairement aux Lego, il existe seulement 20 blocs différents, 20 acides aminés différents (alanine, glutamine, proline…).

**Revenons à nos protéines alimentaires.** Quand vous mangez un steak de bœuf, vous allez manger beaucoup, beaucoup de protéines différentes:

* la fameuse ATP synthase, qui produit de l’énergie;

* une protéine appelée hémoglobine, qui transporte l’oxygène dans le sang;

* et surtout beaucoup de protéines myosine et actine, des protéines qui jouent un rôle fondamental dans la contraction des muscles et qui étaient très utiles à la vache pour galoper dans les prés.

### Vous prendrez bien un peu de rubisco

Des protéines, il y en a dans tous les aliments: les pâtes, le riz, et aussi les légumes comme la salade. Quand vous mangez une feuille de salade, vous ingérez beaucoup de protéines différentes, toujours la fameuse ATP synthase, mais en particulier de la protéine rubisco, celle qui capte le CO2 pour la photosynthèse. D’ailleurs, la rubisco est la protéine la plus abondante sur notre planète.

Et quant aux poudres de protéines, les fameuses protéines whey utilisées par les adeptes de la musculation, elles contiennent souvent un mélange de protéines, dont:

* des protéines lactalbumine ou immunoglobulines extraites du petit lait

* de la vitellogénine, une protéine présente en grande quantité dans le blanc d’œuf ou les glycines, des protéines abondantes dans les graines de soja.

Bon, avec 100 grammes de feuilles de salade, vous avalez une moins grande quantité de protéines qu’avec 100 grammes de steak, ou 100 grammes de protéines whey, car il y a beaucoup d’eau dans les feuilles de salade.

### Place à la digestion

Quand vous mangez des protéines, comme la protéine myosine présente dans votre steak ou la protéine rubisco de votre salade, elles vont être digérées dans votre estomac et votre intestin grêle: les acides aminés qui les composent, rappelez-vous les petits blocs de Lego, vont être libérés.

Ces acides aminés seront ensuite réutilisés par notre corps pour fabriquer d’autres protéines selon nos besoins: des protéines kératine pour nos cheveux, du collagène pour notre peau, des immunoglobulines pour se battre contre les virus ou le cancer.

Notre organisme n’est capable de fabriquer que 11 acides aminés sur les 20 existants. Pour les neuf autres, on a besoin de les obtenir grâce aux aliments. C’est pour cela qu’il est important de manger équilibré avec des protéines d’origines différentes, pour toujours avoir un stock suffisant des 20 acides aminés nécessaires à la construction, acide aminé après acide aminé, de toutes les protéines dont on a besoin.

Dans notre corps, on estime qu’il y a plus d’un million de protéines différentes qui assurent ensemble des milliers de fonctions. Et plusieurs centaines ou milliers de copies de la même protéine sont parfois nécessaires. Un seul globule rouge contiendrait 250 millions de protéines hémoglobine.

Une alimentation saine apporte suffisamment de protéines et donc d’acides aminés à notre organisme: pas besoin d’en rajouter.

#### **Pour aller plus loin:**

* C’est quoi une protéine? La réponse sur [precisionmed.ch](https://www.precisionmed.ch/cest-quoi-une-proteine/)

* Découvrez les protéines en bande dessinée grâce à [Protein Spotlight comics](https://www.proteinspotlight.org/comics/)

* La vie, l’amour, la mort et les protéines — [une (autre) bande dessinée](https://www.antipodes.ch/produit/la-vie-lamour-la-mort-les-proteines/)

* [Les activités grand public du SIB](https://www.sib.swiss/about/activities-for-the-public)

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Les mystérieux frères de la foodtech israélienne, dont l'influence s'étend jusqu'en Suisse

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/490dac81-3aff-4f0c-a3c4-34b05109ffd6/medium" /><p>Comment Israël est-il devenu l&#39;un des leaders mondiaux de l’innovation alimentaire? Dans l’ombre, les frères Berger ont œuvré à faire de la foodtech, encore inexistante il y a dix ans, un secteur de pointe du pays. Portrait des deux magnats discrets, mais dont l’influence s’étend jusqu’en Suisse. </p><p>En Israël, quand on parle foodtech – l’innovation dans les assiettes –, un patronyme revient sans cesse sur la table: Berger. Les deux frères Berger seraient les grands manitous de la foodtech à l’ouest du Jourdain. Dans chaque siège d’entreprise, leur réputation les précède.</p>
<blockquote>
<p><em>«Ce sont les frères de la foodtech. Ils sont les premiers à avoir parlé de foodtech dans le pays»</em>, nous confie un CEO de start-up.</p></blockquote>
<a href="/articles/les-mysterieux-freres-de-la-foodtech-israelienne-dont-l-influence-s-etend-jusqu-en-suisse">Voir plus</a>

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Là où vont nos données personnelles: au cœur de datacenters ultrasécurisés à Genève

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/6bf746f2-5f49-453e-872b-c23e7ef9f3ce/medium" /><p>REPORTAGE. Ce sont les coffres-forts du 21e siècle, où reposent et transitent nos données personnelles. Les <em>datacenters</em>, ces immenses fermes de stockage numérique, sont des infrastructures sensibles, à la localisation secrète et à l&#39;accès sécurisé. <em>Heidi.news</em> a pu visiter deux d&#39;entre eux, enfouis dans les profondeurs de Genève.
<br/><br/><em>Cette Exploration ayant été financée par crowdfunding, c&#39;est-à-dire par vous, chers lecteurs, les épisodes sont disponibles en accès libre.</em></p><p>Nous laissons des traces de notre vie partout, y compris en-dehors de nos activités connectées – en faisant nos courses <a href="https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/coop-pour-moi-et-pour-toi-et-surtout-pour-google" rel="nofollow noopener" target="_blank">à la Coop</a> ou <a href="https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/amasser-des-donnees-par-tous-les-moyens-c-est-ca-migros" rel="nofollow noopener" target="_blank">à la Migros</a>, par exemple. Mais comment circulent ces données une fois collectées, et surtout où vont-elles? Avec l’essor de l’informatique en nuage (<em>cloud</em>), on est parfois tenté de croire que le monde numérique est immatériel. Rien n’est moins vrai.</p><p>Nos réseaux de télécommunications, internet en premier lieu, sont composés d’infrastructures tout ce qu’il y a de plus palpable. Ce sont des câbles souterrains et sous-marins, des antennes, des satellites et des ordinateurs qui relient les individus entre eux à travers le monde entier. Les réseaux n’ont rien de magique. Pourtant, tout est fait pour que cette couche physique échappe à notre regard.</p>Pour saisir les enjeux de la collecte et l’exploitation des données personnelles dans leur globalité, il faut se pencher sur les infrastructures qui permettent à cette économie de prospérer. C’est dans cette optique que je me suis rendu dans deux centres de données basés à Genève, accompagné du photographe Niels Ackermann.

Objectif: rendre compte de ce qui se passe dans ces bâtiments qui, si l’on devait comparer internet au réseau sanguin du corps humain, en seraient le cœur palpitant.

### **Dans le sous-sol d’un centre commercial**

Le premier centre de données que nous visitons appartient à Equinix, multinationale américaine qui en possède plus de 250 dans le monde. Rendez-vous est pris dans un centre commercial de l’hypercentre de Genève. Des milliers de badauds y flânent chaque jour, sans savoir que sous leurs pieds grondent des machines qui permettent à des milliards d’informations de circuler de la Suisse vers le monde entier.

Plus de 90% du trafic internet et IP suisse passe par des *datacenters* d’Equinix. Le bâtiment genevois accueille également les télécommunications de France voisine. C’est au détour d’une conversation avec un spécialiste de l’hébergement local que j’ai appris l’existence de GV1, le nom de code donné par Equinix à son centre de données. Sans trop y croire, j’avais contacté l’entreprise pour un reportage.

![NAK_7149.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/c1f13d6d-592f-4bbe-a270-26ab6f3a3f4c/large "Le sas de sécurité est situé à l'entrée du centre de données d'Equinix. A droite derrière le mur se trouve le bureau où un vigile surveille les allées et venues. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

La réponse fut étonnament rapide — et rendez-vous est pris le jeudi 13 juillet 2023 à 9h30. A première vue, impossible de deviner qu’un centre de données se cache dans les sous-sols du centre commercial. Les bureaux de l’entreprise ne sont mentionnés nulle part et, contrairement aux devantures des magasins, la porte pour y accéder se fond dans le décor.

C’est Stéphane Buchs, responsable qualité, sécurité et opérations commerciales d’Equinix, qui se charge de la visite. Une fois la première porte franchie, nous arrivons devant un sas de sécurité. A droite, une borne où scanner un QR code reçu la veille. En face, le bureau d’un vigile. On nous demande de fournir notre carte d’identité, et de laisser notre empreinte digitale. Un badge est émis pour notre visite. Une fois à l’intérieur, il faudra à nouveau scanner notre index en même temps que le badge. La porte vitrée s’ouvre enfin.

![NAK_6904.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/32539b0c-3c81-40a2-9edd-29b5135011e4/large "Au plafond, un vaste réseau de chemins de câble et autres tuyaux s'étend de part et d'autres de la pièce. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

*«Ici, personne n’entre sans y avoir été invité,* glisse Stéphane Buchs. *Je ne dirais pas que nous avons enquêté sur vous, mais nous nous sommes renseigné un minimum.»* Le décor est posé. A l’intérieur, tout est flambant neuf. *«Nous avons profité de la réfection du centre commercial pour refaire l’ensemble de notre infrastructure*, explique-t-il. *Les machines ont continué à fonctionner durant toute la durée des travaux, de 2019 à 2022.»*

### **Un hub pour opérateurs internet**

Equinix occupe les lieux depuis 1999, et son centre de données est opérationnel depuis le 1er janvier 2000. C’est l’un des premiers de Suisse. La présence d’une telle infrastructure au sein d’un centre commercial est inhabituelle. Si l’entreprise a choisi ce lieu, c’est d’abord parce que l’occasion s’est présentée. Jusqu’en 1997, les locaux étaient loués par la Bourse suisse, qui s’est ensuite relocalisée à Zurich.

A la fin des années 1990, le canton de Genève se profilait déjà comme le carrefour des télécommunications de Suisse romande. Auparavant, les opérateurs concluaient des accords commerciaux entre eux pour accorder l’accès à leur réseau. Mais l’évolution d’internet pousse le secteur à adopter le principe du *peering*, où chaque opérateur est interconnecté aux autres. *«Aujourd’hui, le meilleur client d’un opérateur, c’est un autre opérateur»*, s’amuse Stéphane Buchs.

![NAK_6909.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/3dc3797e-24af-4ff2-bd96-dc92f721bc48/large "Le centre de données d'Equinix a des airs de station spatiale. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Grâce au *peering*, les communications peuvent circuler de manière fluide d’un point A à un point B dans le monde entier. D’où le rôle stratégique d’un «hub» comme GV1, qui permet aux différents opérateurs de se relier entre eux. Ici, les clients louent un espace pour y sécuriser leur infrastructure informatique, qu’ils gèrent eux-mêmes. Equinix s’occupe du reste: locaux, alimentation électrique, refroidissement, connectivité, sécurité.

La visite commence enfin lorsque nous prenons un ascenseur pour descendre au niveau de l’un des deux étages où sont entreposés les dizaines de milliers de serveurs qui tournent continuellement. Les portes s’ouvrent sur un immense hall où dominent le blanc, le noir et le jaune. Tout est parfaitement bien aligné.

![NAK_6953.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/9342936d-a2b6-4531-ae0d-ecb033e8892f/large "Les racks (les armoires noires où sont installées les machines) sont bien sécurisés. Mais les clients qui le souhaitent peuvent installer des dispositifs supplémentaires. Certains vont jusqu'à mettre des systèmes de reconnaissance de l'iris. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Les armoires – qu’on appelle des racks – où sont installées les machines, sont forgées d’un métal noir qui tranche avec les murs et le sol d’un blanc éclatant. Mais le contraste le plus saisissant vient de ces longues lignes jaunes qui traversent le plafond. Il s’agit des chemins de câbles en tôle où sont entreposés les milliers de fils qui permettent de faire circuler les précieuses données de nos communications numériques.

**<section class=box>Un univers visuel fort**

<br/>*«Ces lieux sont des “non-lieux” d’un point de vue visuel,* observe le photographe Niels Ackermann. *Des serveurs n’ont même pas besoin de lumière. Une cave, de l’électricité, une ventilation et c’est parti.* *Mais le volume des installations crée un premier besoin: l’organisation. Des câbles bien rangés, bien identifiés, c’est moins de risques d’erreurs et de problèmes techniques.*

<br/>*De ce besoin pragmatique d’organisation naît une certaine esthétique: des gaines colorées parcourent le centre reliant les machines comme des vaisseaux sanguins reliant des organes. Ces univers où tout est aligné, bien rangé, et où la couleur est superficielle, à part quand elle aide à l’organisation, prennent vite des allures de stations spatiales. La rationalité à l’œuvre donne à ces environnements, qui devraient être des trous noirs, une esthétique finalement très séduisante.»***</section>**

### **La résilience avant tout**

Au-delà de l’esthétique, il y a la technique. Chaque rack est relié à deux alimentations électriques indépendantes l’une de l’autre. L’électricité provient de sources renouvelables certifiées, et les sites genevois sont approvisionnés par les Services industriels de Genève (SIG). En cas de panne, des batteries prennent le relais, le temps de faire tourner les génératrices – ce qui prend une vingtaine de secondes. En théorie, les génératrices pourraient fournir quatre jours d’électricité à l’ensemble du *datacenter*, grâce à leurs réserves de fuel. *«Nous avons des contrats de livraison sous 24 heures avec deux fournisseurs»*, précise Stéphane Buchs.

Rien n’est laissé au hasard. Tous ces équipements stratégiques sont inspectés deux fois par jour. Les génératrices sont testées toutes les deux semaines, et sont préchauffées en permanence pour être prêtes au démarrage en cas d’urgence. Des simulations de panne totale ont lieu tous les trimestres pour vérifier l’autonomie du site. *«En 23 ans, notre exploitation n’a connu aucune microcoupure»*, assure le responsable d’Equinix.

![NAK_7164.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/eaafae93-4d34-41e6-a175-91b29c439f38/large "Voici l'une des génératrices préchauffées en permanence. Dans le local où elle se trouve se dégage une forte odeur de fuel. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Des milliers de machines qui fonctionnent en continu à pleine puissance, cela génère beaucoup de chaleur. Le *datacenter* est équipé d’un système de ventilation et d’un circuit interne de refroidissement alimenté par de l’eau prélevée dans le Léman – puis réinjectée dans le lac à 47 mètres de profondeur.

L’entreprise maintient une température constante de 23 degrés sur les deux étages où sont installés les serveurs. *«C’est ce qui permet aux machines de fonctionner dans les meilleures conditions»*, détaille Stéphane Buchs. Une partie de la chaleur permet de produire l’eau chaude de l’ensemble du centre commercial, des bureaux ainsi que les 24 logements qui se situent dans le bâtiment.

![NAK_7117.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/637d37f5-af1c-4085-8b04-3646542013dd/large "Des câbles, il y en a partout dans un centre de données. Et pourtant, ce n'est pas ce qui frappe le plus quand on découvre celui d'Equinix à Genève. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

En observant ce lieu dont j’ignorais tout, je prends conscience qu’un centre de données est un véritable écosystème, avec des règles et des équilibres qui lui sont propres. Celui d’Equinix ne fait pas exception.

### **Un datacenter en rase campagne**

Autre lieu, autre ambiance. Le troisième centre de données construit par Infomaniak, dont le nom de code est DIII, est situé dans un bâtiment en campagne genevoise. L’entreprise, qui se veut une alternative éthique aux géants américains, ne souhaite pas divulguer sa localisation, pour des raisons de sécurité. Les photos, prises par le chargé de communication avec son smartphone, seront d’ailleurs expurgées de leurs métadonnées de géolocalisation avant de nous être fournies.

![NAK_0190(1).jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/0a615da9-898f-4c8b-b3de-b92ae37d25ad/large "Le fondateur d'Infomaniak, Boris Siegenthaler (à gauche), a décoré les locaux de l'entreprise à sa manière. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Niels Ackermann et moi-même avons pu visiter les lieux le 2 août 2023, accompagnés de Boris Siegenthaler, fondateur et directeur stratégique d’Infomaniak, et de Thomas Jacobsen, chargé de communication. Nous les avons d’abord retrouvés dans leurs bureaux de la zone industrielle des Acacias, où nous avons pu faire le tour du propriétaire.

### **Vers des centres plus verts**

Après cette première visite, direction l’objectif du jour, avec la Tesla d’Infomaniak. L’entreprise créée en 1994 a des ambitions écologiques élevées. Elle achèvera prochainement la construction d’un quatrième *datacenter* à Plan-les-Ouates, dans le souterrain d’un écoquartier, qui servira en prime de chauffage public. Quelque 6000 ménages en bénéficieront.

Comme l’explique le fondateur de l’entreprise, un centre de données peut être conçu comme *«une machine à transformer l’énergie électrique en énergie thermique»*. En général, cette chaleur est évacuée puis relâchée dans l’atmosphère, occasionnant un bilan énergétique désastreux.

![IMG_0018.JPG](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/32ca5047-e805-4855-8956-bb499047fa94/large "Le nouveau datacenter est situé sous ce quartier d'habitation écologique à la Jonction. / Photo Infomaniak")

Ce ne sera pas le cas à Plan-les-Ouates, où l’énergie produite par le *datacenter* doit être valorisée. Des pompes à chaleur permettront de maintenir la température ambiante autour des serveurs à 28 °C, tout en alimentant le réseau de chauffage des habitations alentour avec de l’eau entre 67 et 82 °C. *«Une innovation mondiale»*, s’enthousiasme Boris Siegenthaler. Mais pas gratuite: l’installation initiale a coûté 6 millions de francs d’investissement.

Nous n’avons pas pu visiter ce datacenter, encore en travaux, qui représente selon Infomaniak l’avenir du secteur.

### Au cœur du DIII

Le DIII, opérationnel depuis 2013, était déjà ambitieux dans ses objectifs environnementaux, et n’a cessé d’évoluer pour les renforcer, même si Infomaniak le considère désormais comme obsolète au plan écologique.

*«Malgré tous nos efforts pour maximiser l’efficacité énergétique de cette infrastructure, l’intégralité de la chaleur qu’elle produit est gaspillée dans l’atmosphère»*, se désole Thomas Jacobsen. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas continuer d’améliorer l’existant. Des panneaux photovoltaïques conçus en Suisse et produits en Allemagne par Meyer Burger seront prochainement installés autour du bâtiment.

#### Lire aussi: [Les datacenters, ces chaudières géantes](https://www.heidi.news/explorations/green-it-ou-les-paris-suisses-de-l-informatique-durable/les-datacenters-ces-chaudieres-geantes)

Pour pénétrer dans l’immeuble, qui semble comme perdu au milieu de nulle part, Boris Siegenthaler doit scanner son visage. Chaque porte au sein du *datacenter* nécessite une authentification biométrique. *«Dans les lieux les plus sensibles, l’empreinte digitale est aussi requise»*, ajoute le fondateur d’Infomaniak.

![NAK_0323.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/e62c9d5d-3205-4f38-92ca-22e536fc1264/large "Chaque porte du centre de données d'Infomaniak est protégée par des systèmes de reconnaissance biométrique. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Nous arrivons au troisième étage. Les milliers de serveurs qui tournent ici servent à héberger des données ou à fournir de la puissance de calcul pour les applications cloud proposées par Infomaniak. *«Toutes les informations qui sont stockées ici le sont à deux autres endroits»*, détaille Boris Siegenthaler. L’entreprise propose aussi un service de colocation, qui permet à des acteurs externes d’installer leurs machines dans le bâtiment.

![NAK_0269.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/f7d8c6e7-dde7-414d-b14e-8e97ba19ec22/large "Ces deux onduleurs permettent de transformer du courant continu en courant alternatif pour alimenter les machines du centre de données. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Les services cloud sont devenus la norme. En l’occurrence, Infomaniak alloue les capacités de ses serveurs à ses clients en fonction de leurs besoins, que ce soit en stockage ou en puissance de calcul. Tout est automatisé, et la facture prend en compte la consommation effective. Il s’agit d’un service d’infrastructure à la demande, l’une des principales offres de l’entreprise, aux côtés de sa suite de logiciels (kSuite) développée en interne.

### **Une ruche bouillonnante**

Premier constat, une fois arrivé dans la salle des serveurs: il fait chaud. *«Nous maintenons une température minimale de 28 degrés»,* explique Thomas Jacobsen. Soit cinq degrés de plus que ce que pratique l’industrie. Et avec l’été, ce seuil augmente. *«Nos machines fonctionnent parfaitement dans de telles conditions, réduire la température reviendrait à perdre de l’énergie»*, affirme le chargé de communication. Les appareils peuvent supporter des températures de 35 degrés sans perte d’efficacité.

![NAK_0301.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/5e7eef16-72c5-4ebf-b7d5-4f55fdcb3800/large "Une salle qui permet d'accéder aux câblage des serveurs. De ce côté-ci, la chaleur est plus élevée. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Autre élément marquant: le bruit. La ventilation tourne à plein régime en cette période estivale. Alors que Boris Siegenthaler me propose un casque antibruits, Niels Ackermann prend la mesure de l’environnement sonore à l’aide de sa montre connectée: 94 décibels.

![NAK_0278.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/ebe2f3bf-b7b9-49bc-881d-37801b2843ac/large "La salle pour accéder aux serveurs de face. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Dans ce bâtiment, il fait sombre. L’éclairage est limité au strict nécessaire, tout comme les autres fonctionnalités énergivores. Seule la salle où sont alimentées les batteries de secours est climatisée, afin de ne pas affecter leur durée de vie. Ce lieu fait aussi l’objet d’une attention particulière. *«C’est la seule salle dans ce bâtiment où il y a du combustible*, explique Boris Siegenthaler. *Nous veillons donc à réduire au maximum les risques d’incendie.»*

![NAK_0428.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/7e73bc3a-0912-462a-9b17-7a2539f54679/large "Une pièce où sont entreposés les composants permettant d'assembler, de modifier ou de réparer les serveurs. Un matériel souvent très onéreux. / Photo Niels Ackermann / Lundi 13 pour Heidi.news")

Des serveurs, il y en a plein les racks. Ici, l’espace est utilisé dans son intégralité. Boris Siegenthaler nous montre une salle où sont entreposées les pièces détachées: disques SSD et NVMe pour le stockage, processeurs pour la puissance de calcul… les machines sont assemblées, modifiées et réparées ici. Certains composants peuvent coûter très cher, notamment les processeurs graphiques (GPU) utilisés pour les tâches qui requièrent des algorithmes d’intelligence artificielle, particulièrement gourmands en ressources.

### **Des autorités peu concernées**

L’évolution des usages (streaming vidéo et musique, gaming, vidéoconférences…) va de pair avec une croissance exponentielle de la quantité de données générées. Alors les centres de données se multiplient comme les petits pains proverbiaux: on en compte [déjà plusieurs milliers](https://www.datacentermap.com/datacenters/) de *datacenters* dans le monde, et leur nombre ne fait qu’augmenter. [D’après des chiffres de 2021](https://www.usinenouvelle.com/article/les-geants-d-internet-ont-double-leur-nombre-de-datacenters-en-cinq-ans.N1140207), les géants du numérique en ouvrent en moyenne 16 nouveaux chaque trimestre, et [des milliards de dollars sont investis](https://datacenter-magazine.fr/investissements-records-sur-le-marche-europeen-des-datacenters/) chaque année dans la construction de ces infrastructures.

Contactés, ni le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et des communications (DETEC) ni l’Office fédéral de la statistique n’étaient en mesure de fournir d’évaluer le nombre de centres de données présents en Suisse. Alors qu’il s’agit d’une activité devenue aussi critique que stratégique pour le fonctionnement d’un pays moderne. En 2022, le fournisseur de centres de données genevois SafeHost a été [racheté par un fonds d’investissement américain](https://www.heidi.news/cyber/derriere-le-rachat-du-genevois-safehost-l-ombre-des-geants-du-numerique) lié aux géants du numérique. L’information est passée presque inaperçue.

Un manque d’intérêt qui a de quoi surprendre. L’Etat ne semble pas s’intéresser de près aux lieux où sont hébergées les données personnelles de ses citoyens. Et nous verrons que les entreprises qui les récoltent ne partagent pas volontiers ces informations.

https://www.heidi.news/articles/la-ou-vont-nos-donnees-personnelles-au-coeur-de-datacenters-ultrasecurises-a-geneve

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Une mère qui a eu recours à la GPA: «Aux yeux de la Suisse, ma relation avec mon propre fils n'existe pas»

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/57a477ca-828c-43a8-9fe4-512a32a0cb8f/medium" /><p>La gestation pour autrui ne se termine pas avec la naissance de l&#39;enfant. Les parents doivent se battre pour être reconnus comme ses gardiens légaux. Les mères porteuses voient, elles, l&#39;argent leur filer entre les doigts.</p><p>Albert ne semble pas dans son assiette. Le nouveau-né âgé de deux semaines a chaud et il s&#39;agite. Sa mère <strong>Adriana</strong>, une Irlandaise d’origine roumaine, prend sa température: 39,1 degrés. Dans sa tête, les pensées se bousculent: <em>«Je ne suis pas sa mère aux yeux de la loi. Je ne peux pas l&#39;emmener à l&#39;hôpital. Mais je ne peux pas laisser mon bébé tout seul»</em>. <a href="https://www.heidi.news/explorations/des-meres-porteuses-face-a-la-guerre/ukraine-ce-pays-ou-les-femmes-portent-les-enfants-des-autres" rel="nofollow noopener" target="_blank">Comme sa grande sœur Alice</a>, Albert est né d&#39;une mère porteuse ukrainienne. C’est Katya qui lui a donné naissance à Varsovie, après avoir fui son pays au début de la guerre.</p>
<h4><strong>Lire aussi: <a href="https://www.heidi.news/explorations/des-meres-porteuses-face-a-la-guerre/en-ukraine-pose-ton-bebe-ton-pays-est-en-guerre" rel="nofollow noopener" target="_blank">En Ukraine: «Pose ton bébé, ton pays est en guerre!»</a></strong></h4>
<a href="/articles/une-mere-qui-a-eu-recours-a-la-gpa-aux-yeux-de-la-suisse-ma-relation-avec-mon-propre-fils-n-existe-pas">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/une-mere-qui-a-eu-recours-a-la-gpa-aux-yeux-de-la-suisse-ma-relation-avec-mon-propre-fils-n-existe-pas

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Israël et Palestine, la paix est-elle encore un horizon?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/c1879e38-c425-41fb-9ada-a5d613313b5a/medium" /><p>PLACEHOLDER</p>

https://www.heidi.news/articles/israel-et-palestine-la-paix-est-elle-encore-un-horizon

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«La propagande israélienne a gagné la guerre dans les médias»

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/4aca9e1c-41b9-47f9-8d9f-18353019b5b0/medium" /><p>OPINION. Riccardo Bocco est professeur émérite au Département d&#39;anthropologie et de sociologie de l&#39;IHEID à Genève, et spécialiste de la situation au Proche-Orient. Il nous livre ici son analyse des événements actuels en Israël et Palestine.</p><p><strong><section class=box>La mort d’une conférence pour la paix</strong><br/><br/><br/>Les reportages de <em>Heidi.news</em> de chaque côté du mur, <a href="https://www.heidi.news/explorations/palestine-terre-d-humiliation" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Palestine, terre d’humiliation»</a> et <a href="https://www.heidi.news/explorations/israel-terre-de-promesses" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Israël, terre de promesses»</a>, ont été publiés au printemps 2023. A la rentrée, nous les avons rassemblés <a href="https://shop.heidi.news/product/palestine-terre-d-humiliation-israel-terre-de-promesses" rel="nofollow noopener" target="_blank">dans une revue imprimée</a>, qui intégrait aussi une partie de l’enquête <a href="https://www.heidi.news/explorations/ouvrir-la-boite-noire-de-tsahal" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Ouvrir la boîte noire de Tsahal»</a> publiée l’an dernier. Pour terminer ce cycle sur le Proche-Orient, nous avons organisé une conférence qui devait se tenir le 18 octobre à la Maison de la Paix, en partenariat avec le Geneva Graduate Institute.</p><p><br/>Cela correspondait aussi aux 30 ans des Accords d’Oslo, en 1993, et aux 20 ans de l’Initiative de Genève, en 2003, deux développements historiques qui n’ont pas tenu leurs promesses.</p><br/>Ce débat devait faire le point de la situation sur le terrain, dégager des pistes pour une paix durable et passer en revue le rôle des acteurs extérieurs, notamment la Suisse. Mais l’attaque du Hamas le 7 octobre a bouleversé les esprits, les agendas et les possibilités de voyager, notamment pour les Palestiniens de Cisjordanie. Il était dès lors impossible de l’organiser: nous l’avons reporté au début 2024.

<br/>En attendant des jours meilleurs, nous avons posé les trois mêmes questions d’éclairage à trois des participants à la table ronde: **Yossi Beilin**, ancien ministre israélien, négociateur des Accords d’Oslo et de l’Initiative de Genève, l’avocate palestinienne **Hiba Husseini**, qui a conseillé les négociateurs palestiniens à plusieurs reprises, et **Riccardo Bocco**, professeur émérite à l’IHEID et spécialiste du Proche-Orient. La parole à ce dernier.**</section>**

### **Quel est pour vous le contexte des événements actuels?**

Les événements actuels doivent être replacés dans le contexte du conflit israélo-palestinien qui dure depuis 75 ans et dont la résolution semble encore lointaine. Aux récents crimes de guerre commis par le Hamas lors de son assaut contre les soldats et les civils israéliens répondent maintenant de nouveaux crimes de guerre commis par les forces israéliennes contre la population civile de Gaza. Si Israël a le droit de se défendre, la population palestinienne occupée a le droit de résister. Dans les deux cas, en respectant le droit international humanitaire.

L'attaque du 7 octobre rappelle aux citoyens juifs israéliens les heures les plus sombres de l'Holocauste, leurs craintes d'être sans protection et la fragilité de leur État. De leur côté, les Palestiniens craignent une nouvelle Nakba. Le cabinet de guerre israélien a enjoint à la population palestinienne de quitter la partie nord de la bande de Gaza, sans préciser si et quand les habitants pourront rentrer chez eux. Cela rappelle aux Palestiniens les différents épisodes de nettoyage ethnique et de transferts forcés de population qu'ils ont subis pendant et après les guerres de 1948, 1956, 1967 et 1973, ainsi que la première et la deuxième intifada — pour ne citer que les événements les plus connus.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la violence de l'assaut du Hamas intervient après des attaques répétées de l'armée israélienne et des raids des colons contre les villages et les villes palestiniens, sans parler des provocations au Dôme du Rocher et à la mosquée Al-Aqsa par les juifs orthodoxes israéliens, actes jugés intolérables par une majorité de la population musulmane locale et internationale.

Au cours des 30 dernières années, les régimes politiques en Israël et en Palestine ont ouvert la voie à l'arrivée de groupes religieux dont les visions messianiques sont actuellement incompatibles avec un projet de paix fondé sur une approche de coexistence mutuelle.

### **Quel chemin voyez-vous vers la paix?**

En 2023, alors que l’on célèbre le 30e anniversaire (de l'échec) des Accords d'Oslo, les Etats occidentaux sont encore incapables d'assumer leurs responsabilités pour n'avoir pas su (ou pas voulu) accompagner le processus de paix en rappelant aux «partenaires de la paix» leurs devoirs au regard du droit international, et pour ne pas les avoir sanctionnés lorsque la situation devenait explosive. Les Etats-Unis ont adopté une approche incrémentale, rendant chaque «partenaire de paix» responsable de ses propres actes, comme si l'asymétrie des forces entre Israéliens et Palestiniens ne devait pas être prise en compte.

Au lieu de se concentrer sur une politique de résolution des conflits, les États-Unis et l'Union européenne ont opté pour une gestion des conflits. C'est-à-dire qu'ils ont essayé de maintenir autant que possible le conflit à une faible intensité, en fournissant une aide humanitaire et une assistance économique aux populations palestiniennes censées accepter cette aide et les injustices auxquelles elles étaient confrontées. Au lieu de déclarer l'illégalité de l'occupation et de la colonisation, ils ont fermé les yeux. Y compris sur la corruption de l'Autorité palestinienne, véritable gérontocratie, et son maintien au pouvoir malgré l'absence d'élections parlementaires et présidentielles depuis le milieu des années 2000.

La seule issue pour la paix est la volonté politique de toutes les parties prenantes de trouver un processus de résolution du conflit, qui puisse s'en tenir autant que possible au droit international, tout en consentant en même temps à des compromis raisonnables et acceptables pour chaque partie. En fin de compte, la légitimité et la sécurité de l'État israélien et de ses citoyens juifs viendront des Palestiniens et non de la Torah ou d'un recours aveugle à la force.

N'oublions pas non plus que l'OLP était le «terroriste d'hier» pour Israël et qu'à l'avenir, des négociations avec le Hamas et ses partisans, mais aussi avec les colons orthodoxes et les suprémacistes nationalistes juifs, seront indispensables. A titre de comparaison, le processus de paix en Irlande du Nord n'a réellement débuté que lorsque l'IRA a été invitée à s'asseoir à la table des négociations.

La solution des deux États est désormais obsolète. En 1993, l'OLP a accepté de construire un État sur 22 % du territoire de la Palestine historique, mais un rapide coup d'œil à la carte redessinée par l'expansion des colonies israéliennes prouve que le projet est impossible.

De nouvelles perspectives ont récemment émergé grâce au travail des sociétés civiles israélienne et palestinienne. Elles ont fait émerger trois grandes options qui doivent être discutées en profondeur: un «État démocratique unique», un «État binational», ou un «État confédéral». Elles ne pourront être mises sur la table que lorsque les armes se tairont.

### **Qu'attendez-vous des acteurs extérieurs?**

Le plus effrayant actuellement, c'est l'attitude de la communauté internationale, en particulier des Etats-Unis et de la plupart des Etats européens. Ils semblent jeter de l'huile sur le feu en affichant une position unilatérale de soutien à Israël, en oubliant l'occupation illégale des Territoires palestiniens depuis 1967, la poursuite de la colonisation et les nombreux crimes de guerre commis par l'Etat hébreu au fil du temps.

Plus récemment, les États-Unis et l'UE ont également choisi d’ignorer pas moins de cinq rapports rédigés depuis 2017 par l'ONU, Amnesty International, Human Rights Watch et deux ONG israéliennes et palestiniennes de défense des droits de l'homme, lesquels pointent l'existence d'un système d'apartheid mis en place par Israël à l'égard des Palestiniens. Accepter d'être sourd et aveugle n'aide pas à avancer sur le chemin de la paix…

Aux yeux des Palestiniens et des populations de nombreux pays arabes, les Etats-Unis, l'UE et la plupart des Etats occidentaux ont perdu leur crédibilité. Et la Suisse, trop occupée à essayer de faire émerger un consensus sur le classement du Hamas comme organisation terroriste, risque aussi de perdre son rôle de partenaire diplomatique et d'intermédiaire entre les parties en guerre.

Au cours des trois dernières décennies au moins, la *«hasbara»* israélienne (l’«explication », ou plutôt la propagande) a gagné la guerre dans les médias et une partie de l'opinion publique internationale. L'un des exemples les plus saisissants est l'adoption de la définition de l'antisémitisme de l'IHRA (International Holocaust Remembrance Association) par les États-Unis, l'UE, l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l'Italie, les Pays-Bas. Selon la définition de l'IHRA, toute attitude critique à l'égard du gouvernement israélien peut être assimilée à un acte d'antisémitisme!

Aujourd'hui, en donnant le feu vert à la démesure israélienne, l’Occident risque d'être complice d'un nouveau génocide. Comme l'a écrit Raz Segal il y a quelques jours, «La Convention des Nations unies sur le génocide énumère cinq actes qui entrent dans sa définition. Israël en commet actuellement trois à Gaza :

* Meurtre de membres du groupe,

* Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe,

* Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle.»

Le ghetto de Gaza a réussi à survivre pendant 16 ans. Espérons que l'UE et les autres décideurs internationaux se réveilleront à temps.

**<section class=box>**Cet article exprime le point de vue de son auteur, et non une prise de position de *Heidi.news*. La distinction entre les faits et les opinions est à la base du journalisme.**</section>**

https://www.heidi.news/articles/la-propagande-israelienne-a-gagne-la-guerre-dans-les-medias

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 Heidi.news

«La guerre conduira à la dévastation et ne garantira en rien la sécurité d'Israël»

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/1a334c16-a4ad-43cb-a00d-f5938a8b03bb/medium" /><p>OPINION. Hiba Husseini, à la tête du cabinet d&#39;avocats Husseini &amp; Husseini à Ramallah (Cisjordanie), a été conseillère juridique auprès des délégations palestiniennes lors des négociations avec Israël. Elle nous livre ici son analyse des événements actuels en Israël et Palestine.</p><p><strong><section class=box>La mort d’une conférence pour la paix</strong><br/><br/><br/>Les reportages de <em>Heidi.news</em> de chaque côté du mur, <a href="https://www.heidi.news/explorations/palestine-terre-d-humiliation" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Palestine, terre d’humiliation»</a> et <a href="https://www.heidi.news/explorations/israel-terre-de-promesses" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Israël, terre de promesses»</a>, ont été publiés au printemps 2023. A la rentrée, nous les avons rassemblés <a href="https://shop.heidi.news/product/palestine-terre-d-humiliation-israel-terre-de-promesses" rel="nofollow noopener" target="_blank">dans une revue imprimée</a>, qui intégrait aussi une partie de l’enquête <a href="https://www.heidi.news/explorations/ouvrir-la-boite-noire-de-tsahal" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Ouvrir la boîte noire de Tsahal»</a> publiée l’an dernier. Pour terminer ce cycle sur le Proche-Orient, nous avons organisé une conférence qui devait se tenir le 18 octobre à la Maison de la Paix, en partenariat avec le Geneva Graduate Institute.</p><p><br/>Cela correspondait aussi aux 30 ans des Accords d’Oslo, en 1993, et aux 20 ans de l’Initiative de Genève, en 2003, deux développements historiques qui n’ont pas tenu leurs promesses.</p><br/>Ce débat devait faire le point de la situation sur le terrain, dégager des pistes pour une paix durable et passer en revue le rôle des acteurs extérieurs, notamment la Suisse. Mais l’attaque du Hamas le 7 octobre a bouleversé les esprits, les agendas et les possibilités de voyager, notamment pour les Palestiniens de Cisjordanie. Il était dès lors impossible de l’organiser: nous l’avons reporté au début 2024.

<br/>En attendant des jours meilleurs, nous avons posé les trois mêmes questions d’éclairage à trois des participants à la table ronde: **Yossi Beilin**, ancien ministre israélien, négociateur des Accords d’Oslo et de l’Initiative de Genève, **Riccardo Bocco**, professeur émérite à l’IHEID et spécialiste du Proche-Orient, et l’avocate palestinienne **Hiba Husseini**, qui a conseillé les négociateurs palestiniens à plusieurs reprises. La parole à cette dernière.**</section>**

### **Quel est pour vous le contexte des événements actuels?**

Pour les Palestiniens, il s'agit de se libérer de l'occupation, d'exercer leur droit à l'autodétermination, de mettre fin à 75 ans de souffrance et de mettre un terme au conflit. Nous nous demandons toujours pourquoi Israël fait tout ce qui est en son pouvoir pour maintenir le conflit. Pourquoi les gouvernements israéliens successifs insistent-ils sur une politique de gestion du conflit alors que tout indique que la violence va éclater, encore et encore? Les Palestiniens ont averti, en privé et en public, que la poursuite de l'oppression et de la souffrance conduirait à une insécurité accrue.

Depuis l'assassinat du Premier ministre Itzhak Rabin en 1995, Israël a décidé que les Palestiniens n'étaient plus un partenaire pour un quelconque accord de paix. Au lieu de cela, il a cherché à rendre infranchissable la séparation entre la Cisjordanie et la bande de Gaza, à isoler Jérusalem-Est et à exercer une plus grande emprise sur les lieux saints, en particulier la mosquée Al-Aqsa. Israël a intensifié la construction de colonies autour de Jérusalem-Est et dans la zone C. Aujourd'hui, il y a plus de 750’000 colons en Cisjordanie, dont 250’000 à Jérusalem-Est.

La guerre conduira à la dévastation et ne garantira en rien la sécurité future d'Israël. La politique israélienne, soutenue par les États-Unis, a consisté à normaliser les relations avec les voisins arabes. Israël a même délimité avec le Liban une «frontière du gaz naturel», qui laisse les Palestiniens de côté. Cette politique a échoué. La question palestinienne est redevenue une priorité absolue et très urgente.

Israël pensait pouvoir ignorer les Palestiniens et maintenir des territoires divisés sous son contrôle. Il n'a pas su lire les signes et les avertissements. Ce faux sentiment de maîtrise totale de la situation l’a aveuglé. Certains observateurs ont parlé d'arrogance — peut-être est-ce le cas. L'Occident, lui, a tourné son attention vers d'autres priorités, comme l'invasion russe de l'Ukraine et les affaires intérieures. L’Occident a négligé la question palestinienne alors qu’il est, pour la plupart des Palestiniens, le principal responsable de l’accaparement de leurs terres par Israël.

### **Quel chemin voyez-vous vers la paix?**

Arrêter l'invasion terrestre! Pas de transfert de population de Gaza vers l'Égypte ou la Jordanie. L'ONU doit entrer dans Gaza et administrer l'aide humanitaire, notamment les médicaments, la nourriture, l'eau et le carburant. L'ONU doit rester sur le terrain à Gaza pendant au moins six mois afin qu’un cessez-le-feu soit instauré et respecté, et que la libération des otages et prisonniers de guerre soit assurée. Le Hamas ne doit pas être autorisé à reprendre le contrôle de l'administration de Gaza. L’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas n'a aucune légitimité en Cisjordanie, et encore moins dans la bande de Gaza. Elle ne pourra donc jouer aucun rôle. Une autorité internationale et arabe chapeautée par une agence palestinienne doit prendre le relais jusqu'à ce que les Palestiniens soient en mesure de s'autogouverner et de s’autoréguler. La communauté internationale doit être présente pour garantir qu'Israël ne gâche pas cette opportunité.

### **Qu'attendez-vous des acteurs extérieurs?**

L'ONU, à la tête d'une force multinationale, doit intervenir pour administrer, réhabiliter et reconstruire Gaza. Tout cela en attendant de passer de la gestion des conflits à leur résolution, une fois pour toutes, sur la base de l’égalité politique. L'Irlande, l'Afrique du Sud et d'autres conflits ont été résolus de manière équitable: le conflit israélo-palestinien peut l'être aussi. Cette guerre doit être un signal d'alarme pour l'Occident, qui devrait cesser de choyer Israël en raison de sa propre culpabilité!

Une invasion terrestre ne fera que prolonger le conflit et polariser le monde entre un camp des bons et un camp des méchants. Il s'agit là d'une mauvaise politique pour résoudre un conflit, quel qu'il soit. Des parties neutres comme la Norvège, la Finlande ou la Suisse, ainsi que l'Arabie saoudite et d'autres pays arabes qui ont normalisé leurs relations avec Israël, peuvent jouer un rôle essentiel pour rétablir le calme afin que la cause profonde du conflit soit traitée et résolue. La Cisjordanie et la bande de Gaza doivent être reliées et connectées. Un plan Marshall doit être rapidement mis en place.\
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**<section class=box>**Cet article exprime le point de vue de son auteur, et non une prise de position de *Heidi.news*. La distinction entre les faits et les opinions est à la base du journalisme.**</section>**

https://www.heidi.news/articles/la-guerre-conduira-a-la-devastation-et-ne-garantira-en-rien-la-securite-d-israel

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«Netanyahou a commis une erreur monumentale et finira par devoir quitter le pouvoir»

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/54f1447b-c3c4-4f2c-88df-68d04bb8f362/medium" /><p>OPINION. Ancien ministre israélien sous Ehud Barak et député à la Knesset pour le parti de gauche Meretz (qu&#39;il dirige), Yossi Beilin a été négociateur des Accords d’Oslo et de l’Initiative de Genève. Il nous livre ici son analyse des événements actuels en Israël et Palestine.</p><p><strong><section class=box>La mort d’une conférence pour la paix</strong><br/><br/><br/>Les reportages de <em>Heidi.news</em> de chaque côté du mur, <a href="https://www.heidi.news/explorations/palestine-terre-d-humiliation" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Palestine, terre d’humiliation»</a> et <a href="https://www.heidi.news/explorations/israel-terre-de-promesses" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Israël, terre de promesses»</a>, ont été publiés au printemps 2023. A la rentrée, nous les avons rassemblés <a href="https://shop.heidi.news/product/palestine-terre-d-humiliation-israel-terre-de-promesses" rel="nofollow noopener" target="_blank">dans une revue imprimée</a>, qui intégrait aussi une partie de l’enquête <a href="https://www.heidi.news/explorations/ouvrir-la-boite-noire-de-tsahal" rel="nofollow noopener" target="_blank">«Ouvrir la boîte noire de Tsahal»</a> publiée l’an dernier. Pour terminer ce cycle sur le Proche-Orient, nous avons organisé une conférence qui devait se tenir le 18 octobre à la Maison de la Paix, en partenariat avec le Geneva Graduate Institute.</p><p><br/>Cela correspondait aussi aux 30 ans des Accords d’Oslo, en 1993, et aux 20 ans de l’Initiative de Genève, en 2003, deux développements historiques qui n’ont pas tenu leurs promesses.</p><br/>Ce débat devait faire le point de la situation sur le terrain, dégager des pistes pour une paix durable et passer en revue le rôle des acteurs extérieurs, notamment la Suisse. Mais l’attaque du Hamas le 7 octobre a bouleversé les esprits, les agendas et les possibilités de voyager, notamment pour les Palestiniens de Cisjordanie. Il était dès lors impossible de l’organiser: nous l’avons reporté au début 2024.

<br/>En attendant des jours meilleurs, nous avons posé les trois mêmes questions d’éclairage à trois des participants à la table ronde: l’avocate palestinienne **Hiba Husseini**, qui a conseillé les négociateurs palestiniens à plusieurs reprises, **Riccardo Bocco**, professeur émérite à l’IHEID et spécialiste du Proche-Orient, et **Yossi Beilin**, ancien ministre israélien, négociateur des Accords d’Oslo et de l’Initiative de Genève. La parole à ce dernier.**</section>**

### **Quel est pour vous le contexte des événements actuels?**

Le monde arabe est divisé entre des forces pragmatiques et des mouvements islamistes extrêmes. Cette division caractérise les Palestiniens et s'exprime par la tension permanente entre le Fatah et le Hamas. Il y a quelques décennies, le Fatah était un mouvement d'étudiants palestiniens, créé au Caire par la deuxième génération de réfugiés palestiniens, dont l'objectif était de retourner en Palestine et d'effacer l'État juif, avec l'aide des pays arabes. Le Hamas était une branche des Frères Musulmans, confrérie créée au Caire en 1928.

Le Fatah était un parti politique, devenu le parti dominant de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), qui appelle à la création d'un Etat palestinien sur l'ensemble des territoires de l'ancien mandat britannique. Le Hamas était un mouvement religieux qui se concentrait sur l'aide sociale et l'éducation. Mais tous deux ont changé à la fin des années 1980. Le Hamas est devenu un parti politique qui appelle à l'anéantissement d'Israël et à l'établissement d'un État islamique théocratique. L'un de ses bras s'occupe de l'aide sociale, l'autre de la terreur contre Israël. Le Hamas est devenu l'ennemi juré du Fatah.

En novembre 1988, l'OLP, dirigée par le Fatah, s'est engagée à dénoncer le terrorisme et à accepter la résolution 242 de l’Assemblée générale des Nations unies, qui reconnaissait (indirectement) Israël. Lorsque les accords d'Oslo ont été signés par l'OLP et Israël, le Hamas s'y est opposé de toutes ses forces et a fait preuve d'une grande violence à l'égard des Israéliens. En 2006, le Hamas a participé aux élections du Conseil législatif palestinien, a obtenu la majorité et a formé un gouvernement d'unité de courte durée avec le Fatah. En juin 2007, après une confrontation cruelle et violente avec le Fatah à Gaza, le Hamas a pris le contrôle de la bande de Gaza et y a mis en place des institutions proto-étatiques. Tous les efforts déployés pour ramener sur le devant de la scène l'Autorité palestinienne dirigée par le Fatah ont échoué.

Le Hamas avait besoin d'une sorte d'Armageddon pour changer la donne, avec l’espoir de voir se rapprocher sa vision de l'État islamique. L'attaque de type «Daech» contre les habitants des *kibboutz* et *moshavs* israéliens dans le sud d'Israël le 7 octobre est aussi à comprendre comme une tentative pour le Hamas de gagner les faveurs des Palestiniens dans le cadre d’un conflit interne, en plus de vouloir affaiblir et ébranler Israël. L'opération terrestre prévue par Israël vise à remplacer la direction du Hamas par l'Autorité palestinienne ou une tierce partie. Quoi qu’il en soit, Israël ne devrait pas retourner dans la bande de Gaza.

### **Quel chemin voyez-vous vers la paix?**

L’histoire nous apprend que la paix suit la guerre. Pendant longtemps, les camps de la paix palestinien et israélien qui proposaient de nouvelles idées et des projets d'accords ont surtout été accueillis par du cynisme. On nous disait que notre conflit était insoluble, que des récits aussi divergents de part et d’autre ne nous permettraient pas de faire la paix. Que la droite en Israël était plus forte que jamais, que la partie palestinienne était divisée entre la Cisjordanie et Gaza, de sorte qu'il n'y avait pas d'interlocuteur palestinien unique pour Israël. Que les dirigeants du monde étaient des pompiers et que s'il n'y avait pas le feu au Moyen-Orient, aucun d'entre eux ne consacrerait de temps à pousser ce rocher de Sisyphe qu’est devenu le processus de paix entre les Palestiniens et les Israéliens.

Aujourd'hui, la situation est très différente. Si, à la suite de l'opération terrestre, les dirigeants du Hamas sont boutés hors de Gaza, Israël n’aura plus qu’un seul partenaire potentiel pour la paix: l'OLP, dirigée par le président Abbas. La division du camp palestinien aura cessé d’être, et elle ne servira plus de prétexte à la mise sur pause des négociations israélo-palestiniennes en vue d'une solution permanente.

En Israël, il est impossible de penser que la coalition d'extrême droite au pouvoir, dirigée par Bibi Netanyahu, l'emporte après la guerre actuelle. Avec ou sans commission d'enquête, l'histoire est connue: ce gouvernement a préféré traiter avec le Hamas plutôt qu'avec l'OLP, parce qu'il était opposé à la solution des deux États et que le Hamas du même avis. Le fait très clair que le Hamas est un Daech palestinien, révélé le 7 octobre 2023, a explosé au visage de Netanyahou et de son gouvernement. Il s'agissait d'une erreur stratégique fondamentale, loin devant les interrogations sempiternelles sur qui savait exactement quoi, ou si quelqu’un a négligé certains éléments d’information *(sur l’attaque en préparation, ndlr.)*.

Cette erreur monumentale découle d'une idéologie très dangereuse, et c'est pourquoi Netanyahou devra mettre fin à sa longue carrière politique, en démissionnant de lui-même ou sous pression de l'opinion publique. Un gouvernement israélien de centre-gauche, dirigé par un homme d'État qui croit en une solution à deux États, changera la donne.

### **Qu'attendez-vous des acteurs extérieurs?**

Au bout du compte, c'est une question de personnes, pas d'Etats. Il est urgent de trouver un dirigeant qui comprenne le risque d'une explosion au Proche-Orient, qui se soucie des deux parties, qui comprenne qu'elles sont toutes deux victimes, et qui soit prêt à investir du temps et de l'énergie dans un effort visant à réunir les dirigeants pragmatiques des deux parties pour les convaincre de faire le compromis de leur vie.

Le dirigeant d'une superpuissance qui décide d'intervenir dans la résolution d'un conflit devient instantanément un acteur — comme Jimmy Carter, indispensable au processus de paix israélo-égyptien —, car il peut allouer des ressources financières, amener avec lui une coalition d'autres pays, mettre en place des forces multinationales de maintien de la paix si nécessaire, etc.

Le dirigeant d'un petit pays est en général plus souple, dispose de plus de temps et peut mener une diplomatie de la navette, ce qui peut s'avérer essentiel pour réussir. Dans mes efforts pour la paix, j'ai été aidé par les dirigeants de petits pays (la Norvège pour l'accord d'Oslo, la Suède pour les accords Beilin-Abu Mazen), mais il est difficile d'établir des règles dans ce domaine. Mieux vaut attendre qu’un homme politique se préoccupe de la situation.

Il ne s'agit pas seulement d'aider les parties à négocier entre elles. Il s'agit d'organiser des conférences publiques et d'inviter Palestiniens et Israéliens à présenter leurs points de vue et à donner leurs idées. Il s'agit aussi de venir en visite officielle dans la région pour prouver aux deux peuples que le monde ne les a pas abandonnés et n'a pas renoncé à résoudre leur long conflit.

**<section class=box>**Cet article exprime le point de vue de son auteur, et non une prise de position de *Heidi.news*. La distinction entre les faits et les opinions est à la base du journalisme.**</section>**

https://www.heidi.news/articles/netanyahou-a-commis-une-erreur-monumentale-et-finira-par-devoir-quitter-le-pouvoir

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Filmé à son insu: un jeune Vaudois érafle une Tesla et se fait dénoncer par la voiture

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/f259eee9-cc90-46e7-b6fc-30c80d5d9c51/medium" /><p>Dans le canton de Vaud, un père dont le fils a éraflé par accident une Tesla en stationnement a eu la surprise d&#39;apprendre que la scène avait été filmée. La légalité de ce «mode sentinelle», susceptible de se généraliser sur d&#39;autres véhicules, pose question au regard du respect de la vie privée.</p><p>C’est une histoire a priori banale, mais qui en dit long. Elle s’est déroulée début octobre 2023 en banlieue de Lausanne. En fin d’après-midi, le petit Corentin <em>(prénom modifié)</em> sort du sport. En ouvrant la portière de la voiture de son père, il percure légèrement le véhicule stationné juste à côté. Georges <em>(prénom modifié)</em> vérifie rapidement que son fils n’a pas abîmé la carrosserie. Il ne constate rien.</p><p>L’affaire aurait dû en rester là, mais le véhicule impliqué dans l’incident est une Tesla. Ce véhicule high tech possède un «mode sentinelle»: huit caméras embarquées qui, dès qu’elles détectent le moindre mouvement, enregistrent la scène, même à l’arrêt. Jusqu’à une distance de 240 mètres, d’après le constructeur.</p><p>La semaine suivante, alors que Georges emmène comme d’habitude Corentin à sa séance de sport, la propriétaire du véhicule concerné l’interpelle. Elle lui envoie une vidéo sur WhatsApp, où l’on distingue clairement que Corentin touche la Tesla lorsqu’il ouvre la portière de la voiture de son père. C’est le mari de la propriétaire du véhicule, qui se trouve être le coach sportif de Corentin, qui l’a identifié sur les images, que <em>Heidi.news</em> a également pu consulter.</p><a href="/articles/filme-a-son-insu-un-jeune-vaudois-erafle-une-tesla-et-se-fait-denoncer-par-la-voiture">Voir plus</a>

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Hectar, l'école d'agriculture de Xavier Niel: phare de la modernité ou belle vitrine creuse?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/0649d8f9-e3d1-4664-b8f7-81f1f960da51/medium" /><p>Le campus français Hectar, fondé par l&#39;homme d&#39;affaires milliardaire Xavier Niel, se veut une sorte d&#39;«Ecole 42» pour paysans, moderne et innovante. Alors qu&#39;il vient de fêter ses deux ans, nous nous sommes rendus sur place, en région parisienne, pour évaluer le projet. Au-delà de sa communication triomphale.</p><p>Un imposant corps de ferme centenaire ravalé avec goût, au milieu de champs et de bois. Quelques touches futuristes à l’entrée, avec ces caméras de surveillance et un parking et des bornes de charge pour voiture électrique. Du rural paré de modernité, voici une image qui colle bien au paradigme d’Hectar.</p><p>L’école Hectar a ouvert ses portes en 2020 à Lévis-Saint-Nom, dans la vallée de Chevreuse, au sud de Paris. Fondée par le richissime homme d’affaires français Xavier Niel et Aurélie Bourolleau, ancienne conseillère agriculture d’Emmanuel Macron, elle est en quelque sorte la déclinaison des célèbres écoles 42 au monde de l’agriculture.</p><a href="/articles/hectar-l-ecole-d-agriculture-de-xavier-niel-phare-de-la-modernite-ou-belle-vitrine-creuse">Voir plus</a>

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Les élections fédérales dessinent une Suisse craintive, repliée sur ses acquis.

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/39122099-6495-45ea-8d32-6ad0ade6af41/medium" /><p>Les premières projections des élections fédérales 2023 montrent ce dimanche une poussée de la droite dure et un recul écologiste. </p><p>Est-ce la montée des tensions internationales, la guerre en Europe, les images de Lampedusa ? Le pays a renouvelé son parlement ce dimanche 22 octobre, avec des tendances lourdes, qui vont marquer la prochaine législature: l’UDC fait une progression importante, selon les premières projections, (+3,3 %) et assure sa position de premier parti du pays, et de loin.</p><p><strong>Pourquoi c’est important?</strong> La formation a fait campagne sur une Suisse qui conserve une stricte neutralité face aux conflits, notamment en Ukraine. Une nation qui se préserve aussi d’une immigration et d’une présence étrangère «qui menacent ses valeurs». On en voit les premiers échos ce dimanche avec un éditorial de la <a href="https://www.blick.ch/incoming/editorial-ueber-eingewanderte-hamas-unterstuetzer-das-wars-mit-der-willkommenskultur-id19064869.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">SonntagsBlick, qui appelle la Conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider à mettre fin à la “Willkommenskultur”</a> et à prendre exemple sur l’Allemagne de Scholz qui durcit les conditions de l’accueil des étrangers.</p><a href="/articles/les-elections-federales-dessinent-une-suisse-craintive-repliee-sur-ses-acquis">Voir plus</a>

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Bombardements à Gaza: Quelque chose de profond a basculé au Liban

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/77632b1d-7383-45d6-a92b-8a4bf1db89a2/medium" /><p>Sophie Woeldgen est correspondante au Liban et travaille pour plusieurs médias, dont <em>Heidi.news</em>. Les bombardements à Gaza, et l&#39;explosion à l&#39;hôpital Al-Ahli Arabi, ont cassé quelque chose dans l&#39;opinion publique libanaise. Y compris dans des franges de l&#39;opinion plutôt favorables à Israël.</p><p>Samedi dernier, je suis rentrée à Beyrouth après un long séjour en Suisse. Mes voisins, qui gardaient mes clés, m’ont accueillie à l’aube. Encore en pyjama, Gisèle <em>(prénom modifié)</em>, 56 ans, me propose un café et allume machinalement la télévision.</p><p>Les images de Gaza défilent. Trois immeubles s’effondrent tels des châteaux de cartes. Des femmes et des enfants hurlent, en sang. Le corps d’un nourrisson est extrait des décombres. Gisèle zappe, mais les mêmes images tournent partout en boucle.</p>*«Sophie, tu te souviens comment a commencé la guerre de 2006?»*, me lance Pierre *(prénom modifié)*, son mari, qui s’est joint à nous. La réponse est oui. Après la mort de huit soldats israéliens et la capture de deux autres à la frontière par le Hezbollah, Israël lance en juillet 2006 l’opération «Juste Rétribution». Elle provoque la mort de 1200 Libanais, civils pour la plupart, et fait un million de déplacés en 33 jours.

### **«En Europe, les gens ne voient pas ça?»**

C’est ce traumatisme qui a refait surface depuis le lancement des représailles israéliennes à l’attaque du 7 octobre. *«Ils font la même chose à Gaza. Maintenant, ils vont tout détruire»*, anticipe Pierre, qui énumère les bombardements sur les convois d’évacuation et les infrastructures humanitaires. *«Là, ce sont des femmes, des enfants qu’ils tuent»*, relève-t-il avant de poser l’inévitable question: *«En Europe, les gens ne voient pas ça?»*.

La colère et l’incompréhension envers les chancelleries occidentales ne sauraient être sous-estimées. Le discours de la ministre des Affaires étrangères française à Beyrouth, qui a énuméré les atrocités du Hamas en reléguant Gaza au second plan, n’est plus audible. *«Pour les occidentaux, une vie palestinienne ne vaut pas une vie israélienne»*, commente Gisèle.

Ce discours est très répandu au Liban, mais Gisèle et son mari sont chrétiens. Il y a peu, ils soutenaient encore l’Etat hébreu avec enthousiasme – l’ennemi de leur ennemi, le parti-milice chiite Hezbollah, allié du Hamas. *«J’adore Israël!»*, me lançait régulièrement Gisèle. Dans le sillage de la normalisation engagée par plusieurs pays arabes ces dernières années, une certaine rue chrétienne libanaise soutenait la signature d’un accord de paix avec Tel-Aviv. Mais depuis deux semaines, même les plus francophiles des Libanais considèrent Israël comme un «Etat meurtrier».

### Une alliance des fronts

L’identification aux civils palestiniens et le rejet de l’Occident a créé une alliance des fronts que je n’avais jamais vue ici au Liban. Dans les manifestations de solidarité pour Gaza, au lendemain de l’explosion à l’hôpital Al-Ahli Arabi, drapeaux palestiniens, du Hamas, du Fatah, du Hezbollah, du parti communiste ainsi que du PSNS (parti social nationaliste syrien), faisaient face ensemble aux gaz lacrymogènes des Forces spéciales qui protégeaient l’ambassade américaine.

Dans la foule, des jeunes laïques, apartisans, manifestaient pour la première fois aux côtés du Hezbollah. Parmi eux, Julia, 23 ans. *«On soutient la cause palestinienne et Gaza car pour nous, on ne sera jamais en paix au Liban tant que la situation des Palestiniens ne sera pas réglée.»* Au point de manifester à côté des partis-milices qu’elle exècre en temps normal? *«Cette cause-ci est bien plus importante. Le massacre de mardi, sur un hôpital chrétien, a rassemblé tout le monde.»*

https://www.heidi.news/articles/bombardements-a-gaza-quelque-chose-de-profond-a-bascule-au-liban

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Le retour du sale juif

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/0a67d66a-6ad3-4361-b60b-82202ba0bc78/medium" /><p>OPINION. Lassée d’avoir honte, notre journaliste exprime sa colère envers ceux qui confondent sionisme et judaïsme. Elle dénonce notamment les médias qui, par confort ou peur de représailles, préfèrent passer sous silence ceux qui se revendiquent juifs mais refusent le projet sioniste.</p><p>C’est revenu en force le 7 octobre. J’ai reçu des messages de gens que je connais à peine et qui, pour une raison ou pour une autre, savent que je suis juive. Outrés par l’actualité, ils souhaitaient m’exprimer leur soutien. Ils espéraient que <em>nous</em>, ma famille et mes proches, nous portions bien.</p>
<h4><strong>Lire aussi</strong> (Le Temps): <a href="https://www.letemps.ch/societe/berlin-terre-promise-dun-judaisme-davantgarde" rel="nofollow noopener" target="_blank">Berlin, terre promise d’un judaïsme d’avant-garde</a></h4>
C’est ce *nous* qui m’a heurté. Il m’a heurté par le passé et il continue de me heurter à ce jour. Car dans ce *nous,* ce n’est pas *nous, les juifs* que j’entends, mais *nous, les sionistes*. L’image qui clignote d’emblée dans mon cerveau lorsque que je lis ce *nous,* est celle de colons armés qui pillent la terre, oppriment et tuent.

### Israël, vitrine du monde juif?

Pourtant, je sais bien que la religion juive n’a strictement rien à voir avec le sionisme. La première repose sur une tradition millénaire, riche de rituels, de légendes et de mélodies. La seconde se réduit à une idéologie purement politique qui s’est bâtie, à l’aube du siècle dernier, sur le terreau du nationalisme européen. Contesté avec véhémence dès ses débuts, en particulier par les juifs eux-mêmes, la continuité du régime sioniste s’avère, ce n’est pas un scoop, catastrophique pour la communauté juive dans son ensemble.

Car, c’est là-bas, loin du sol européen, à la lisière du monde arabe, que les regards se braquent. Israël est devenu la vitrine du monde juif. Les médias et les politiques dénoncent ou soutiennent les Israéliens, mais évoquent rarement l’outrecuidante manipulation qui s’y joue.

> La réalité, c’est que seule un tiers de la population juive mondiale vit en Israël et que parmi ce tiers, une partie conséquente se bat depuis des années pour le droit des Palestiniens et contre le régime de Benyamin Netanyahou.

Hélas, dans la vieille Europe, ces voix sont privées de présence médiatique, par crainte des représailles qui pourraient en découler.

### Shabbat en secret

Auparavant, ce *nous* qui me chagrine tant aujourd’hui se dotait de visuels plus diffus. Il y avait celui du nouveau riche, ce gros plein de soupe qui ne rêve que d’argent, l’être sans manière ni élégance, qui parle trop fort et ne sait pas se tenir à table, ou encore le radin qui amasse sans jamais rien distribuer aux pauvres. Ayant grandi à Genève, dans un milieu prioritairement protestant et bourgeois, j’ai mis du temps à saisir l’origine de ma gêne.

Comme tous les enfants qui ressentent avant de comprendre, je me suis adaptée. J’ai pris l’habitude de répondre que Malka, prénom typiquement hébraïque, était d’origine inuite. Je me suis gardée de mentionner que je célébrais le shabbat et, lorsque j’en avais les moyens, je me suis chargée des additions. Je vous rassure tout de suite, ces quelques ajustements n’ont pas nui à mon bien-être. Ils ont en revanche aiguisé ma sensibilité aux préjugés qui influencent, inconsciemment le plus souvent, nos opinions et jugements.

### L’hystérie du philosémitisme

L’envers de l’antisémitisme s’appelle le philosémitisme. Il se traduit par un enthousiasme excessif, pour ne pas dire hystérique, pour tout ce qui touche de près ou de loin au judaïsme. C’est en vivant à Berlin, l’ancienne capitale du IIIe Reich, que j’ai découvert les bénéfices de ce pendant de l’antisémitisme. Constatant que *la carte juive,* comme on la désigne dans ces milieux, conférait du poids et de la résonance, je me suis ruée dessus et c’est ainsi que ce qui m’humiliait auparavant s’est transformé en la plus vaine des fiertés.

Or, si le philosémitisme constitue le verso de l’antisémitisme, c’est parce qu’il annihile lui aussi le débat sur la question juive. Le philosémite est celui qui applaudit pour se repentir. Jamais il ne questionne, car ne jouissant pas de l’impunité que confère la *carte juive*, il n’a, par définition, rien à dire. L’Allemagne, seul pays européen à assumer ouvertement sa responsabilité dans le génocide juif, souffre de philosémitisme. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard qu’elle ait formellement interdit toute manifestation pro-palestinienne et prononcé son soutien total et immédiat à l’État d’Israël après le 7 octobre. Cette attitude sclérosée est évidemment, une fois de plus, dramatique pour l’image de la communauté juive, car elle entretient la confusion entre Israéliens et Juifs, sionisme et judaïsme — favorisant ainsi, en dernière analyse, l’antisémitisme.

Si cette confusion entre sionisme et judaïsme n’était pas en train de prendre de l’ampleur, je ne m’offusquerais pas de ceux qui déduisent que, parce que juive, je suis nécessairement liée à l’État d’Israël. Je ne me sentirais pas blessée par les élans de bienveillance que me témoignent ceux qui ignorent que les juifs ne sont pas tous des sionistes et je ne m’irriterais pas devant l’usurpation constante et criminelle de la tradition juive par les sionistes et les responsables politiques d’extrême droite. Non, je ne crierais pas au scandale lorsque, au nom de la lutte contre l’antisémitisme, des politiciens genevois soutiennent des organisations sionistes comme la Cicad. Je ne monterais pas non plus sur mes grands chevaux quand l’ultra-droite instrumentalise l’État d’Israël pour véhiculer ses ambitions suprémacistes et islamophobes. Car c’est bien ce qui se passe.

### Haine des Arabes

Se pavanant comme «amis des juifs» et de lutter contre l’antisémitisme, les ténors de l’ultra-droite se servent de l’État d’Israël pour laisser libre cours à leur haine des Arabes. Si la Palestine est désormais la vitrine des abus du monde occidental, c’est à nouveau *nous, les juifs* qui en sommes responsables. N’est-ce pas dans nos mains qu’ont été placées les mitraillettes?

La situation est trop complexe pour émettre des jugements. La seule chose que je constate et dont je suis fermement convaincue, c’est qu’il est urgent que nous osions différencier le sionisme du judaïsme. S’affirmer non sioniste et se positionner contre l’État d’Israël n’est pas antisémite. Ce qui relève en revanche de l’antisémitisme pur, c’est de soutenir le sionisme au nom de la lutte contre l’antisémitisme.

PS. Voici quelques liens pour approfondir, le sujet:

* Naomi Klein sur l’antisémitisme comme [le moteur et la raison d’être de l’État d’Israël](https://www.theguardian.com/commentisfree/2023/oct/11/why-are-some-of-the-left-celebrating-the-killings-of-israeli-jews)

* Article sur [les organisations très présentes aux Etats-Unis](https://www.thenation.com/article/activism/jewish-voice-peace-protest-dc/) qui revendiquent la distinction entre sionisme et judaïsme.

* [Article du philosophe Elad Lapidot](https://www.tabletmag.com/contributors/elad-lapidot) sur l’antisémitisme, l’anti-antisémitisme et le sionisme.

* [Entretien avec l’autrice d’](https://www.faz.net/aktuell/feuilleton/buecher/themen/deborah-feldman-im-interview-ueber-den-judenfetisch-19143571.html)*[Unorthodox](https://www.faz.net/aktuell/feuilleton/buecher/themen/deborah-feldman-im-interview-ueber-den-judenfetisch-19143571.html)*[, Deborah Feldman](https://www.faz.net/aktuell/feuilleton/buecher/themen/deborah-feldman-im-interview-ueber-den-judenfetisch-19143571.html), à propos de son dernier ouvrage *Judenfetisch,* publié en aout 2023 chez Luchterhand Literaturverlag. La confusion entre juifs et Israéliens, très présente en Allemagne, est abordée.

https://www.heidi.news/articles/le-retour-du-sale-juif

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Peut-on vraiment attraper froid? [VIDEO]

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/e56d1eb9-d420-4484-95b7-b321db51b98e/medium" /><p>Le nez coule, la gorge qui démange, quelques mots de tête. C’est la saison, vous avez sûrement attrapé froid. Mais attendez, est-ce qu’on peut vraiment attraper froid?</p><p>Toux, rhume, grippe… On a tendance à regrouper tout ça sous la fameuse expression du «coup de froid». Mais ce n’est qu’une expression dénuée de sens médical. En réalité, il est totalement impossible d’attraper froid. Le froid n’est pas un virus.</p><p>Ce que l’on attrape, ce sont des germes qui se multiplient dans le conduit nasal, la plupart du temps des virus respiratoires bénins, qui n’intéressent pas grand-monde et circulent beaucoup parmi nous: les rhinovirus, les coronavirus, ou encore les parainfluenza, des «presque grippe».</p>**Pourquoi l’hiver est la saison du coup de froid.** Mais d’où vient cette expression du coup de froid? C’est tout simple: en hiver, il fait froid, et on tombe plus facilement malade. Si on s’arrête là, il est évident qu’il faudrait incriminer le froid. Mais menons l’enquête, pour aller au-delà de cette croyance populaire. Il y a plusieurs coupables:

* **la promiscuité**: en hiver, on a tendance à vivre plus en intérieur. Et ça, les virus, ils aiment bien: c’est plus facile pour eux de sauter d’une personne à une autre. Parce que bien sûr, comme il fait froid dehors, on aère moins. Grave erreur si on veut se débarrasser des virus.

* **les changements de température** affaiblissent notre système immunitaire. Par exemple, passer de votre appartement chauffé, au froid extérieur, ça affaiblit notre système immunitaire.

* **les conditions climatiques**: contrairement à la plupart d’entre nous, les germes se plaisent bien dans l’air froid et sec, celui qu’on trouve plus volontiers en hiver.

**Un peu de nuance: le froid joue un rôle modeste.** Si le sujet continue de passionner les scientifiques, c’est peut-être bien parce que c’est plus compliqué que ça en a l’air. Dernièrement, une équipe de chercheurs s’est penchée sur notre nez, porte d’entrée des virus. A l’intérieur, une armée de petites billes microscopiques, les vésicules extracellulaires, veille à nous protéger.

Il s’avère que le froid, c’est leur point faible. Ces vésicules extracellulaires sont libérées quand des microbes sont détectés dans notre nez.

Dans une température «normale», tout fonctionne «normalement». Mais l’équipe de chercheurs a ensuite fait des tests à une température d’environ 4 degrés. Là, l’armée de petites billes était beaucoup moins présente dans notre nez. Et celles qui étaient là, beaucoup moins réactives.

**Le point final.** Si on n'attrape pas froid, ces nouvelles recherches viennent de confirmer qu’il existe bien un effet du froid sur notre système immunitaire. Ça et le fait qu’on soit tous en intérieur en hiver, avec des virus qui vivent leur meilleure vie sous moins 5 degrés, ça fait de l’hiver la saison du nez qui coule.

Soyons quand même clairs: un rhume, cela reste le résultat d’une infection causée par un germe, un virus le plus souvent. Comme ça au moins, vous saurez que vous n’avez pas attrapé froid.

https://www.heidi.news/articles/peut-on-vraiment-attraper-froid-video

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Caviar et pain «d’avant la perestroïka»: en Russie, le patriotisme culinaire fait recette

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/b4928652-fdce-4930-b327-ed8042444aa8/medium" /><p>Notre journaliste poursuit son périple le long de la Volga, à la recherche de l’âme de la Russie profonde. A Astrakhan, près de la mer Caspienne, et Iaroslavl, dans la Haute Volga, il découvre que la nostalgie pour la Russie d’antan s’incarne jusque dans les choix alimentaires. Du caviar post-inflation au pain «d’avant la perestroïka», la tradition fait son retour en force.</p><p>Nous poursuivons notre quête des méandres de l’âme russe le long de la Volga, alors que la guerre en Ukraine fait rage depuis plus d’un an. A Saint-Pétersbourg, l’illustre directeur de l’Ermitage, Mikhaïl Piotrovski, nous avait rappelé que la mère des fleuves a toujours été le poumon économique de son pays. Y compris dans la Russie sous sanctions:</p>
<blockquote>
<p><em>«Il en va de même ces temps-ci: c’est via la Volga et la mer Caspienne que nous commerçons avec l&#39;Iran pour contourner les sanctions, que nous exportons du pétrole vers l&#39;Inde et que nous importons ce dont nous avons besoin.»</em></p></blockquote>
<a href="/articles/caviar-et-pain-d-avant-la-perestroika-en-russie-le-patriotisme-culinaire-fait-recette">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/caviar-et-pain-d-avant-la-perestroika-en-russie-le-patriotisme-culinaire-fait-recette

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Amasser des données par tous les moyens. C'est ça, Migros

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/38bea4a2-51b7-4a21-8640-8567cd93b94a/medium" /><p>Premier employeur privé de Suisse, le géant orange collecte et traite chaque jour des millions de données personnelles. L&#39;extension de ses activités au domaine de la santé soulève la question de sa capacité à croiser toujours plus d’informations sur ses clients.
<br/><br/><em>Cette Exploration ayant été financée par crowdfunding, c&#39;est-à-dire par vous, chers lecteurs, les épisodes sont disponibles en accès libre.</em></p><p><em>«Nous sommes proches de nos clientes et clients, nous nous mettons à leur place et nous proposons les offres et prestations qui correspondent à leurs besoins.»</em> Voici l’une des «lignes directrices» présentées <a href="https://corporate.migros.ch/fr/groupe-migros/strategie.html?" rel="nofollow noopener" target="_blank">par le groupe Migros sur son site web</a>. Nous ignorions, avant de nous pencher sur le géant orange, à quel point cette phrase a priori triviale est en fait proche de la vérité.</p><p>Car Migros détient, <a href="https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/coop-pour-moi-et-pour-toi-et-surtout-pour-google" rel="nofollow noopener" target="_blank">à l’instar de Coop</a>, une quantité  phénoménale de données sur ses clients, en particulier grâce à sa carte Cumulus. Ce qui lui permet de les connaître intimement, à travers leurs habitudes alimentaires et, plus récemment, leurs dépenses de santé.</p>Migros affirme que 3,1 millions de ménages seraient affiliés à son programme fidélité, lancé en 1997, tandis que [l’Office fédéral de la statistique recense](https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/population/effectif-evolution/menages.html) 3,9 millions de ménages en Suisse. Un tel taux de pénétration donne le vertige.

D’autant que Migros, ce n’est pas juste Migros. C’est aussi Denner, Galaxus, ActivFitness, Hotelplan ou encore Medbase. Saviez-vous que cette dernière franchise est [le plus grand employeur de médecins généralistes](https://www.pme.ch/dossiers-et-hors-series/2023/07/03/migros-a-la-conquete-de-la-sante-616392) du pays? De quoi aiguiser notre curiosité quant au devenir d’une telle masse de données personnelles…

### **Cumuler des points, accumuler des données**

Migros a refusé de nous accorder des entretiens avec des responsables du groupe ou de réaliser un reportage dans ses locaux, [comme nous vous l’avons expliqué dans notre premier épisode](https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/donnees-personnelles-le-match-qui-de-coop-ou-migros-elude-le-mieux-nos-questions). Pour tenter d’appréhender ce que le géant orange fait avec les données personnelles de ses clients, nous avons dû nous appuyer sur sa [déclaration de protection des données](https://privacy.migros.ch/fr.html), ainsi que certaines réponses fournies par son porte-parole – quand elles ne se bornaient pas à nous renvoyer à ladite déclaration….

La carte Cumulus porte bien son nom: les clients cumulent des points pour obtenir des réductions et autres avantages, et Migros accumule des informations sur leurs habitudes de consommation. Contrairement à Coop et sa Supercard, [les conditions générales de Cumulus](https://cumulus.migros.ch/fr/a-propos-de-cumulus/conditions-generales.html) ne donnent pas plus d’éléments que ceux contenus dans sa déclaration de protection des données pour comprendre ce que l’entreprise met en œuvre pour cerner ses clients.

Concrètement, Migros annonce traiter de manière générale les catégories de données personnelles suivantes:

* Les données d’identification de base (prénom, nom, genre, date de naissance…);

* Les données de contrat;

* Les données de communication (lors d’échanges avec le service client);

* Les données comportementales et de transactions pour les achats en magasin (produits achetés, horaire, fréquence, lieu…);

* Même chose en ligne (commandes effectuées ou annulées, listes de favoris, articles consultés, recherches effectuées…);

* Les données de préférences (obtenues en croisant d’autres données entre elles);

* Les données techniques (adresse IP, identifiants associés à l’appareil utilisé via, notamment, des cookies…).

En ce qui concerne les préférences, l’entreprise précise qu’elle peut «*associer des données comportementales et de transaction à d’autres données et analyser ces données sur une base individuelle et non individuelle», lui permettant de «tirer des conclusions quant \[aux\] caractéristiques \[des clients\], \[leurs\] préférences et \[leur\] comportement probable*».

C’est ce qu’on appelle le «profilage»: l’art d’inférer des caractéristiques de clients – comme les préférences pour certains types de produits – par croisement d’informations personnelles.

![NAK_8813.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/da333740-8b08-4592-abf6-1cdb07dbee4f/large "Migros met volontiers en avant les avantages de son programme de fidélité, plutôt que la contrepartie qui réside dans la collecte de données. / Photo Niels Ackermann pour Heidi.news")

Selon l’entreprise, il s’agit d’offrir aux clients une expérience personnalisée. Migros fournit un exemple: «*Nous pouvons éviter que vous receviez des coupons de rabais pour des produits à base de viande si nous pouvons supposer que vous suivez un régime végétarien*».

Ce profilage ne se limite pas aux adhérents du programme Cumulus: tous les détenteurs d’un compte en ligne Migros sont concernés. Le géant orange affirme qu’il y aurait 5,1 millions de comptes créés, ceux-ci donnant accès à de nombreux services et plateformes d’e-commerce de la galaxie Migros – ce qui permet un suivi plus fin des comportements d’achat.

### **La plus grande transformation de l’histoire de Migros**

La transformation numérique de Migros est encore loin d’être achevée. L’entreprise a lancé en 2021 un programme intitulé Eiger, [«le plus grand programme de transformation de son histoire»](https://report.migros.ch/2021/fr/services/), avec l’objectif de renouveler entièrement son «noyau numérique». Le but: standardiser les processus internes et réduire la complexité historique de l’architecture informatique, ce qui devrait permettre au géant orange d’améliorer son fonctionnement.

Parmi les changements apportés par ce projet, Migros [va abandonner son environnement informatique](https://docs.google.com/document/d/1vceFGcqicKdZ7-wdMm8joKUFLDQMUV67rUUe28Sco5w/edit) sur site (*on-premise*) pour s’orienter vers le *cloud*, c’est-à-dire le stockage de données en ligne. Migros exploitait jusqu’ici encore quatre centres de données lui appartenant. *«Nous avons compris que ce modèle n’était pas la bonne solution à long terme»*, relevait néanmoins Rainer Baumann, chef du département Opérations à la Fédération des coopératives Migros, [dans une interview à ](https://www.ictjournal.ch/interviews/2021-06-30/comment-migros-sattaque-a-la-numerisation)*[ICTJournal](https://www.ictjournal.ch/interviews/2021-06-30/comment-migros-sattaque-a-la-numerisation)*[ en 2021](https://www.ictjournal.ch/interviews/2021-06-30/comment-migros-sattaque-a-la-numerisation).

Le géant orange a conclu en 2021 un partenariat avec Microsoft pour effectuer sa migration auprès de son service *cloud* Azure. *«La sélection du fournisseur de services cloud a pris en compte plusieurs aspects, tels que la maturité de l’offre, la stabilité et le rapport qualité-prix»*, précise Tristan Cerf, porte-parole de Migros. Et d’ajouter: *«En particulier, pour de nombreux services critiques, le choix s’est porté sur des prestataires ayant une expérience mondiale»*.

La migration devrait être [achevée à la fin de l’année 2023](https://www.ictjournal.ch/interviews/2022-12-16/eric-devantay-migros-online-la-migration-dans-le-cloud-va-encore-augmenter). Les données hébergées par Microsoft le seront en Suisse, le géant américain ayant [ouvert plusieurs centres de données](https://news.microsoft.com/de-ch/2022/05/31/microsoft-suisse-etend-ses-centres-de-donnees-locaux-avec-des-zones-de-disponibilite/) sur le territoire helvétique depuis 2019.

Migros utilise également les services cloud de Google, notamment pour ses outils d’analyse de données, y compris s’agissant du profilage. *«Les analyses sont en principe effectuées sous forme anonyme, afin qu’aucune conclusion ne puisse être tirée sur une personne»*, précise Tristan Cerf, alors même que la déclaration de protection des données indique le contraire, le profilage étant justement rattaché à un client identifiable via son numéro Cumulus ou son compte en ligne.

### **«Nous cherchions des moyens de maximiser la valeur des données»**

La personnalisation de l’expérience est au cœur de la stratégie de Migros. C’est d’ailleurs l’un des buts visés par son programme Eiger lorsqu’il sera achevé: *«Chaque client pourra profiter d’une expérience d’achat personnelle extrêmement confortable et complète»*.

L’entreprise a déjà mis le pied à l’étrier en matière de personnalisation de l’expérience. Google Cloud a publié [une étude de cas sur son site](https://cloud.google.com/customers/digitec-galaxus) à propos de sa collaboration avec Digitec Galaxus, que le géant orange possède à 70% depuis 2015 – les 30% de capital restants sont aux mains des cofondateurs. Le spécialiste du commerce en ligne intégré au groupe Migros a collaboré avec Google pour *«offrir à \[ses\] clients une expérience beaucoup plus personnalisée, avec des recommandations qui correspondent mieux à leurs intérêts»*. Digitec Galaxus a ainsi adopté l’outil de recommandation de Google établi sur des algorithmes d’apprentissage machine (*machine learning*) intitulé «Recommandation AI».

*«Nous cherchions des moyens de maximiser la valeur de nos données»*, indique Christian Sager, responsable produit pour la personnalisation chez Digitec Galaxus, cité par Google. L’intéressé estime par ailleurs que cette collaboration avec le géant américain a permis à l’entreprise de commerce en ligne d’*«atteindre son prochain milliard»* de francs de chiffre d’affaires.

Autre manière de personnaliser l’expérience? La fonctionnalité SubitoGo intégrée à l’app Migros, qui permet aux clients de scanner eux-mêmes leurs achats avec leur smartphone et de quitter le supermarché sans passer par la caisse: le montant du panier d’achat est directement prélevé sur la carte bancaire renseignée par l’utilisateur. Pour profiter de ce service, il faut toutefois utiliser un numéro Cumulus, un simple compte utilisateur ne suffit pas. Un choix qui vise sans doute à acquérir de nouveaux adhérents pour le programme de fidélité.

### **Comment Migros transmet des informations aux marques**

«Coop et Migros vendent des données sur leurs clients à l’industrie», [titre la ](https://www.nzz.ch/nzz-am-sonntag/coop-und-migros-verkaufen-kundendaten-an-die-markenindustrie-ld.1758801?reduced=true)*[NZZ am Sonntag](https://www.nzz.ch/nzz-am-sonntag/coop-und-migros-verkaufen-kundendaten-an-die-markenindustrie-ld.1758801?reduced=true)*[ du 1er octobre 2023](https://www.nzz.ch/nzz-am-sonntag/coop-und-migros-verkaufen-kundendaten-an-die-markenindustrie-ld.1758801?reduced=true). Selon le média alémanique, Migros vend des analyses de données aux fournisseurs leur permettant de cerner les groupes de clients qui achètent leurs assortiments. Contacté, Tristan Cerf, porte-parole du géant orange, précise qu’*«aucune information n’est vendue aux fournisseurs»*.

D’après lui, Migros communique des informations statistiques, qui ne permettent pas d’identifier des individus uniques. *«Ce sont des données agrégées et anonymisées, qui donnent aux fournisseurs des indications sur les tendances de consommation de leurs produits dans les enseignes Migros»*, indique Tristan Cerf.

A notre demande, le porte-parole du géant orange fournit un exemple concret. Une marque qui commercialise de la nourriture pour animaux veut savoir quels types de clients achètent ses produits, et elle demande à obtenir le détail sous la forme de parcours de vie.

![](https://lh5.googleusercontent.com/WyXIHlvC_Gl5jOPo_nXFBLXmlDFOSZ5BYUKPfKslFP6DgyVwYXy-7Ci5MYk72-ZRQQdxMjNsvnWuPt0dJ7gWeOnCrdYdQ_BY9AMtgUY_MX4SQonpJOjapROJ9MqmtUZ2OBbY9CfECkV6YVqmWFu2yQ "Exemple d'un tableau qui a été fourni par Migros à une marque. La marque étudiée a été anonymisée et les chiffres précis retirés. | Migros")

Le tableau ci-dessus permet au fournisseur de savoir que ce sont surtout les clients Migros de la catégorie «Golden Age» qui achètent le plus sa nourriture pour animaux. *«La comparaison dans le temps permet à la marque d’observer l’évolution*, commente Tristan Cerf. *Dans cet exemple-là, il y a une baisse de consommation du groupe “Golden Age”. Sur la base de cette information, la marque pourrait décider de procéder à une baisse de prix pour tenter de reconquérir les clients qui se sont détournés de son produit, ou changer sa présentation.»*

Continuons avec l’exemple de la nourriture pour animaux. Si la marque vend plusieurs produits chez Migros, par exemple des croquettes et des aliments humides, elle peut demander au géant orange de lui fournir des statistiques sur la proportion de clients qui consomment l’un ou l’autre, ou les deux à la fois. Cette statistique s’applique à l’ensemble des clients, et non à des groupes spécifiques.

Tristan Cerf insiste sur le fait qu’aucune information transmise à des tiers dans le cadre de cette prestation ne permet de tirer des conclusions sur un individu précis. *«Ce sont des analystes de Migros qui consultent les données pour fournir ces statistiques, à aucun moment les marques ont accès aux informations de nos clients.*» Ce service est aussi proposé pour les médicaments en vente libre.

Le porte-parole de Migros conclut: «*Le but de ce traitement des données est toujours d’améliorer le service au client dans l’univers Migros. Nous n’avons aucun intérêt à obtenir des informations qui ne servent pas ce but (ce qui serait le cas si nous collectionnions des données pour les vendre à d’autres, ce que nous ne faisons pas). Les données individuelles ou de ménage permettent à l’individu ou au ménage de recevoir des offres spécialisées et personnalisées, mais ne servent pas à améliorer l’assortiment par exemple. Les études sur la base de ces données sont toujours agrégées et anonymisées, car elles ont pour but d’améliorer l’offre sur la base de comportement de type de clientèle, pas d’individus»*.

Interrogé sur les pratiques de Migros, un expert de l’analyse de données partage son appréciation: *«Si Migros n'offre pas aux marques la possibilité de choisir des catégories précises supplémentaires qui permettraient de réduire considérablement le nombre d'individus concernés, désanonymiser ces informations est impossible»*.

### **Pour Migros, «données», ça s’écrit santé**

Si Migros veille à protéger les données qu’elle possède sur ses clients, elle n’a de cesse d’augmenter la quantité et la nature des informations qu’elle recueille. Le géant orange a investi massivement dans le domaine de la santé ces dernières années. 

Tout a commencé en 2010 avec l’acquisition de la majorité du capital de l’entreprise Medbase, qui compte 167 cabinets médicaux en 2022. Medbase a par ailleurs racheté en 2020 Zahnarztzentrum.ch, [une chaîne de cabinets dentaires](https://www.blick.ch/wirtschaft/tochter-medbase-schnappt-sich-die-kette-zahnarztzentrum-ch-die-migros-fuehlt-kunden-jetzt-auf-den-zahn-id15892566.html), et annoncé [la reprise des activités suisses des pharmacies Zur Rose](https://www.ictjournal.ch/news/2023-02-08/medbase-filiale-de-migros-reprend-la-pharmacie-en-ligne-zur-rose) en début d’année 2023. La Fédération des coopératives Migros a aussi acquis les centres de fitness Silhouette en 2017 – devenu Activ Fitness – et Bestsmile au printemps 2020, [une start-up leader dans le domaine de la correction dentaire](https://bestsmile.com/fr/qui-sommes-nous/migros/).

Ce développement dans le domaine de la santé s’accompagne aussi de projets numériques. Medbase est partie prenante de la coentreprise Bluespace Ventures, qui comprend le groupe de cliniques Hirslander et les assureurs-maladie Groupe Mutuel, Helsana et Swica. Ils ont lancé ensemble Compassana, une plateforme qui se présente comme «l’écosystème smart pour la santé en Suisse». L’accès à cette plateforme se fait au travers d’une application pour smartphone, [laquelle nécessite d’accepter](https://www.compassana.ch/fr/dse-c-app-2023) que des données de santé soient collectées et traitées (y compris à des fins marketing).

Migros a aussi développé l’application de coaching iMpuls, qui propose des activités physiques en fonction des objectifs de l’utilisateur (perte de poids, tonification, gain de masse musculaire…), accompagnées de suggestions de recettes.

Pour accéder aux fonctionnalités de l’application, il est nécessaire de s’identifier avec un compte Migros, et d’accepter la «[déclaration complémentaire de protection des données](https://login.migros.ch/legal/DSE_GPL_1_4)», laquelle précise que l’entreprise peut «*procéder au traitement automatique des données personnelles afin d'analyser certains aspects personnels ou faire des prévisions (“profilage”). \[Migros réalise\] des profilages en particulier pour analyser votre état de santé ou vos habitudes de vie et, sur cette base, vous faire des propositions lorsque vous faites appel à des offres correspondantes*».

Le porte-parole de Migros assure que «*les données de santé ne sont pas fusionnées avec d'autres données clients ni utilisées pour créer des profils de clients et qu’elles sont traitées dans des espaces système spécialement sécurisés, auxquels aucune autre entreprise de Migros ou externe ne peut accéder*». Une affirmation qui, là encore, entre en contradiction avec les termes de la déclaration complémentaire de protection des données, ce que confirme un juriste spécialisé dans cette thématique.

Relancé à ce sujet, Migros précise: «*Les offres et recommandations personnalisées sur iMpuls sont établies exclusivement sur la base des données mises à disposition par les utilisateurs eux-mêmes sur iMpuls et ceci spécifiquement à cet usage. Elles ne sont disponibles qu'aux personnes qui ont expressément indiqué qu'elles désiraient une telle offre. Actuellement, il n'y a pas de lien ni aucun échange entre les données iMpuls et les données d'achat Cumulus ou d'autres données collectées via le compte Migros.*»

### **La publicité, encore et toujours**

Si les données de santé ne sont vraisemblablement pas utilisées à des fins publicitaires – une finalité qui n’est pas mentionnée dans les déclarations de protection des données d’iMpuls et de Compassana –, les autres informations récoltées par Migros peuvent l’être.

Pour ses campagnes publicitaires, Migros collabore de longue date avec l’agence Webrepublic, basée à Zurich et à Lausanne. Celle-ci a publié plusieurs études de cas liées à sa collaboration avec le géant orange, destinées à [augmenter l’installation de l’app Migros](https://webrepublic.com/fr/clients/case-studies/commercialisation-application-migros), [diffuser une promotion pour la Cumulus-Mastercard](https://webrepublic.com/fr/clients/case-studies/a-b-testing-youtube-cumulus-mastercard) ou encore renforcer [la visibilité des magasins sur Google](https://webrepublic.com/fr/clients/case-studies/clients-migros-satisfaits-grace-a-3000-annonces-generees-automatiquement).

[On apprend par ailleurs que Migros Online](https://webrepublic.com/fr/clients/case-studies/migros-online-meta-advantage-shopping-campaigns) a adopté l’outil [Advantage+ Shopping Campaigns de Meta](https://about.fb.com/news/2022/08/introducing-new-automation-tools-to-increase-sales-and-drive-growth/) (la maison mère de Facebook), qui permet d’automatiser des campagnes publicitaires tout en garantissant un meilleur ciblage des clients potentiels.

[Comme pour Coop](https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/coop-pour-moi-et-pour-toi-et-surtout-pour-google), dès lors qu’on entre dans le champ de la publicité, il est difficile de cerner quelles données Migros partage – consciemment ou non – avec des acteurs comme Facebook et Google pour diffuser ses annonces et mesurer leurs performances.

Ce qui est certain, c’est que Migros est aujourd’hui en possession d’une quantité astronomique de données sur ses clients, de leurs habitudes alimentaires à leur état de santé, en passant par leurs comportements d’achat. Autant d’informations qui peuvent, une fois croisées entre elles, révéler bien des caractéristiques intimes sur les individus.

La législation impose pour l’heure une certaine retenue dans l’utilisation de ces données. Mais malgré la régulation, des zones d’ombre subsistent. De quoi s’interroger sur les dangers que peuvent représenter une telle accumulation, quand bien même l’entreprise affirme en faire une utilisation raisonnée et raisonnable, invoquant son *«intérêt légitime»*. Quid de celui de ses clients?

https://www.heidi.news/articles/amasser-des-donnees-par-tous-les-moyens-c-est-ca-migros

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Ilona et Nina, mères porteuses sous les bombes russes

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/711402ad-21bd-4811-86fe-e18771ce4bec/medium" /><p>Un an après le début de l&#39;invasion russe, en janvier 2023, l&#39;industrie de la GPA avait repris de plus belle en Ukraine. Deux femmes enceintes racontent leur quotidien dans la pénombre d&#39;un appartement, entre sirènes d&#39;alerte aérienne et coupures de courant.</p><p>A quelques semaines du premier anniversaire de l&#39;invasion russe, fin janvier 2023, l&#39;ambiance est tendue. Les Allemands et les Américains ont annoncé la veille qu&#39;ils fourniraient des tanks à l&#39;Ukraine. Durant la nuit, Moscou a déployé 24 drones kamikazes sur le pays. Puis dans la matinée, ce sont 55 missiles qui sont venus s&#39;abattre sur l&#39;Ukraine, dont 20 dans la région de Kiev, faisant 11 morts et 11 blessés.</p><p>Plusieurs explosions se sont fait entendre dans la matinée. Les sirènes d’alerte aérienne sonnent presque en continu depuis 24 heures, remplissant le ciel lourd et gris de la capitale de leur complainte stridente. La neige tombe à gros flocons.</p><a href="/articles/ilona-et-nina-meres-porteuses-sous-les-bombes-russes">Voir plus</a>

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Coop, pour moi et pour toi. Et surtout pour Google

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/126612de-afd7-4cae-b55e-faf2207f2ae6/medium" /><p>La Supercard n&#39;a pas toujours été un aspirateur à données personnelles, Coop voulant se différencier de Migros en matière de traitement des données. Mais cette époque est révolue. Le géant de la grande distribution a désormais de grandes ambitions en la matière, et s&#39;est trouvé un partenaire de taille pour atteindre son objectif: Google.
<br/><br/><em>Cette Exploration ayant été financée par crowdfunding, c&#39;est-à-dire par vous, chers lecteurs, les épisodes sont disponibles en accès libre.</em></p><p><em>«Vous avez la Supercard?»</em> Qui n’a pas déjà entendu cette question au moins une fois dans sa vie en Suisse? Pour ma part, je dois répondre par la négative à chaque fois. Mais à en croire les chiffres fournis par Coop, je suis un peu seul au monde. Quelque 3,3 millions de ménages utiliseraient activement cette carte de fidélité, selon l’entreprise. <a href="https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/population/effectif-evolution/menages.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">D’après l’Office fédéral de la statistique</a>, la Suisse compte 3,9 millions de ménages.</p><p>Cela en dit long sur le succès de la Supercard depuis son lancement il y a plus de 20 ans. Comme toutes les cartes de fidélité, les avantages octroyés le sont en échange d’une contrepartie: l’accès aux habitudes d’achat.</p>J’ai cherché à comprendre la manière dont Coop se sert des précieuses informations qu’elle recueille sur ses clients pour optimiser son modèle d’affaires. L’entreprise ne m’a pas facilité la tâche: [toutes les demandes d’entretiens et de reportage ont été refusées](https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/donnees-personnelles-le-match-qui-de-coop-ou-migros-elude-le-mieux-nos-questions). Quant aux questions envoyées par écrit, Coop y a surtout répondu en renvoyant à [ses conditions générales de vente](https://www.supercard.ch/content/supercard/fr/la-supercard/cgv.html) (CGV) et [à sa déclaration de protection des données](https://www.coop.ch/fr/entreprise/protection-des-donnees.html). Un manque de coopération qui interpelle — d’autant plus qu’une partie des informations qu’elle n’a pas souhaité communiquer peuvent être trouvées sur le web, pour qui désire vraiment en savoir plus.

### **La Supercard, un aspirateur à données?**

Coop a lancé son programme de fidélité en 2000, trois ans après Migros et sa carte Cumulus. Au départ, Coop s’était différenciée de son principal concurrent par une politique de récolte de données restrictive: seuls l’identité inscrite sur la Supercard et les montants dépensés étaient enregistrés, pas les produits achetés. Mais l’entreprise a décidé de changer d’approche en 2012, comme le rapportait le sociologue Sami Coll [dans ](https://www.letemps.ch/societe/cartes-fidelite-big-data-moi)*[Le](https://www.letemps.ch/societe/cartes-fidelite-big-data-moi)*[ ](https://www.letemps.ch/societe/cartes-fidelite-big-data-moi)*[Temps](https://www.letemps.ch/societe/cartes-fidelite-big-data-moi)*.

![NAK_8826.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/f661f514-1239-4a66-b4f2-af71b7c3b5ce/large "L'application Supercard permet d'accéder aux fonctionnalités du programme de fidélité. / Photo Niels Ackermann pour Heidi.news")

Les conditions générales de Supercard permettent de mesurer l’ampleur de la moisson de données réalisée par Coop depuis lors. Pour chaque adhérent de son programme de fidélité, le géant de la grande distribution crée un profil. Il contient les coordonnées du client, les informations relatives aux achats (paniers, horaire, fréquence, lieux, avantages utilisés…), les données communiquées à Coop et à ses filiales, les informations issues de l’usage des canaux numériques de l’entreprise (sites web, applications).

#### Lire aussi: [Données personnelles, le match: qui de Coop ou Migros élude le mieux nos questions?](https://www.heidi.news/explorations/razzia-sur-vos-data/donnees-personnelles-le-match-qui-de-coop-ou-migros-elude-le-mieux-nos-questions)

Ce profil peut aussi être enrichi par des caractéristiques supplémentaires, comme la taille du ménage, l’âge, la classe de revenu, les données géographiques ou encore le patrimoine immobilier. Autant d’informations qui peuvent avoir été communiquées par le client, mais peuvent aussi être renseignées par des tiers, selon la déclaration de protection des données de Coop.

### **Le ciblage, nerf de la guerre**

Bien sûr, Coop peut exploiter ces données pour exécuter des contrats, se conformer à des exigences légales ou encore pour des raisons de sécurité. *«Pour de telles finalités, la quantité de données qu’il faut conserver et exploiter reste raisonnable: informations de base, de contact et données bancaires suffisent en général»,* commente un responsable de la protection des données d’une entreprise, sous le sceau de la confidentialité. 

Alors pourquoi accumuler autant d’informations? Pour répondre aux besoins du marketing et de la publicité.

Comme toutes les entreprises, Coop cherche à optimiser son fonctionnement, et les données peuvent fournir de précieuses informations qui s'avèrent cruciales pour prendre des décisions opérationnelles et stratégiques. C’est par exemple utile pour la gestion des stocks dans le commerce de détail. En réalité, des données statistiques anonymisées peuvent très bien faire l’affaire.

Mais la tentation est grande d’en savoir plus. Mieux connaître les habitudes de sa clientèle offre de nombreuses opportunités: anticiper les attentes, personnaliser l’expérience, adresser des messages publicitaires ciblés, etc. Prises individuellement, les données récoltées par l’entreprise peuvent sembler sans intérêt. Qu’est-ce que ça peut bien faire que Coop sache que j’achète du chocolat, ou que je fasse mes courses le lundi à 18h?

Pourtant, ces informations ont de la valeur, justement parce qu’elles sont corrélées entre elles. Coop peut analyser les données de ses clients *«sur la base de procédés et de logiques mathématiques et statistiques reconnus (...) pour créer des groupes cibles aux comportements et préférences similaires»*, [indique l’entreprise](https://www.coop.ch/fr/entreprise/protection-des-donnees.html) dans sa déclaration de protection des données.

Si Coop veut déterminer quelle part de sa clientèle masculine achète des produits électroménagers et des fruits et légumes issus de l’agriculture biologique, ou qui parmi les utilisateurs de ses plateformes numériques effectue uniquement ses achats en magasin, elle peut recourir à des algorithmes de clustering, comme [K-means](https://towardsdatascience.com/customer-segmentation-using-k-means-clustering-d33964f238c3), qui permettent d’analyser d’importantes quantités de données de manière automatisée.

En croisant d’autres données, comme la fréquence des achats, les horaires, les montants dépensés, il est possible d’émettre des hypothèses sur les comportements futurs des clients, comme [les montants qu’ils sont susceptibles de dépenser](https://bright.swiss/la-lifetime-value-ltv-ciblee-par-consommateur/) dans un horizon temporel donné.

*«Ces méthodes ne sont pas nouvelles, elles sont utilisées dans le secteur depuis longtemps,* rappelle Pierre Berendes, spécialiste de la publicité numérique. *Ce qui change, c’est [la puissance des outils à disposition](https://www.lsa-conso.fr/la-data-desormais-au-c-ur-de-l-avantage-concurrentiel-du-commerce-de-detail-tribune,301511) pour traiter ces informations, mais le métier de marketeur est resté le même.»*

### **Un pari sur l’avenir**

Avec sa Supercard, Coop récolte un important volume de données sur ses clients. Reste à savoir si elle arrive à les exploiter à leur plein potentiel. *«Diffuser des messages personnalisés, ça coûte de l’argent, parce qu’il faut créer les contenus qui seront adressés aux clients sur la base de leur profil»*, explique Pierre Berendes.

Selon lui, beaucoup d’entreprises ne sont pas encore en mesure de mettre à profit toutes les données qu’elles possèdent, mais les algorithmes génératifs comme Midjourney ou ChatGPT pourraient changer la donne dans quelques années. Il explique: *«Aujourd’hui, créer 50 vidéos personnalisées, ça prend du temps et c’est onéreux. Demain, ça sera possible d’en générer par centaines rapidement et à un coût presque nul, ce qui pourrait amener la communication personnalisée dans une nouvelle dimension.»*

[Les offres d’emploi publiées par Coop](https://jobs.coopjobs.ch/offene-stellen/business-analyst-bi-w-m-d/basel/ee58c17c-3db3-4040-8c31-a27b0789edad) montrent que l’entreprise veut développer sa division spécialisée dans l’informatique décisionnelle (*business intelligence*, ou *BI*) et en faire un *«élément stratégique de la transformation numérique»*, indique-t-elle dans l’une d’entre elles. La *BI* est une branche de l’informatique qui se concentre essentiellement sur l’analyse de données pour fournir une aide à la décision.

Sur les quelque 550 emplois IT de Coop, la division *BI* compte 29 collaborateurs. *«Cela semble peu pour une entreprise de cette taille»*, observe un spécialiste du secteur. Parmi les 34 offres d’emploi pour l’informatique, j’en ai compté six pour la seule division *BI* à la fin du mois de septembre. Une preuve que le détaillant se développe rapidement dans ce domaine? Pas selon Coop, qui répond qu’il s’agit de remplacements et non de nouveaux recrutements.

Coop a par ailleurs [fusionné en 2020 ses sites de commerce en ligne](https://www.coop.ch/fr/entreprise/medias/communiques-de-presse/2020/coop-revolutionne-sa-presence-en-ligne.html), permettant aux utilisateurs de relier leur Supercard sur la nouvelle plateforme, et [a créé en 2023 une division «digital & customer» au sein de sa direction](https://www.coop.ch/fr/entreprise/medias/communiques-de-presse/2022/coop-place-ses-clients-et-clientes-encore-plus-au-premier-plan.html), pour pouvoir répondre de manière «plus rapide et ciblée» aux attentes des clients.

### **Dans l’escarcelle de Google**

Si Coop refuse de communiquer l’identité de ses prestataires pour le cloud, ses offres d’emploi permettent d’obtenir ces renseignements. J’ai donc découvert qu’en plus de SAP pour son logiciel de gestion d’entreprise et de Microsoft pour sa suite Microsoft 365, le géant du commerce de détail suisse s’est tourné vers Google en 2019 pour l’hébergement de ses données marketing.

Grâce à une simple recherche sur… eh bien Google, je découvre que le géant américain a publié [une étude de cas](https://cloud.google.com/customers/coop) à propos de Coop, laquelle dévoile quelques informations intéressantes. En plus d’héberger ses données marketing via [Cloud Storage](https://cloud.google.com/storage?hl=fr) de Google, Coop utilise également les outils d’informatique décisionnelle [BigQuery](https://cloud.google.com/bigquery/?hl=fr&gclsrc=ds&gclsrc=ds#v2-KWID_43700077696030019-kwd-47616965283-userloc_9056105&gclsrc=aw.ds&gad=1) et [Looker](https://cloud.google.com/looker?hl=fr).

![Clo.PNG](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/2fba7408-f5ff-4833-9f8a-4513e9176954/large "Sur le site de Google Cloud, on peut trouver une étude de cas sur Coop. / Capture d'écran Heidi.news")

Est-ce que cela signifie que Google a accès aux données personnelles de la clientèle de Coop? Difficile à dire. Le géant américain affirme dans sa déclaration de protection des données qu’il ne collecte pas les données de ses clients. Mais des accords peuvent être conclus entre Google et ses clients, [permettant des exceptions](https://cloud.google.com/terms/data-processing-addendum). J’ai indiqué à Coop que j’étais au courant de leur utilisation de Google Cloud et leur ai demandé si le géant américain pouvait accéder à des données du détaillant suisse. Réponse: *«Non, Google n’est pas autorisé à utiliser nos données à des fins propres»*.

La déclaration de protection des données de Coop indique quant à elle, à propos des tiers à qui elle transmet des informations personnelles, qu’ils peuvent «*traiter dans leur propre intérêt légitime (p.ex. pour une évaluation statistique ou un décompte) les données relatives à l'utilisation de leurs prestations et d'autres données recueillies dans le cadre de l'utilisation de leur service*». Impossible de savoir, en l’absence de précision de la part de l’entreprise, si cela concerne aussi Google.

Ce qui est sûr, c’est que cette centralisation des données a permis à Coop de renforcer ses capacités d’analyse, comme en témoigne un article intitulé «Coop et Migros vendent des données sur leurs clients à l’industrie» publié par [la ](https://www.nzz.ch/nzz-am-sonntag/coop-und-migros-verkaufen-kundendaten-an-die-markenindustrie-ld.1758801)*[NZZ am Sonntag](https://www.nzz.ch/nzz-am-sonntag/coop-und-migros-verkaufen-kundendaten-an-die-markenindustrie-ld.1758801)*[ début octobre 2023](https://www.nzz.ch/nzz-am-sonntag/coop-und-migros-verkaufen-kundendaten-an-die-markenindustrie-ld.1758801). On y apprend que Coop vendrait *«des paquets de données sur la base de milliers de clients anonymisés»* à ses partenaires. Le média alémanique rappelle que les marques sont friandes de telles analyses de données, parce qu’elles ne possèdent pas de canal de vente propre qui leur permet de recueillir des informations sur leur clientèle.

J’ai contacté l’entreprise pour la confronter aux révélations de la *NZZ am Sonntag*. Réponse laconique du service de presse: *«Coop ne vend pas de données personnelles à des prestataires de services. Nos partenaires commerciaux ont la possibilité d'utiliser, contre paiement, des ID publicitaires anonymes pour des campagnes ciblées»*. Un spécialiste de la protection des données rappelle que ces [identifiants publicitaires](https://www.cnil.fr/fr/definition/identifiant-publicitaire) sont exploités par des plateformes comme Google pour transmettre de la publicité aux utilisateurs concernés.

Dans son étude de cas, ce même Google vante les mérites de ses services utilisés par Coop: *«Les données étant regroupées en profils de clients, les campagnes de marketing peuvent répondre aux besoins spécifiques des différents canaux de vente du groupe Coop. Si un client commande de la viande au supermarché en ligne, par exemple, il sera plus susceptible de voir des offres pour des barbecues sur le site web du magasin de bricolage appartenant à Coop»*.

Et d’ajouter plus loin: *«Avec Google Marketing Platform, l’équipe marketing \[de Coop\] relie les informations en ligne et hors ligne, brossant un tableau plus complet du client afin de personnaliser l’expérience d’achat grâce au ciblage comportemental. Lorsqu'un client effectue un achat dans un magasin physique, par exemple, le groupe Coop utilise un système de fidélisation pour le récompenser avec des coupons numériques sur le ticket de caisse. Ce code peut être utilisé en ligne, reliant ainsi les profils en ligne et hors ligne de l'utilisateur»*.

Le géant américain conclut son étude de cas en donnant la parole au responsable de l’analyse numérique de Coop: *«Avec le soutien de Google Cloud, nous serons en mesure d’atteindre n’importe quel client par le bon canal, avec le bon message, à n’importe quel moment»*. Interrogé sur le choix de ce prestataire, le service presse de Coop répond laconiquement: *«La solution de Google nous a convaincus par rapport à des offres comparables»*.

### **Et la publicité**

On ne saurait dissocier le marketing de la publicité. Coop est le principal annonceur de Suisse, [selon le rapport annuel de Media Focus pour 2022](https://mediafocus.ch/fr/publications/tendance-du-marche-publicitaire/werbemarkt-trend-dezember-2022/). Là aussi, les données personnelles représentent une ressource indispensable, surtout en ce qui concerne la publicité diffusée sur des canaux numériques.

La déclaration de protection des données de Coop n’en fait d’ailleurs pas mystère: *«Nous pouvons transmettre à Google, sous forme pseudonymisée et \[chiffrée\] des listes répertoriant les données personnelles de nos clients afin de diffuser des annonces publicitaires personnalisées par l’intermédiaire de ses services. Google procède ensuite à des recoupements de données afin qu’une publicité s’affiche sur le réseau de recherche des personnes qu’elle est parvenue à identifier. Au cours de ce processus, Google n’a pas accès à de nouvelles données personnelles qu’elle pourrait exploiter à ses propres fins»*.

Les mêmes dispositions s’appliquent pour Facebook: *«Nous lui communiquons vos adresses mail sous forme \[chiffrées\] et pseudonymisée (hashing), afin de permettre une comparaison avec la base de données et de sélectionner des utilisateurs ayant le même profil. Au cours de ce processus, Facebook n’a pas accès à de nouvelles adresses mail qu’elle pourrait exploiter à ses propres fins».*

[Des études ont démontré](https://freedom-to-tinker.com/2018/04/09/four-cents-to-deanonymize-companies-reverse-hashed-email-addresses/) que ces mesures de protection ne suffisent pas toujours à empêcher les géants du numérique d'accéder aux informations personnelles censées leur échapper. Ce qui signifie que les données patiemment récoltées par Coop pour mieux connaître ses clients participent à renforcer ces acteurs déjà ultra-dominants.

Jusqu’à quel point l’entreprise a conscience de son rôle de maillon d’une chaîne de la donnée qui la dépasse? Ce qui est sûr, c’est que Coop a un statut particulier: il s’agit d’une société coopérative. Elle n’hésite pas à rappeler qu’elle appartient à ses clients, puisqu’elle compte plus de 2,5 millions de sociétaires. Des clients qu’elle revendique de placer au centre de ses préoccupations. 

Ira-t-elle jusqu’à leur demander s’ils sont d’accord avec sa stratégie en matière de données?

https://www.heidi.news/articles/coop-pour-moi-et-pour-toi-et-surtout-pour-google

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Crise du Proche-Orient : la Suisse et le monde dans un paroxysme de haine et de division

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/3fbbd55f-aa8f-49e8-a5af-2fc66ea3deaf/medium" /><p>La guerre entre Israël et le Hamas a occulté la campagne électorale en Suisse. Alors que ce conflit divise nos sociétés - et la Suisse n&#39;y échappe pas - les candidats aux élections fédérales du 22 octobre se murent dans le silence.</p><p>Dans une semaine, dimanche 22 octobre, les Suisses renouvelleront leur Parlement mais cette fin de campagne électorale est totalement occultée par le massacre de 1&#39;200 civils israéliens par le Hamas, <a href="https://www.heidi.news/monde/israel-et-le-moyen-orient-face-au-risque-d-une-escalade-regionale-majeure" rel="nofollow noopener" target="_blank">le 7 octobre dernier</a>, et l’attente d’une opération terrestre des forces israéliennes dans la bande de Gaza.</p><p><strong>Les échos du conflit en Suisse.</strong> Cette nouvelle crise provoque des bouffées de haine inquiétantes auxquelles la Suisse n’échappe pas, y compris sur les réseaux sociaux où circulent des images insoutenables. De nombreux <a href="https://www.rts.ch/info/regions/geneve/14388184-de-nombreux-tags-antisemites-sur-les-murs-en-ville-de-geneve.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">tags antisémites</a> sont apparus en Ville de Genève, ces derniers jours, et la Municipalité va déposer une plainte pénale. A Bâle, un rassemblement propalestinien a été annulé, vendredi 13 octobre.</p><a href="/articles/crise-du-proche-orient-la-suisse-et-le-monde-dans-un-paroxysme-de-haine-et-de-division">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/crise-du-proche-orient-la-suisse-et-le-monde-dans-un-paroxysme-de-haine-et-de-division

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Données personnelles, le match: qui de Coop ou Migros élude le mieux nos questions?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/f48531d3-78b8-4aa8-bff4-b3c650cb2e0e/medium" /><p>Notre enquête s’est d’abord appelée «Ma vie Cumulus», avant d’opter pour le titre plus général «Razzia sur nos data». On se devait donc de commencer par les deux gloutons de données que sont Coop et Migros, au travers notamment des cartes fidélité. Mais… ce n’est pas une tâche aisée. Avant les deux articles qui leur sont consacrés, voici les coulisses de nos négociations avec les deux géants pour tenter d’obtenir des réponses à nos questions (succès partiel) ainsi que des entretiens avec certains de leurs responsables (échec complet). </p><p>Que font Coop et Migros des données personnelles qu’ils recueillent à tours de bras? Question légitime, que nous nous sommes employés à poser aux deux géants tout au long de notre enquête. S’est alors ouvert malgré nous un improbable concours de langue de bois entre les deux enseignes, qui mérite de passer à la postérité.</p><p>D’emblée, Coop prend l’avantage. Un premier e-mail envoyé par <em>Heidi.news</em> le 27 juin 2023 demande un entretien, propose un reportage et pose des questions précises. Il reste sans réponse. Deuxième essai le 4 juillet. En tout, nous aurons une demi-douzaine d’interlocuteurs différents au sein du département de communication, que par commodité nous appellerons tous «Jason».</p>Voici donc la réponse reçue le lendemain:

*«Merci encore une fois pour votre demande. Nous vous prions de votre compréhension que nous renonçons à une interview dans ce contexte. Donc, nous répondons à vos questions par écrit.»*

Les réponses à l’écrit? Indigentes, et ce n’est que le prénom. Un seul exemple:

*Heidi.news: Quelle est la solution cloud adoptée par la Coop?*

Jason: Coop dispose de diverses solutions informatiques, qu'il s'agisse de solutions cloud ou on-premise. Nous ne communiquons en principe pas de détails à ce sujet.\*

Protestations de notre part. Jason répond trois jours plus tard: *«Si vous nous faites parvenir des questions plus concrètes et le contexte précis de l'article que vous envisagez de publier, nous serons heureux de réexaminer les possibilités d'interview. En tout cas, nous nous ferons un plaisir de prendre à nouveau position sur les aspects que vous avez mentionnés.»*

Les questions précises suivront, bien sûr, et les réponses seront invariablement creuses et sans substance, copiées-collées de communiqués de presse ou de conditions générales. Exemple en date du creux de l’été (à ne pas lire au volant, risque d’endormissement):

*«Coop souhaite répondre de manière ciblée et rapide aux besoins en constante évolution de ses clients et clientes, intégrer rapidement les nouvelles tendances et réaliser des projets de manière efficace. L'approche omnicanal, c'est-à-dire la combinaison du commerce en ligne et du commerce stationnaire, est au cœur de cette stratégie. Dans ce contexte, des thèmes tels que l'e-business et le CRM, l'e-back-office et l'infrastructure informatique sont pertinents. (...) En janvier 2023, Coop s'est en outre orientée de manière encore plus conséquente vers les défis de la numérisation et a créé la Direction "Digital & Customer".»*

### **L’autre géant orange entre en lice**

Par contraste, Migros se distingue, au moins sur la forme, par une touche humaine. Première réponse le 4 juillet du porte-parole pour la Suisse romande, Tristan Cerf:

*«Bonjour Monsieur Barbey - Merci de votre message. Malheureusement, je ne trouve votre demande originale nulle part chez nous. C'est une bonne chose que vous l'ayez envoyée à nouveau. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions. Puis-je vous demander jusqu'à quand vous aimeriez avoir un retour ?»*

Le lendemain:

*«Monsieur, Merci encore pour votre demande et votre intérêt pour Migros. Les entretiens personnels ne sont malheureusement pas possibles en raison de ressources et de capacités limitées. Nous vous demandons de bien vouloir nous envoyer vos questions par écrit. Le service de presse peut ainsi vérifier de manière optimale comment nous pouvons vous aider dans vos recherches. Nous sommes à votre disposition avec nos services.»*

*Heidi.news* répartit alors le travail: Grégoire Barbey, pilote de l’enquête, s’occupera de Coop tandis que Leila Ueberschlag, journaliste indépendante, se chargera de Migros. Elle reçoit ceci, le 27 juillet:

*«Chère Madame, (...) vraisemblablement, votre message s’est perdu. Je l’ai retrouvé. Je vous prie de nous excuser, j’étais* \[absent\] *et mes collègues étaient occupés avec la présentation aux médias de la création de Supermarkt AG. (...) Pouvez-vous m’appeler afin de clarifier la question des délais, le cadre et vos envies précises (techniques, contenu, etc)?»*

Le lendemain encore:

*«On est juste deux pour toute la Suisse et beaucoup de médias cherchent des sujets avec un désespoir perceptible, tout en fixant des délais surréalistes.»*

### **ChatGPT, sors de ce Coop**

Cette dernière phrase était ponctuée d’un smiley clin d’œil. Pendant que Migros pêche par convivialité, Coop maintient son avantage en assénant des réponses qui pourraient toutes avoir été écrites par ChatGPT:

Grégoire: *Coop achète des informations vendues par des professionnels des listes d'adresse. Qui sont ces prestataires?*

Jason: *Nous vous prions de votre compréhension que nous ne citons pas nos fournisseurs concrets. La loi sur la protection des données est en tout cas respectée.*

Grégoire: *Quels sont les moyens techniques employés pour anonymiser les données lorsqu'un client quitte le programme Supercard?*

Jason: *Par principe, les moyens techniques disponibles dans le cadre de la gestion de la relation client sont utilisés.*

Grégoire: *Est-ce que Coop crée des «shadow profiles» pour les clients qui effectuent des achats en ligne, mais ne sont pas affiliés au programme Supercard?*

Jason: *Vous trouverez tous les détails concernant le profilage au chiffre 13 de notre déclaration de protection des données.*

Grégoire: *Quels sont les moyens techniques utilisés pour «analyser les comportements et émettre des hypothèses sur les intérêts et les préférences»?*

Jason: *Vous trouverez tous les détails concernant le profilage au chiffre 13 de notre déclaration de protection des données. Des méthodes d'apprentissage automatique courantes, comme les algorithmes de clustering, sont utilisées.*

Le 16 août, Jason se défend, laissant percer une pointe d’agacement tout en restant solide sur les fondamentaux:

*«En ce qui concerne vos questions, nous vous renvoyons à nouveau à notre déclaration de protection des données. Vous y trouverez les indications correspondantes. Par rapport à notre décision de ne pas faire un interview, nous tenons à préciser que nous avons toujours répondu à toutes vos questions et expliqué notre manière de procéder ou renvoyé aux informations correspondantes dans notre déclaration de protection des données. Ces informations ont \[été\] présentées de manière transparente et peuvent être consultées dans notre déclaration de protection des données. Nous vous prions donc d'accepter notre décision de prendre position par écrit.»*

### **Une remontada de la Migros?**

On croyait le match plié, à ce stade. D’autant que Migros se laisse aller à fendre l’armure. Le 3 août, le premier employeur privé de Suisse envoie à *Heidi.news* 23 réponses sur les 24 questions posées. Un véritable effort de rédaction et de synthèse, avec des précisions intéressantes, dont la quintessence figurera dans l’article de cette Exploration dédié à la Migros *(bientôt en ligne)*.

Certaines réponses, néanmoins, laissent entrevoir un bon potentiel de langue de bois. Il y a des déclarations très générales, comme:

*«Migros a toujours accordé de l'importance au traitement responsable des données des clients. Nous réalisons continuellement des adaptations pour encore mieux protéger les données à caractère personnel de nos clients. Le traitement responsable des données à caractère personnel est également ancré dans le code de conduite de Migros et son respect est assuré systématiquement dans l'ensemble du groupe.»*

Au-delà du renvoi constant à la politique de protection des données, évidemment [disponible sur le site de Migros](https://privacy.migros.ch/fr.html), on notera aussi quelques belles esquives:

Question: *Dans sa déclaration de protection des données, Migros indique les principales catégories de données traitées, en mentionnant que d’autres types de données personnelles peuvent être traitées. De quel type de données s’agit-il (liste complète)?*

Réponse: *Actuellement, il n'y a pas de données personnelles qui ne peuvent pas être attribuées à une catégorie actuelle. Nous suivons de près les évolutions des modes de consommation et cette clause nous permettrait d’adapter les catégories en fonction de ces évolutions, mais ceci n’exercerait aucune influence sur le service à la clientèle ou le traitement des données.*

Le 8 août, à la suite de demandes répétées d’interview pour détailler le sujet, le porte-parole de Migros s’excuse, tout en marquant un point décisif:

*«C’est aussi le* learning *de toute l’affaire: pour l’instant, il ne m’est pas possible de vous proposer une interlocutrice pour une discussion de fonds. D’abord car c’est les vacances et que j’ai eu une peine folle à atteindre tout le monde (...) et aussi car la responsabilité en la matière est partagée entre le Marketing (MGB-Cumulus/migros.ch), l’IT et le service juridique. Cette structure à trois pouvoirs, entre trois départements distincts de la direction générale, permet un contrôle fiable du suivi des règles dans le cadre de l’utilisation à fins commerciales d’une technologie en constante évolution.»*

Le 14 août, Leila insiste:

*«De manière générale,* \[vos\] *réponses* \[du 3 août\] *reprennent souvent vos conditions générales ainsi que votre déclaration de protection des données (quand il ne s’agit pas d’un simple copié-collé), que nous avons déjà lu en détail avant de vous contacter. Notre démarche vise à obtenir des informations supplémentaires afin de pouvoir donner à nos lectrices et lecteurs, ainsi qu’à la population suisse, une meilleure compréhension de ces conditions générales et de la protection des données opérée par Migros, au travers d’exemple concrets, ainsi que sa stratégie globale de numérisation.*

*C’est dans cette optique que nous aurions souhaité pouvoir rencontrer les différents spécialistes en la matière chez Migros et visiter les locaux où sont traitées les données et nous trouvons fort regrettable que la raison pour laquelle nous ne puissions pas avoir une discussion de fond avec l’un (ou plusieurs) de vos spécialistes est due à la nature de votre organisation interne.»*

Le porte-parole de Migros ne se démonte pas, faisant preuve d’une certaine inventivité. Le 18 août, il écrit:

*«Votre intérêt et votre insistance sont louables. Voyons les choses autrement. Le fait que mes réponses ressemblent beaucoup à tout ce que nous publions en ligne montre que nous sommes transparents et que la majeure partie des questions que se pose notre clientèle peuvent trouver réponse en ligne. En rencontrant un membre de notre service juridique, je crains qu’il ne vous donne ni plus ni moins que moi.»*

Dix jours plus tard, en réponse à une nouvelle demande de rencontre:

*«Je comprends votre insistance, mais vous pouvez me poser encore cinq fois la même question, la réponse sera la même. (...) Comme mes réponses sont fidèles aux infos qu'ils m'ont données, nos juristes ne vont pas vous en dire plus, que vous les rencontriez physiquement ou pas. Ce sont des juristes, ils ne disent rien à la légère, mais n'en disent pas plus non plus. Il n'y a pas de mauvaise volonté là-derrière, juste un peu de pragmatisme.»*

### Le refus est réel

Migros s’est embrouillée dans les adresses e-mail et a répondu à Grégoire au lieu de Leila, en raison *«d’un système de tickets»* qui devrait *«changer dans six mois»*. Grégoire en profite pour appuyer le 28 août les demandes répétées de Leila, en prenant le géant orange dans le sens du poil:

*«Migros a fait le choix d'appliquer le Règlement général européen sur la protection des données (RGPD) à ses clients suisses également. L'entreprise aurait pu choisir de se contenter d'appliquer la loi suisse, comme l'ont fait d'autres concurrents. Ce faisant, Migros a réduit sa capacité à exploiter les données de ses clients, parce que le RGPD est plus restrictif. Voilà un excellent sujet, parmi d'autres, que nous aurions aimé aborder lors d'une interview. Parce qu'il y a la loi et il y a l'éthique, et en ce sens Migros fait plutôt figure d'exception dans le domaine des données.»*

Leila précise de son côté que son ambition n’est pas de rencontrer des juristes de Migros, mais les personnes responsables de la stratégie de numérisation du groupe, du programme de fidélité Cumulus et de la protection des données.

Réponse de Migros aux deux, le 29 août:

*«Naturellement, vous ne dites que la vérité si vous indiquez que Migros n'a pas été "en mesure" de vous offrir un entretien physique avec une interlocutrice ou un interlocuteur. "N'a pas souhaité" serait inexact, car c'était bel et bien le souhait de votre interlocuteur et de beaucoup de mes collègues. Sachez que je suis le premier désolé de cette situation, mais aussi le premier à savoir qu’une réponse écrite a la même valeur qu’une réponse orale.»*

Le lendemain, le porte-parole semble inquiet de la façon dont seront interprétées ses réponses. Il tient donc à apporter plusieurs précisions, sur les délais de réaction ainsi que sur la demande répétée d’interviews.

*«Le refus de vous organiser une rencontre est réel, écrit-il, et je n'ai pas de problème à ce que vous le signaliez, mais il a une raison, celle de la réponse finale.»*

Sa conclusion laisse perplexe: *«Pour le reste, qui je l'avoue peut paraître chaotique, j'accepte que m'en teniez personnellement responsable, mais pas les personnes qui m'ont finalement fourni une réponse claire et définitive, quand bien-même ne vous conviendrait-elle pas.»*

### **En attendant Godot**

Pendant ce temps, du côté de Coop, c’est le silence. Plusieurs mails de *Heidi.news* en août et septembre resteront sans réponse. Grégoire joue son va-tout et interpelle l’ancienne conseillère fédérale Doris Leuthard, [qui lui avait accordé une interview](https://www.heidi.news/cyber/doris-leuthard-je-prefere-que-ce-soit-swisscom-qui-ait-mes-donnees-plutot-que-google) dans la phase de préparation de l’enquête.

*«Chère Madame (...) je vous écris en votre qualité de membre du conseil d'administration de Coop. J'ai contacté Coop pour solliciter des interviews et un reportage* \[sur les données personnelles\], *ce qui a été refusé à plusieurs reprises. Les réponses à mes questions se limitent à me renvoyer à la déclaration de protection des données, ce qui n'est pas suffisant.*

*Dans notre échange, vous aviez fait part de votre attachement à la transparence. J'apprécierais si vous pouviez prendre contact avec Coop pour leur suggérer de coopérer davantage. (...)*

*Vous présidez aussi la Swiss Digital Initiative, qui a placé la confiance numérique au centre de ses préoccupations. Jouer le jeu de la transparence en matière de protection des données au moment où la nouvelle loi va entrer en vigueur* \[le 1er septembre\] *me semble être une manière constructive de participer à construire cette confiance indispensable.»*

Doris Leuthard n’a jamais répondu à ce message.

### **Deus ex machina**

Le 1er octobre, un article de la *NZZ am Sonntag* secoue les deux géants suisses. Le dominical alémanique [affirme que Coop et Migros vendent leur trésor d'informations](https://www.nzz.ch/nzz-am-sonntag/coop-und-migros-verkaufen-kundendaten-an-die-markenindustrie-ld.1758801?reduced=true) issues des programmes Supercard et Cumulus à des marques, qui les paient cher.

Grégoire en profite pour les relancer. Il écrit à nouveau à Jason, avec les mêmes questions.

Grégoire: *Coop dispose-t-elle d'une base de données centralisée?*

Jason: *Bonjour Monsieur Barbey. Merci pour votre nouvelle demande. C'est volontiers que nous répondons à vos questions comme suit. Oui, Coop a rassemblé les informations dans un entrepôt de données.*

Grégoire: *Quelles sont les données que Coop vend à des prestataires?*

Jason: *Coop ne vend pas de données personnelles à des prestataires de services. Nos partenaires commerciaux ont la possibilité d'utiliser, contre paiement, des ID publicitaires anonymes pour des campagnes ciblées. Le traitement des données que vous mentionnez est [décrit au point 10.2, avant-dernier paragraphe de la déclaration de protection des données](https://www.coop.ch/fr/entreprise/protection-des-donnees.html). Veuillez également tenir compte de [l'article 10 des conditions générales de Supercard](https://www.supercard.ch/fr/la-supercard/cgv.html).*

Grégoire: *Pouvez-vous me décrire l'utilisation que Coop fait de BigQuery pour tout ce qui a trait aux données clients?*

Jason: *Nous utilisons la Big Query comme plate-forme de stockage. Les données y sont stockées de manière structurée. Des évaluations standardisées sont à notre disposition*.

Nous engageons la même démarche côté Migros, où l’on sent soudain qu’une ouverture est possible. Espérons que cet article ne la découragera pas! 

En tout état de cause, face à cet adversaire implacable qu’est Coop, Migros perd haut la main le match de langue de bois. Mais alors, à qui la coupe?

https://www.heidi.news/articles/donnees-personnelles-le-match-qui-de-coop-ou-migros-elude-le-mieux-nos-questions

#Presse #heidi #Suisse 
 Heidi.news

«Razzia sur nos data»: comment nos entreprises servent la soupe à Google et Facebook

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/1a826906-e6d9-4539-8a7a-71b5d0c314ff/medium" /><p>Migros, Coop, Swisscom... Les entreprises suisses qui collectent des données personnelles ont l&#39;obligation de déclarer ce qu&#39;elles en font. Mais en pratique, il est très difficile de savoir ce que deviennent ces informations, comment elles sont traitées et à qui elles profitent. C&#39;est le sujet de notre nouvelle Exploration «Razzia sur nos data», lancée grâce à un financement participatif (merci!). </p><p>Récemment, je discutais avec un copain de vélo, une passion commune. Au fil de la conversation, je lui confie vouloir changer de chaussures de cyclisme. Quelque temps  après cet échange, mon fil d’actualité Facebook affiche une publicité pour la boutique en ligne Galaxus. L’objet en question: une paire de chaussures de cyclisme flambant neuves...</p><p>Etrange phénomène, qui ne vous est sûrement pas étranger. Cette-fois c’est sûr, mon smartphone écoute mes conversations!, vous dites-vous peut-être. A tout le moins, un doute s’installe. Justifié?</p>La réponse est non. Plusieurs études scientifiques –[ dont l’une de 2018](https://recon.meddle.mobi/papers/panoptispy18pets.pdf) – ont analysé les flux de données qui sortent de nos appareils, et les résultats convergent: il n’y a vraisemblablement pas d’extraction massive de données vocales.

C’est la bonne nouvelle. La mauvaise, c’est que les entreprises n’ont pas besoin de nous écouter pour tout savoir de nous. Nous leur donnons malgré nous beaucoup d’informations au quotidien. Et ce n’est pas franchement plus rassurant.

### La puissance insoupçonnée des données

Lorsque nous surfons sur le web, de petits logiciels espions appelés *cookies* enregistrent nos moindres faits et gestes. Des sites que nous consultons à nos interactions sur les réseaux sociaux (likes, commentaires, tags…) –, et parfois même les mots que nous tapons au clavier, tout ou presque peut être conservé. Il en va de même avec les applications que nous utilisons, certaines pouvant même accéder à notre localisation, à nos contacts et à nos photos.

Prises individuellement, ces informations n’ont pas beaucoup de valeur. Mais c’est justement parce qu’elles sont constamment croisées avec d’autres données qu’elles deviennent si intéressantes pour les entreprises adeptes de profilage. A force d’observer mes habitudes, on peut déduire toujours plus d’éléments me concernant, comme ma catégorie de revenus, mon profil psychologique, mes problèmes de santé... A peu près tout, en fait.

Malheureusement, les ressources qui permettent de savoir ce que les entreprises savent de moi sont limitées, comme nous le verrons au fil de cette enquête. La relation avec les consommateurs est profondément asymétrique.

### En Suisse aussi

Bien souvent, ce sont les noms des géants du secteur technologique qui sont évoqués lorsque le sujet des données personnelles est abordé. Ce n’est pas par hasard: ce sont les acteurs qui en amassent le plus, parce que leurs services se sont imposés dans le monde entier, ou presque. Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft… Les fameux «Gafam». 

Mais ils ne sont pas seuls à s’intéresser à nos informations intimes. Coop, Migros, les CFF, La Poste, Swisscom… en Suisse aussi, ces enseignes qui nous semblent si familières ont compris à quel point les données peuvent s’avérer utiles pour leurs affaires.

La collecte et l’exploitation des données est un enjeu commercial majeur. Mais cette activité est encadrée par des règles qui visent à protéger les individus. En Suisse, la nouvelle loi sur la protection des données est entrée en vigueur au 1er septembre 2023. Les entreprises sont donc confrontées à deux impératifs contradictoires: amasser des données et les valoriser, tout en observant une certaine retenue pour rester dans la légalité.

Ce business reste malgré tout opaque. Les déclarations de protection des données, qui accompagnent désormais sites, applications et autres services en ligne, permettent de glaner quelques informations sur la collecte et le traitement effectués par les entreprises, mais elles ne révèlent jamais ce que ces enseignes savent vraiment de leurs clients. Les demandes d’accès ne renseignent pas davantage les rares personnes qui se lancent dans ces démarches fastidieuses.

Le citoyen n’a donc d’autre choix que de faire confiance. Est-elle méritée?

Que fait Migros avec les millions de paniers d’achat qu’elle enregistre chaque année sur des serveurs dans le cadre de son programme de fidélité Cumulus? Et la Coop avec sa Supercard? Quelles informations déduisent-elles de leurs clients sur la base de leurs habitudes de consommation? Quelles sont les données que La Poste transmet aux autres entreprises? Les CFF cherchent-ils à épier nos faits et gestes? Et quel rôle Swisscom joue-t-il au cœur de nos communications numériques?

### «Razzia sur nos data» 

C’est pour répondre à ces questions que *Heidi.news* a proposé à ses lecteurs de participer au financement de l’enquête «Razzia sur nos data» (dont le titre provisoire à l’époque était «Ma vie Cumulus»). Au fil des épisodes, nous vous ferons voyager au cœur de cette nouvelle économie numérique. Certaines de nos interrogations sont restées sans réponse de la part des entreprises. Libre à chacun d’y voir des signes de malaise.

Nous sommes convaincus que la transparence dans la collecte et l’exploitation des données personnelles est autant dans l’intérêt des individus que des entreprises. La confiance n’est jamais acquise, il faut sans cesse s’en montrer digne pour la conserver. Certains justifient le business des données en affirmant qu’ils n’ont rien à cacher. Prenons-les au mot. S’ils n’ont rien à cacher, pourquoi refuser de nous expliquer précisément ce qu’ils font?

Certaines portes se sont ouvertes à force d’insistance. D’autres sont restées fermées, mais nous n’avons pas hésité à regarder par la fenêtre. Une chose est sûre, après avoir lu cette enquête, vous ne verrez plus vos interactions numériques de la même manière.

https://www.heidi.news/articles/razzia-sur-nos-data-comment-nos-entreprises-servent-la-soupe-a-google-et-facebook

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Immobilier et passeports: les bonnes affaires des oligarques de la Dominique

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/260b8faf-8b2a-4f11-9a4a-b0ab3af60a7a/medium" /><p>Pour quelques hommes d&#39;affaires de Dominique proche du pouvoir, la vente de passeport fonctionne comme une rente. Ils empochent des commissions sur chaque passeport et sont nommés responsables des programmes immobiliers sur l&#39;île financés par le programme public. Une agence zurichoise alimente le système, dominé par le premier ministre. Le bilan est maigre: malgré les milliards que génèrent ces passeports, 28,8% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.</p><p>Vue à couper le souffle, bungalow de rêve, piscine à débordement, l’hôtel Secret Bay n’a pas volé ses cinq étoiles. Ici, le client est roi. Comble du chic pour la clientèle internationale, la directrice de l’établissement est une Zurichoise, parfaitement polyglotte. Si l’hôtel de luxe a pignon sur rue, l’autre <em>success story</em> helvète en Dominique, une île des Caraïbes sans aucun lien historique avec la Suisse, est beaucoup plus discrète.</p><p>Créé dans les années 1990, Henley and Partners est un cabinet d&#39;affaires zurichois spécialisé dans le droit de la nationalité. Avec une quarantaine de bureaux clinquants dans le monde, l’influente société fait profil bas à Roseau, la capitale de l’île Etat. Aucune plaque, ni même adresse officielle. Pourtant, <a href="https://www.henleyglobal.com/citizenship-investment/dominica" rel="nofollow noopener" target="_blank">sur son site internet</a>, une page est dédiée aux programmes d’investissements dans le pays. Le cabinet y liste les <em>«avantages»:</em> outre le délai record de 3 mois et le montant de 100’000 dollars, on y lit qu’en Dominique, il y a la <em>«possibilité d’inclure une femme, un enfant non marié de moins de 31 ans dépendant»</em> mais aussi <em>«les parents et grands-parents agé de 65 ans et plus»</em>. Les prix sont dégressifs: 50’000 pour une épouse, et seulement 25 000 dollars de plus pour ajouter jusqu’à trois enfants (ou personne dépendante).</p><a href="/articles/immobilier-et-passeports-les-bonnes-affaires-des-oligarques-de-la-dominique">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/immobilier-et-passeports-les-bonnes-affaires-des-oligarques-de-la-dominique

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Dans le «dernier kolkhoze» de Russie, le triomphe de l’oligarque de la saucisse

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/b22212df-021c-47f0-8590-435e3278c779/medium" /><p>Dans le district de Zvenigovski, entre Nijni-Novgorod et Kazan, se trouve un complexe agro-industriel géant d&#39;un genre atypique. L&#39;oligarque communiste à sa tête le présente comme le «dernier kolkhoze» de Russie, capitalisant sur l&#39;ardente nostalgie soviétique..</p><p>Sans cette gigantesque affiche électorale placée sur l’un des rares carrefours de la steppe, où un certain Sergueï Kazankov apparaît au côté de Staline, j’allais rater une résurgence de l&#39;Union soviétique digne des plus grands films de propagande. Au prix d’une recherche internet (protégée par un VPN, on ne sait jamais), je découvre que ce candidat a été réélu à la Douma de Moscou en 2021 dans les rangs du Parti communiste, qu&#39;il a 53 ans, qu&#39;il figure sur la liste des politiciens sanctionnés pour avoir soutenu l&#39;invasion... et qu&#39;il n&#39;est pas le seul Kazankov dans ce cas de figure.</p><p>Car Sergueï est le fils d&#39;Ivan Ivanovitch Kazankov, ancienne figure de proue du parti communiste à la Douma dans les années 1990 et bras droit de l’inamovible camarade secrétaire général Guennadi Ziouganov. Si Sergueï a été directeur du Combinat agro-industriel de Zvenigovski, son père Ivan en a été tour à tour directeur, PDG et président pendant une quarantaine d&#39;années. Un oligarque de la saucisse, qui règne en maître sur le «dernier kolkhoze» de Russie: une usine géante de transformation de viande qui fleure bon le temps des Soviets.</p>Je suis à peu près à mi-parcours de mon périple le long de la Volga, sur la rive orientale, dans la république ethnique des Maris. Le district de Zvenigovsky, qui donne son nom au combinat, est à une centaine de kilomètres de Kazan, capitale du Tatarstan.

### **Sous le regard de Staline**

Pour trouver le complexe, il suffit de faire un détour, de traverser un champ de tournesols, de demander son chemin à la station-service (*«après le virage là-bas, à la statue de Marx, vous y êtes presque»*). Je me retrouve dans ce qui, à première vue, ressemble à une reconstitution pour nostalgiques du plan quinquennal, à l’instar de ces forts élevés dans les prairies du Montana pour commémorer la bataille de Little Big Horn. Sur le bâtiment d’un blanc laiteux flotte, gonflé par le vent de la steppe, un drapeau géant aux couleurs de l'URSS. Il fait la même taille que celui qui a été descendu du sommet du Kremlin le 25 décembre 1991, signant de la fin de l’ère soviétique.

Sur les murs de l’installation de 18’000 mètres carrés courent des inscriptions en lettres rouges, couronnées du point d'exclamation cher aux Bolcheviks: *«Honneur et gloire aux ouvriers du combinat de Zvenigovski!»*, *«Camarades, luttons pour le village, luttons pour la Russie!»*, *«Contre le fascisme, maintenant et à jamais!»*… L'allée menant aux usines est occupée par une galerie de trente portraits. Ce sont les stakhanovistes de l’année 2022: Ivanovna Lydia Vassilieva, sacrée meilleure empaqueteuse de saucisses, Nikolaï Barissevitch Zinoviev, meilleur conducteur de tracteur, Nikolaï Barissevitch Vassilievitch, meilleur agronome de l'année, avec sa moustache et son tee-shirt Nike...

Des fourgonnettes frappées de la faucille et du marteau sortent de l'enceinte sous le regard suffisant de Staline. En tunique d'ouvrier et pantalon rentré dans les bottes, la statue argentée salue avec bonhomie depuis son piédestal à quatre degrés. Un peu à l'écart, Lénine, la main dans son veston tel Napoléon, l'observe en fronçant les sourcils. Son piédestal, de deux degrés seulement, est à moitié caché derrière un bouleau. Une enseigne «URSS» domine l'entrée du bâtiment de la direction, solide édifice de style moderniste. A l’entrée, deux gorilles en tenue de camouflage montent la garde.

Je m'apprête à visiter l'une des entreprises agroalimentaires les plus prospères de Russie, qui place 150 tonnes de produits sur le marché chaque jour. Depuis sa refondation en 1995, le combinat de Zvenigovski a fait du communisme – période stalinienne – sa marque de fabrique. Qu’importe que l’URSS ait été déjà morte et enterrée depuis presque un lustre.

### **L’oligarque de la saucisse**

Le camarade président Ivan Kazankov a 80 ans et un regard gris de loup. Ce grand costaud parle en caressant l’épaisse cravate rouge qui lui court sur le ventre. Je m’attendais à de la méfiance, mais il manifeste d'emblée de la curiosité pour mon étrange visite inopinée. On devine qu'il est un vrai patron qui ne rend de comptes à personne, le souverain absolu de ce Stalingrad agraire, empire rural au bord de la Volga, étrangement inspiré par le plus grand exterminateur de paysans de l'histoire.

Son bureau semble conçu pour dérouter quiconque s’intéresse à la Russie de 2023: les bustes du petit père des peuples coexistent avec des icônes orthodoxes, le portrait de Nicolas II surplombe des maquettes de Soyouz, la photo de Vladimir Poutine côtoie celle de Saint-André, patron de toutes les Russies. Ce panthéon chaotique s’accorde bien avec l'opacité qui règne autour du combinat, que l'on me présente d’abord comme *«une coopérative agricole d'État, comme au temps de l'URSS»*.

Il s’avère qu’il s’agit plutôt d’une holding familiale tout ce qu’il y a de privée. Quand son fils est entré à la Douma, le camarade Ivan a choisi d’introniser sa fille comme PDG. *«Ce qui compte, c'est que cela fonctionne comme avant, c'est une entreprise communiste et anticapitaliste. Les bénéfices sont utilisés pour augmenter les salaires des quatre mille employés et pour développer l'entreprise»*, rétorque le maître des lieux sans sourciller.

A Kazan, on me racontera la vraie histoire. Lors du grand hold-up des années 1990 en Russie, les escrocs (*raketi*) les moins scrupuleux se sont partagé le pétrole, les restes de l’industrie soviétique ou même le stock d’ogives nucléaires… Ivan Ivanovitch Kazankov, fils de paysans tchouvaches devenu député à la Douma fédérale, s’est contenté de mettre la main sur un kolkhoze délabré, perdu entre quelques *isbas* dans la steppe.

Celui qui deviendra l'oligarque de la saucisse sait à quel point le collectivisme d'État est toujours présent dans le cœur du consommateur russe. Avec sagacité, il transforme le combinat socialiste de Zvenigovski en Zvenigovsky Ltd, géant industriel adapté au marché post-soviétique sauvage, sans oublier de faire fonds sur la nostalgie soviétique.

Des rumeurs circulent sur la fortune de Kazankov, qui semble avoir énormément augmenté à la faveur de la guerre avec l’Ukraine. Au point de [figurer sur la liste noire](https://sanctions.nazk.gov.ua/en/sanction-person/21708/) de l'organisation ukrainienne War & Sanctions, qui fournit aux gouvernements occidentaux des noms de Russes à sanctionner. Quant à l’intéressé, il dit adorer ce patriotisme économique imposé par l’Ouest. *«Je suis un formidable outil de développement pour la Russie. L'Occident aurait dû nous les imposer dans les années 1990, aujourd'hui nous serions la locomotive du monde, dommage.»*

### **Mercedes, casquette et vaches communistes**

Pour donner une idée du caractère stimulant des sanctions, Kazankov se vante d’avoir copié à la perfection les *«moyens de production»* italiens, allemands et israéliens. *«Nous avons doublé les lignes de production en un an, et nous fournissons désormais près de mille supermarchés en Russie.»* Il assure que son *«entreprise communiste à cycle complet»* est le modèle à suivre pour *«construire une nouvelle Union soviétique, avec des aliments sains et locaux provenant de notre terre»*.

Bonne pâte, Kazankov me propose de l'accompagner pour visiter la dernière méga-usine, à une vingtaine de kilomètres de là, où ont été reproduites à l’identique des installations de traite israéliennes. Les troupeaux paissent dans de grandes clairières bien équarries, manifestement gagnées sur la forêt voisine. Nous voyageons dans sa Mercedes blindée flambant neuve avec chauffer. Le compteur marque 3000 kilomètres – sans doute la distance qu’il lui a fallu pour voyager depuis le Kirghizstan, la principale route de contrebande pour les produits allemands.

L’oligarque communiste porte une casquette de base-ball rouge, brodée du sigle de l’URSS sur le front et du logo de la faucille et du marteau sur les tempes. Il dit qu'il envisage de faire marquer ses vaches de la même manière – difficile de savoir s'il plaisante. *«Nous cultivons du fourrage et des céréales sur 70’000 hectares»*, explique-t-il en admirant son royaume derrière la vitre teintée. 

> *«Nous élevons des vaches laitières et des porcs et allons jusqu'à l'emballage du produit fini, qu’il s’agisse de viande, de fromage, ou de kéfir. Nous faisons même de la glace, aussi bonne que celle de mon enfance. Gorbatchev et Eltsine ont ruiné même les glaces, ces lâches.»*

Il raconte qu'à l'époque de l'URSS, le kolkhoze élevait 600 porcs et produisait 1800 tonnes de viande par an. Aujourd'hui, il compte 220’000 porcs pour une production de 60’000 tonnes.

### **Provisions de guerre**

Je l'interroge sur la guerre avec l’Ukraine. *«Bien sûr que nous allons gagner, dit-il, parce que nous savons comment nous battre et parce que nous ne pouvons pas perdre.* 

> *S'il le faut, nous utiliserons des armes nucléaires, nous détruirons la Terre, nous détruirons tout, putain.»*

En attendant, la guerre, pour le camarade magnat, c'est une montagne de roubles. *«La production de fromage a augmenté de 80 %, nous avons remplacé les fromages français et italiens. Nous continuons à acheter des vaches, nous en sommes à 120 000 frisonnes.»* A notre arrivée dans l’étable, pas une mouche ne vole. Les ouvriers enfourchent sans lever les yeux, et même les vaches meuglent à voix basse. *«Nous les trayons trois fois par jour, comme aux Pays-Bas.»*

Puis il soupire, dit que ce n'était pas facile, qu'il a fallu des années de lutte pour accéder au pouvoir dans cette république du centre de la Volga. *«Leonid Markelov, le président précédent, a essayé de m'arrêter, j'ai subi deux attentats. J'ai même subi un attentat à la voiture piégée. Puis ce bandit a été arrêté pour corruption, ils ont tout saisi, des villas, 16 voitures et une caisse de lingots d'or. Il va passer 13 ans dans une colonie pénitentiaire.»*

J’apprends enfin comment ces étranges pâturages ont vu le jour. En 2017, Ivan Kazankov a été condamné pour *«déforestation à grande échelle dans le but de s'emparer illégalement de nouveaux terrains de pâturage»*. Il était alors député communiste à la Douma locale, a perdu son immunité parlementaire et son siège, sur décision du même procureur qui avait condamné Markelov. 

Je me dis que cette forêt dévastée, c'est son petit Donbass à lui. Mais je me garde bien de le lui dire.

La Russie est rapidement devenue un monde lointain, mystérieux et hostile. Des personnages comme l'oligarque Ivan Kazankov, perdu dans la province reculée, donnent l'idée de la distance. Et de la menace. La Russie regarde en arrière, nourrit la mythologie de la grandeur en s'accrochant au passé, même le plus tragique. Elle se prépare à résister et à souffrir – ce qu'elle a toujours fait de mieux –, se résignant à un avenir d'isolement, d'autarcie et peut-être d'autodestruction.

Sous les yeux de Staline, toujours.

https://www.heidi.news/articles/dans-le-dernier-kolkhoze-de-russie-le-triomphe-de-l-oligarque-de-la-saucisse

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Pourquoi j’ai descendu la Volga à la recherche de la Russie profonde

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/98b92aff-94e0-49f2-9845-515596986c30/medium" /><p>Pendant un mois et sur 6000 kilomètres, le journaliste italien Marzio Mian a parcouru la Russie le long de la Volga, de Tver à Astrakhan. Avec une obsession: comprendre où en est le pays après que le régime a décidé de mener la guerre à l&#39;Ukraine.</p><p>En un mois de voyage et sur 6000 kilomètres, de Saint-Pétersbourg à Astrakhan, en passant par Tver, Doubna, Rybinsk, Iaroslav, Nijni-Novgorod, Kazan, Oulianovsk, Samara, Saratov, Volgograd (ex-Stalingrad), je n’ai pas rencontré un seul Occidental. Je n&#39;entends pas d&#39;autre langue que le russe. Voilà qui est inédit. Dans la Russie paranoïaque de Poutine, étouffée par le contrôle du FSB, héritier du sinistre KGB, l&#39;inquiétude naît facilement, parfois la panique. Surtout si vous posez des questions.</p><p>Je descends la Volga, qui est l&#39;axe principal pour tenter de comprendre ce que signifie être russe aujourd&#39;hui, car c&#39;est là que tout a commencé. Là où l&#39;empire des tsars a pris racine, là où Lénine, le père de la révolution, est né, là où l&#39;Union soviétique s&#39;est imposée dans l&#39;histoire après l&#39;immense boucherie de Stalingrad. Le long de la Volga se trouvent de nombreuses villes qui ont déterminé la culture, la foi et l&#39;identité russes.</p>Au pays des grands fleuves, la Volga est *le* fleuve. On l'appelle *Matouchka*, la petite mère de la Russie, qu’elle traverse du nord au sud, de la Baltique aux pays des Tchouvaches, des Tatars, des Kalmouks, des Cosaques, et jusqu’aux rives de la mer Caspienne. C'est là que l'Europe et l'Asie se rencontrent ou se divisent, mur ou pont entre les civilisations, selon que la boussole de l'histoire russe pointe vers l'Est ou vers l'Ouest.

Et maintenant, en ce deuxième été de guerre? L’invasion de l’Ukraine a-t-elle précipité le pays au bord du gouffre, semé les ferments de la discorde, ou mis au jour le vrai visage d’une Russie qu’on réduit trop souvent à ses métropoles? C’est la question à laquelle ce périple vise à répondre.

### **Au musée de l’Ermitage**

*«La Volga était tout, et elle est toujours tout»*, m’assure en tout cas l’historien Mikhaïl Piotrovski, le puissant directeur du musée de l'Ermitage à Saint-Pétersbourg. Avant de commencer le voyage, il m’a reçu dans son modeste bureau au sous-sol du musée, où il s'est taillé un coin au milieu de piles de livres, de paperasses, de bouilloires à thé, de sculptures et de tableaux emballés.

*«La Volga a produit de grands esprits, des écrivains inégalés comme Maxime Gorki, Ivan Gontcharov, le poète Velimir Khlebnikov... Parce qu'elle vous fait aspirer à la grandeur, elle a sa propre intimité, des cieux protecteurs et lumineux, pas comme les espaces illimités de la steppe ou des fleuves sibériens, qui vous donnent l'impression d'être une puce dans le cosmos.*

> *Des idées chocs sont nées sur la Volga. Lénine a changé l'histoire du monde.»*

Piotrovski, 78 ans, est d'origine arménienne, et c’est un éminent islamologue et orientaliste. Je le connais depuis des années, mais jusque-là, nous devisions aimablement du peintre vénitien Canaletto, de Byzance, des grands voyageurs arabes ou de ses chers vins blancs siciliens.

Je le retrouve en pleine exaltation belliqueuse. Je suis convaincu qu'il ne joue pas un rôle: à son âge, il pourrait choisir de se taire et composer, comme la plupart des Russes. Sa voix reste calme, mais il lance des regards fébriles, quelque chose le ronge de l'intérieur.

### **Une civilisation impériale**

Les photos aux murs le montrent avec Poutine et les invités occidentaux de marque que le chef du Kremlin avait l'habitude d'amener à l'Ermitage, quand la Russie était encore en cour auprès de l’Occident. On y voit un Tony Blair souriant, ou Angela Merkel. Mais ce sont désormais des pièces de musée, au même titre que la tapisserie accrochée au mur, offerte par un cheik égyptien à l’impératrice Catherine II la Grande deux siècles et demi plus tôt.

Ce doux intellectuel, dont la veste retombe en plis larges autour des frêles épaules, est devenu un guerrier. *«Il y a beaucoup de peuples, mais une seule nation: la Russie»*, poursuit-il. *«Sur la Volga, la Russie a réussi à intégrer tout le monde. L'islam est une religion de la tradition et de l'identité russes au même titre que le christianisme orthodoxe. En Europe, en Amérique, vous n’avez que le multiculturalisme à la bouche, mais vos villes implosent sous la haine. Nous, sans bavardage, nous incluons tout le monde, parce que nous sommes une civilisation impériale.»*

Et le voici qui cite Staline. *«Je suis Géorgien, de nationalité russe.»* Staline, qui a perpétré les pires massacres et déportations contre les Tatars, les Cosaques, les chrétiens non alignés, les koulaks «ennemis du peuple» dans les villes de la Volga.

*«Regardez l'Ermitage»*, s’enflamme son directeur, en écartant ses bras maigres et en plissant les yeux. *«C'est l'encyclopédie de la culture mondiale, mais elle est écrite en russe parce qu'il s'agit de notre interprétation de l'histoire mondiale. C'est peut-être arrogant, mais c'est ce que nous sommes.»*

### «Les Russes sont comme les Scythes»

Piotrovski fait une pause, inspire profondément. Il s'apprête à évoquer Stalingrad, sa Jérusalem. *«Je ne l'appelle pas Volgograd, mais Stalingrad. Aujourd’hui comme jamais, elle est notre repère, un symbole de résistance sans équivalent dans l'histoire, un cauchemar pour nos ennemis. Pendant la Grande Guerre patriotique* (Deuxième Guerre mondiale, ndlr.)*, la Volga était défendue comme un corridor économique vital pour les approvisionnements Nord-Sud.*

*Il en va de même ces temps-ci: c’est via la Volga et la mer Caspienne que nous commerçons avec l'Iran pour contourner les sanctions, que nous exportons du pétrole vers l'Inde et importons ce dont nous avons besoin.»*

![Mémorial à Stalingrad (0544).jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/2b5827ff-12f7-4ecd-8c64-c768b5042b47/large "L'usine Gerhardt, ruine emblématique de la bataille de Stalingrad, désormais Volgograd. | Alessandro Cosmelli")

Il enlève ses lunettes, les essuie calmement avec un pan de sa veste. *«Stalingrad est un totem et un destin. Si les nazis l'avaient prise, ils auraient coupé la Volga et conquis toute la Russie. C’est une question très matérielle, qui est devenue spirituelle. Et un avertissement. Celui qui le tente finira comme tous les autres, les Suédois, Napoléon, les Allemands et leurs alliés.*

> *Les Russes sont comme les Scythes: ils attendent, ils souffrent, ils meurent et puis ils tuent.»*

Je penserai souvent à ma rencontre avec Piotrovski. Jusqu'à la fin du voyage, je reverrai ses yeux et j'entendrai l'écho de ses paroles. Il n’est pas le genre d’homme à servir malgré lui de porte-voix à la propagande du régime. Ses propos nous disent quelque chose de la Russie.

https://www.heidi.news/articles/pourquoi-j-ai-descendu-la-volga-a-la-recherche-de-la-russie-profonde

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Les futurs horlogers viennent d’investir leur campus flambant neuf à Genève

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/49d96d89-fbd3-4a20-83f5-30b07def6ad7/medium" /><p>Le campus de la fondation ForPro vient d&#39;ouvrir ses portes à Plan-les-Ouates (GE). En cette rentrée 2023, les élèves de l’Ecole d’horlogerie ont eu l&#39;occasion d&#39;étrenner ces nouveaux espaces, conçus pour favoriser l&#39;autonomie et le lien avec l&#39;industrie. L&#39;ambition est claire: donner un coup de fouet à la formation professionnelle au bout du lac.   </p><p>Au cœur de l’Espace Tourbillon, dans la zone industrielle de Plan-les-Ouates (ZIPLO), un <em>«campus pour la formation professionnelle»</em> est en train d’éclore, selon les mots de François Abbé-Decarroux, président de ForPro et directeur général de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO).</p><p>Le bâtiment, de 22&#39;000 m² sur six étages, <a href="https://www.heidi.news/explorations/geneve-une-puissance-industrielle-qui-s-ignore/geneve-construit-un-paradis-pour-apprentis-afin-que-renaisse-la-formation-professionnelle" rel="nofollow noopener" target="_blank">avait déjà fait du bruit dans les médias</a>, avant même le début des travaux. Ce sont désormais les murmures, rires et cris des élèves, le ronronnement des machines et les conseils des enseignants pendant les cours qui le traversent. L’Ecole d’horlogerie de Genève vient d’y prendre ses quartiers à l’avance, sur 8500 mètres carrés, avant la mise en route opérationnelle de la fondation prévue pour septembre 2024.</p>#### **Lire aussi:** [Genève construit un paradis pour apprentis afin que renaisse la formation professionnelle](https://www.heidi.news/explorations/geneve-une-puissance-industrielle-qui-s-ignore/geneve-construit-un-paradis-pour-apprentis-afin-que-renaisse-la-formation-professionnelle)

L’achat et l’aménagement du bâtiment ont coûté 125 millions de francs, payés par la fondation Wilsdorf, propriétaire de Rolex, qui le met à disposition de ForPro en droit de superficie pour 20 ans. L’investissement est à la hauteur de l’enjeu: redonner ses lettres de noblesse à la formation professionnelle à Genève, qui en a bien besoin. *«Orientation, soutien, développement de compétences hors apprentissage, aide au réseautage, à l’entrepreneuriat, nous les accompagnerons sur tout leur parcours»*, soutient François Abbé-Decarroux.

### Un apprentissage plus autonome

Le concept? Les jeunes construisent eux-mêmes leur projet professionnel par l’action, conçoivent, fabriquent des objets dans un *lab*, revisitent la gestuelle d’un métier, expérimentent un stage dans une entreprise partenaire, déterminent les apports dont ils ont besoin pour façonner leur avenir. Le tout en bénéficiant de l’écosystème de Plan-les-Ouates.

A quelques centaines de mètres, le site de Spark (pour *«skills park»*, parc de compétences), porté par la Fédération des entreprises romandes (FER), en collaboration avec le canton, la commune et la Caisse interentreprises de prévoyance professionnelle (CIEPP), suit d’ailleurs une voie similaire. Des cours interentreprises et d’aide à l’orientation, ainsi que des espaces dédiés, sont proposés aux détenteurs de CFC souhaitant se mettre à leur compte.

**<section class=box>L’essor des labs**

<br/>Au mur, les post-it multicolores, schémas de développement des compétences et de possibilités de parcours démontrent que beaucoup de gens ont phosphoré pour concevoir le nouveau campus visant à relancer la formation professionnelle à Genève. La configuration a été mûrie par la fondation ForPro en collaboration avec les futurs utilisateurs, les entreprises, les professionnels intéressés, l’Etat et les partenaires sociaux.

<br/>Des sessions collaboratives rassemblant jusqu’à 100 personnes ont été mises en place en 2021 pour répondre à leurs attentes et faire en sorte que les jeunes découvrent par eux-mêmes, prennent conscience de leurs compétences et effectuent leurs choix de manière autonome au gré des ateliers (constructions de robots, organisation d’évènementiel, réalité virtuelle, élaboration de menus de restaurant…) afin de tricoter un projet.

<br/>De ces réflexions sont nés plusieurs fruits, comme le LearningLab, lieu de vie basé sur l’échange, le mentorat, la transmission des savoirs et compétences pour fournir un soutien scolaire et professionnel. Le MakerLab, lieu de fabrication ouvert 24/24h pour créer, expérimenter, échouer puis recommencer — une centaine de projets pourront y être accueillis en parallèle. Quant au FoodLab, il nourrira les usagers du bâtiment et du quartier, servant 300 à 400 repas par jour et formant une vingtaine de jeunes aux métiers de la restauration.**</section>**

### **Une ouverture à l’industrie**

C’est donc l’Ecole d’horlogerie qui prend les devants. *«La première rentrée a eu lieu début septembre, avec une cinquantaine d’élèves micro-mécaniciens. Les formations à d’autres métiers viendront petit à petit en octobre pour atteindre 300 élèves. L’ensemble sera opérationnel le 6 novembre»*, récapitule Pierre Amstutz, directeur de l'Ecole d'horlogerie de Genève qui s’apprête à fêter ses 200 ans l’année prochaine.

Chaque jour, 200 élèves horlogers seront présents, les auteurs fréquentant le centre de formation professionnelle technique (CFPT) du Petit-Lancy où se dispense encore l’enseignement général.

*«Les premières années vont effectuer leur apprentissage dans un lieu industriel, ce qui est synonyme d’ouverture. Jusqu’à maintenant, ils évoluaient dans leur centre de formation»*, se réjouit Joëlle Mathey, directrice de la Fondation ForPro, qui apprécie l’animation nouvelle sur le site. *«Le rez-de-chaussée aux parois transparentes, rempli de machines et d’élèves, joue désormais le rôle de vitrine»*.

En mai 2024, les entreprises partenaires auront toutes investi les lieux. Et à l’été prochain, les labs seront ouverts et les 150 élèves apprentis présents.

### **La mutation du métier d’horloger**

Le pari de base du bâtiment est celui de la modularité. *«Les usages et pédagogies vont évoluer indépendamment des locaux que nous avons prévus sur le papier»*, anticipe Joëlle Mathey. Message reçu du côté de l’Ecole d’horlogerie. Les responsables de la formation des apprentis chez Rolex, Vacheron Constantin, ou Piaget, ne regardent pas uniquement d’un œil attentif cet emménagement pour la nouvelle proximité avec l’industrie qu’il va induire. Ils s’intéressent aussi à la rupture pédagogique qui ira de pair avec l’investissement de ce nouvel espace *(voir entretien en fin d’article)*, mieux adapté que les locaux du Pont Butin.

![Horlogerie - Photo 2.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/04b83eac-6579-43bc-a33d-85219caa432d/large)

*«Les métiers ne sont pas ceux d’hier, les technologies sont plus sophistiquées et en parallèle l’employé lambda doit détenir plus de compétences transversales. Nous devions enseigner différemment, en multiniveaux»*, explique Pierre Amstutz. Le directeur attend aussi beaucoup des interactions avec l’environnement initié par la fondation ForPro: *«les labs peuvent servir à nos élèves et enseignants qui devraient aussi apporter des compétences, les associations, entreprises, indépendants peuvent être formateurs ou ouvrir des stages, les programmes de suivis d’élèves peuvent combler des lacunes… Les passerelles seront constantes».*

Sans compter les mutualisations et optimisations. *«Nous utiliserons par exemple des salles de cours en journées qui ne seront pas occupées le soir et pourront servir à ForPro sur les heures tardives.»* Enfin, plus prosaïquement, le fait de détenir l’ensemble des machines en un même lieu permettra de renforcer la maintenance préventive plutôt que les interventions curatives. Une vraie fourmilière optimisée, idéale pour basculer dans un troisième siècle d’existence…

**<section class=box> Vers une nouvelle façon de former**

<br/>Trois questions à Pierre Amstutz, directeur de l’Ecole d’horlogerie de Genève.<br/>

<br/>**Pourquoi ce déménagement?**

Lorsqu’au 19e siècle, les premières écoles d’horlogerie furent créées, pour répondre à une demande des fabricants, l’organisation du travail se caractérisait par une division des tâches poussée à l’extrême. Les élèves doivent aujourd’hui acquérir des compétences plus poussées, mais aussi transversales. L’enseignement change donc continuellement. Il y a 14 ans, lorsque je suis devenu directeur, nous étions 180, contre 300 aujourd’hui. Nous proposions trois formations métiers, huit aujourd’hui : polisseur AFP, opérateur en horlogerie AFP, CFC de termineur en habillage horloger, qualiticien en microtechnique CFC, horloger de production CFC, technicien ES en microtechnique… Il fallait changer de locaux et en profiter pour faire évoluer le projet pédagogique.<br/><br/>

**En quoi ce nouvel espace favorise-t-il de nouvelles pédagogies?**

Nous avons pensé l’école dans sa structure et ses fonctionnements, ses flux de circulation, mais aussi ses flux de collaboration. Concrètement, c’est la fin de la configuration limitante «une classe en un lieu avec un enseignement, et un parc machine pour les micromécaniciens». Désormais, les élèves de la 1e à la 4e année vont être réunis, afin de bénéficier de l’ensemble des moyens et compétences des enseignants. Ces jeunes, qui passeront les quatre années ensemble dans la même zone, travailleront par paires: un élève de quatrième année va «coacher» un deuxième année. Et au-delà de cette interactivité que nous offre l’espace, nous pourrons personnaliser le parcours pédagogique des élèves et agir au mieux sur l’évolution de leurs compétences individuelles. Les quatre enseignants devront travailler davantage ensemble, se cordonner, ce qui sera aussi gage d’enrichissement.<br/><br/>

**Le fait d’être présent à Plan-les-Ouates change-t-il votre relation avec l’écosystème horloger?**

C’est l’endroit rêvé pour l’Ecole, au centre d’un réseau dense d’entreprises horlogères et de leurs fournisseurs. L’ensemble des métiers cités existent sur la zone industrielle. De quoi envisager des collaborations toujours plus intenses avec ces partenaires en puissance, sensibles au nombre de places d’apprentissages possibles pris en charge par l’Ecole. Prenez un acteur comme OPTItool, qui propose des outils de précision en métal dur. Nous comptons tisser toujours plus de liens avec ce fournisseur. Et puis nous découvrirons forcément de nouveaux acteurs. Il sera plus aisé d’aller prendre un café avec eux de manière informelle afin de cerner leurs besoins et de mettre en place des stages par exemple. On sous-estime souvent la simplicité de se situer physiquement dans le même quartier. L’Ecole s’affirme un peu plus comme un maillon de l’écosystème et les élèves baignent dans une ambiance professionnelle. **</section>** \
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*Les articles de cette Exploration ont été réalisée avec le soutien financier de l'Office de Promotion des Industries et des Technologies de Genève.*

https://www.heidi.news/articles/les-futurs-horlogers-viennent-d-investir-leur-campus-flambant-neuf-a-geneve

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 Heidi.news

La Dominique, refuge des pirates des temps modernes

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/bece58f0-aba2-44e2-a0bc-2fd7f454eba3/medium" /><p>Parmi les 7’700 noms épluchés par l’OCCRP en partenariat avec Heidi.news et une douzaine de médias internationaux, on retrouve de nombreuses personnes mêlées à des affaires criminelles ou accusées dans des scandales financiers. Des pirates des temps modernes qui ont trouvé, grâce à leur passeport dominicain, un moyen inespéré pour continuer à prospérer ou fuir la justice de leur pays.</p><p>Le crâne chauve, un sourire carnassier et une grosse montre au poignet: Nicolae Bogdan Buzaianu est un homme d’affaires suisso-roumain aux mille vies. La justice suisse l’accuse d’avoir participé à la vente de plus de 300’000 tonnes de bois précieux illégalement coupé en Casamance, au Sénégal, entre 2014 et 2017, à destination du marché chinois. Proche de l’ancien dictateur de Gambie Yaya Jammeh, il est aujourd’hui sous le coup d’une dénonciation de la part de l’ONG genevoise TRIAL pour «pillage» et «crimes de guerre».</p><p>L’homme n’est pas un inconnu. A la fin des années 2000, il a été impliqué dans un scandale de corruption liée au marché roumain de l&#39;électricité. Aujourd’hui, selon la publication spécialisée <em>Africa Intelligence</em>, il se serait approché du président centrafricain Archange Touadera et serait actif dans les cryptomonnaies à Bangui. Mais ce qu’on ignorait encore, c’est que Nicolae Bogdan Buzaianu a aussi la nationalité dominicaine depuis 2009 si l’on en croit son certificat de naturalisation, l’année de ses ennuis en Roumanie. D’après le décret de naturalisation, c’est sous un nom un peu différent qu’il a obtenu le passeport bleu nuit: Nicole Bagdan Buzaianu. Contacté par l’intermédiaire de son avocat zurichois, il a déclaré «<em>ne pas avoir obtenu de passeport dominicain en 2009</em>». Interrogé à nouveau, il a refusé de nous dire s’il  avait un jour été titulaire d’un passeport de Dominique.</p>
<h3>Le passeport qui permet de disparaître</h3>
<p>L’homme d’affaires suisso-roumano-dominicain fait partie des 7’700 noms de personnes naturalisées par la Dominique collectés par l’ONG Government Accountability Project et décortiqués par l’OCCRP en partenariat avec <em>Heidi.news</em> et une douzaine de médias internationaux.</p><p>Eka Rostomashvili, responsable anti-corruption pour l’ONG Transparency International, explique: «<em>si vous êtes un fonctionnaire qui détourne des fonds publics ou un homme qui fait des affaires douteuses, [...] un passeport doré en poche vous permet de disparaître. Une nouvelle citoyenneté – et éventuellement une nouvelle identité – est très utile si vous voulez échapper aux forces de l’ordre et aux poursuites judiciaires.</em>»</p><p>Des accusations que les autorités dominicaines balaient du revers de la main. En réaction à la décision du Royaume-Uni d’imposer des mesures de sécurité renforcées aux voyageurs dominicain (lire le 1er épisode), le Premier ministre de la Dominique, Roosevelt Skerrit, a assuré que son gouvernement prenait «<em>des mesures supplémentaires pour renforcer le programme»</em>. Il a déclaré que son gouvernement avait mis en place un système de freins et de contrepoids «<em>à plusieurs niveaux»</em> qui était «<em>géré par des agences de diligence raisonnable de premier ordre».</em> Oubliant qu’en 2016, lors d’une interview, le responsable dominicain de l’administration chargé du programme avait reconnu que seuls 2% des candidatures étaient rejetées. De même, la Dominique n’a instauré des interdictions pour certains pays que tardivement, laissant passer entre les mailles du filet des personnalités sulfureuses.</p>
<h3>Criminels et fugitifs</h3>
<p>Parmi les grands groupes d&#39;acheteurs se trouvent des personnes originaires de Russie, de Chine et d&#39;Iran, y compris de grandes fortunes. Comme deux milliardaires russes d&#39;origine azerbaïdjanaise qui ont été placés sous sanctions après l&#39;invasion de l&#39;Ukraine par la Russie en 2022. Il s’agit des oligarques <a href="https://www.forbes.com/profile/god-nisanov/?sh=28ea631c859d" rel="nofollow noopener" target="_blank">God Nisanov</a>, plus grand promoteur immobilier de Russie et son associé <a href="https://www.forbes.com/profile/zarakh-iliev/?sh=19d5a83a4814" rel="nofollow noopener" target="_blank">Zarakh Binsionovich Iliev</a>.</p><p>Au moins 30 personnes ayant obtenu des passeports de la Dominique ont ensuite fait l&#39;objet d’enquêtes, ont été accusées de crimes ou ont été condamnées. Dans près d&#39;une douzaine d&#39;autres cas, ces personnes se sont enfui de leur pays d’origine.</p><p>L&#39;homme d&#39;affaires jordanien Mutasem Faouri et son père Fayez ont acquis leur passeport de la Dominique en 2010. Deux ans plus tard, ils ont été arrêtés, accusés d&#39;avoir escroqué des dizaines de millions de dollars à des investisseurs et condamnés à des peines de prison. Ils font actuellement appel de ces condamnations. Alors que le fils aîné des Faouri purge actuellement une peine pour une affaire connexe, Mutasem, qui a réussi à échapper à la prison, a créé des sociétés au Royaume-Uni, en indiquant sa nationalité dominicaine et une résidence aux Émirats arabes unis. Ni Fayez ni Mutasem n&#39;ont répondu à nos questions.</p>
<h3>La passoire réglementaire</h3>
<p>Dans une autre affaire, l&#39;Espagnol Pedro Fort Berbel, qui a acquis la nationalité dominicaine en 2015, a été accusé deux ans plus tard par la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis d&#39;avoir mis en place une pyramide de Ponzi pesant plusieurs dizaines de millions de dollars à l&#39;époque.</p><p>En vertu de la réglementation dominicaine, les candidats à la citoyenneté par l&#39;investissement sont exclus s&#39;ils ont un casier judiciaire, s&#39;ils font l&#39;objet d&#39;une enquête criminelle, s&#39;ils représentent un <em>«risque potentiel pour la sécurité de la Dominique ou de tout autre pays»</em> ou s&#39;ils sont ou ont été <em>«impliqués dans toute activité susceptible de jeter le discrédit sur la Dominique»</em>. Ce qui semble ne rien empêcher.</p><a href="/articles/la-dominique-refuge-des-pirates-des-temps-modernes">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/la-dominique-refuge-des-pirates-des-temps-modernes

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Comment la Dominique a pris la tête du sulfureux business des passeports dorés

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/5b8755df-b82e-45ac-9920-e9fdf3109ae3/medium" /><p>Depuis le début des années 1990, des dizaines de milliers de personnes ont obtenu la nationalité de la Dominique, une île-État des Caraïbes. Cela prend trois mois et coûte  100’000 dollars. Ils sont depuis détenteurs d’un passeport qui leur ouvre notamment les portes de 140 pays, y compris l’espace Schengen et donc de la Suisse. L&#39;opération «Passeports des Caraïbes» est menée par Heidi.news avec l&#39;OCCRP et une douzaine de médias internationaux dont Le Monde, The Guardian ou Der Spiegel. </p><p>Il ne nous a pas vus, cet homme qui traverse le passage piéton d’une rue animée de Roseau, la capitale de la Dominique. Nous sommes à des milliers de kilomètres de Genève, à bord d’une voiture qui s’est arrêtée pour le laisser passer. Un pare-brise nous sépare. <em>«C’est Emmanuel Nanthan!»,</em> lâche estomaqué notre conducteur. Ancien représentant de son pays en Libye, il est aujourd’hui ambassadeur extraordinaire de la Dominique.</p><p>Le site officiel de son pays le présente comme l’un des plus <em>« fervents partisans du programme de citoyenneté par l&#39;investissement de la Dominique».</em> Lunettes carrées, costume et lourde montre au poignet, le haut fonctionnaire traverse nonchalamment. Nous ne pouvons l’aborder au risque de trahir notre guide local. De toute façon, à quoi bon? Le fonctionnaire ne parle jamais à la presse. Sur cette petite île des Caraïbes, le sujet qui nous intéresse est un domaine réservé. Depuis plusieurs jours, toutes les portes officielles sont restées fermées, malgré nos multiples demandes.</p>### Un service spécial

La Dominique – à ne pas confondre avec la République dominicaine – est connue par une poignée d’initiés pour proposer un service un peu spécial. L’an dernier, pour la sixième fois en dix ans, le *Financial Times* a élu l’île «[meilleur programme de citoyenneté du monde](https://www.cbiu.gov.dm/news/dominica/dominica-tops-the-cbi-index-for-the-sixth-time/)». Initié en 1993, ce procédé consiste à proposer sa nationalité en échange d’une participation financière à des programmes d’investissements. La pratique a décollé à partir des années 2010 et la Dominique, pionnière en la matière, est parvenue à tenir tête à la concurrence d’autres pays ayant lancé des offres similaires. Cela grâce à des conditions imbattables qui ont séduit aux quatre coins du globe:

* prix abordable de 100’000 dollars,

* délai record d’environ trois mois,

* absence de contrôles sérieux des antécédents

* et, jusqu’à récemment, la possibilité de réaliser toutes les démarches sans jamais mettre un pied sur l’île.

Des milliers de documents consultés et compilés par l’Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) et l’ONG Government Accountability Project jettent une lumière crue sur le programme de citoyenneté le plus ambitieux du monde. Avec seulement 74’000 habitants, la Dominique a naturalisé de riches étrangers à un rythme industriel, avec au minimum 19’000 passeports distribués entre 2016 et 2023. Les 7’700 décrets de naturalisation analysés par le consortium ne représentent donc que la partie émergée de l’iceberg.

### Espions et fraudeurs

Parmi ces personnalités figurent, en vrac, des oligarques azerbaïdjanais, un colonel proche de Kadhafi, un fonctionnaire afghan accusé de crimes de guerre ou encore le principal responsable du programme nucléaire de Saddam Hussein. Des espions, des personnes placées sous sanctions par Washington et des fraudeurs fiscaux ont également obtenu la nationalité dominicaine.

L’enquête «*Passeports des Caraïbes*» révèle que des personnes ont demandé et obtenu un passeport de la Dominique afin de fuir des enquêtes criminelles ou des poursuites judiciaires. D'autres ont utilisé leur nouvelle nationalité pour créer des sociétés, des fiducies et ouvrir des comptes bancaires dans le monde entier.

### **Île aux pirates**

La beauté naturelle et le relief accidenté de la Dominique lui ont valu le surnom d'« île nature». Cocotiers, saveurs vanillées et plages au sable fin, le cliché parfait de l’île des Caraïbes.  Deux des films à succès «Pirates des Caraïbes» ont d’ailleurs été tournés ici. Aujourd’hui, si on n’aperçoit aucun pavillon noir ou rouge à l’horizon, la Dominique reste l’île des pirates des temps modernes.

Roseau, la capitale, est une bourgade d’une quinzaine de milliers d’habitants. La ville a la douceur de cette région à mi-chemin entre le Venezuela et Cuba. Visitée par Christophe Colomb en 1493 lors de son deuxième voyage, territoire colonial espagnol avant d’être alternativement contrôlée par la France et le Royaume-Uni, la Dominique est indépendante depuis 1979. Quelques années plus tôt, sous contrôle de Londres, elle a rejoint la Communauté des Caraïbes. Elle est toujours membre de cette alliance scellée par un traité de libre-échange entre les îles de la zone. Contrairement aux voisins d’Amérique du Sud ou à de nombreux pays en développement, les quinze États membres de l’alliance des Caraïbes - 18 millions d’habitants au total – bénéficient d’accords d’exemption de visa quasi équivalents à ceux des pays de la zone Schengen.

### La fin de la banane

Malgré son allure paradisiaque, la Dominique est l’île la plus pauvre des Caraïbes. Son PIB par habitant est au niveau de la Libye ou du Turkménistan, selon que c’est le FMI ou la Banque Mondiale qui calcule. Le salaire moyen ne dépasse pas 500 francs suisses par mois et 28% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.

Sa topographie volcanique et montagneuse l’a empêchée de devenir une puissance sucrière, comme de nombreuses colonies britanniques et françaises des Caraïbes. En revanche, le sol fertile de la Dominique est propice au café et, surtout, à la banane. Surnommée l'or vert, la banane représentait près de la moitié des recettes d'exportation du pays dans les années 1980.

En 1997, l'Organisation mondiale du commerce a mis fin à cette manne financière. Un recours déposé par des multinationales américaines a eu raison du soutien européen aux producteurs de bananes des Caraïbes. Privée de sa principale source de revenus, la Dominique s'est tournée vers les passeports. «*Une question de survie*», affirme Peter Clegg, professeur de relations internationales à l'université de West England Bristol. «*La Dominique n'avait pas de stratégie de développement cohérente en dehors des bananes*».

### **Dominicain sur commande**

Nous poursuivons notre déambulation dans la capitale. Nicole, une jeune dominicaine, contient mal sa colère. *«Le problème,* dit-elle, *ce n’est pas le programme de citoyenneté, mais le fait que nous n’en bénéficions pas. L’argent disparaît avant d’arriver dans les caisses de l’Etat»*. Dans une petite allée reculée, derrière un stade à l’abandon, se trouve un bâtiment rectangulaire sans signe distinctif ni même de dispositif de sécurité: les Archives nationales de la Dominique.

C’est dans cette bâtisse que sont hébergés les secrets inavouables de l’île. Et les preuves que le pays est devenu un allié de choix pour des profils sulfureux du monde entier, une plaque tournante du commerce des passeports. La *Dominica Official Gazette*, le journal officiel, consultable sur place, devrait en principe contenir tous les noms de ceux qui ont acheté un passeport du pays. Mais il n’est pas possible de rassembler ni de copier ces numéros reliés par des ficelles. Et certains noms n’y figurent pas. Les autorités se sont démenées  pour rendre leur accès le plus difficile possible. Pas suffisamment pour décourager le Government Accountability Project, une association basée aux Etats-Unis. L’ONG s’est attelée à rassembler des dizaines de ces gazettes auprès de différentes sources. Auprès de bibliothèques ou de collections privées, mais aussi grâce aux archives de l'Université des Antilles Mona à Kingston, en Jamaïque.

### **Manne publique**

Entre août et décembre 2018, la moyenne des naturalisations est de vingt-cinq par jour. Un processus si rapide qu’il empêche toute véritable enquête ou vérification des profils et antécédents des candidats.

«*Les États ont la possibilité de définir leur propre politique de naturalisation*»*,* explique Madeleine Sumption, directrice de l'Observatoire des migrations d'Oxford. Soulignant ainsi que rien de ce que fait la Dominique – même le fait de donner des passeports à des personnes peu recommandables – n'est illégal au regard du droit international.

Certaines années, les ventes de passeports ont parfois représenté plus de la moitié des 300 millions de dollars de revenus annuels de la Dominique. Après les ouragans destructeurs Erika en 2015 et Maria en 2017, l’activité est même devenue «vitale» pour l’île.

A l’origine de l’essor du programme de citoyenneté, il y a un homme, Roosevelt Skerrit. Premier ministre depuis 2004, il n’a que 31 ans lors de son arrivée aux manettes. Membre du parti travailliste local, il vient d’un milieu modeste. Un concours de circonstances, et la mort de son prédécesseur, l’ont catapulté au poste qu’il occupe sans discontinuer depuis près de vingt ans.

### **Trous dans la comptabilité**

Lui se félicite de sa politique d’impression de passeports, qui a rapporté plus d’un milliard de dollars à la Dominique cette dernière décennie. L’opposition, elle, estime que depuis la prise de fonction de Roosevelt Skerrit, au moins un autre milliard a disparu.

Très opaques, les données officielles sont difficiles à vérifier. Mais la comparaison de plusieurs documents officiels permet de souligner d’importantes anomalies, et des millions de dollars volatilisés. Chaque naturalisation est supposée faire rentrer au minimum 100’000 dollars dans les caisses de l’État. Le système de numérotation des passeports dominicains indique que 150’000 passeports ont été émis entre 2006 et 2018. Cela inclut les passeports locaux, renouvelés, mais représente tout de même un supplément de près de 2,5 milliards de dollars, qui n’apparaissent nulle part dans les comptes de l’Etat, selon les calculs de l’opposition. En compilant les données du Journal officiel, l’OCCRP compte plusieurs centaines de «passeports dorés» en 2010. Or les revenus de vente de citoyenneté cette année-là au budget national ne sont que de 3 millions, soit 30 passeports.

Plus récemment, le gouvernement de la Dominique s'est publiquement contredit. Au parlement, le Premier ministre Skerrit a déclaré qu'entre 2018 et 2019, la Dominique avait vendu un peu moins de 2’000 citoyennetés et avait reçu près de 180 millions de dollars. Mais le budget national n'enregistre que 80 millions de dollars de revenus de passeports pour la même période. Quant au décompte issu du Journal officiel, qui n'inclut qu'un nombre partiel de passeports vendus, il fait état de près de 4’000 personnes ont obtenu la citoyenneté entre août et décembre 2018.

### **Une richesse inexpliquée**

Lorsque Roosevelt Skerrit est entré en politique, il ne possédait ni maison, ni même véhicule. Au cours des années qui ont suivi, il a pu acquérir plusieurs parcelles de terrain ainsi que des propriétés résidentielles et commerciales d’une valeur de plusieurs millions de dollars. Ce patrimoine ne peut s’expliquer par ses revenus officiels.

Son salaire de Premier ministre est inférieur à 2’000 dollars par mois. «*Je pense que je devrais être la personne la mieux payée du pays*», a déclaré Skerrit lors d'une conférence de presse en 2021. «*La plupart des gens gagnent plus d'argent que moi.*»

Un salaire limité qui ne l’empêche pas de mener grand train et d’envoyer son fils aîné en études supérieures à New York. Même l’ambassade américaine s’en est émue: «*Avec ce salaire, Skerrit a acheté plusieurs propriétés foncières à la Dominique sur papier d'une valeur de plus de 400’000 dollars américains avec une valeur marchande beaucoup plus élevée, et est en train de construire une résidence somptueuse à Vielle Casse, sa ville natale*», explique un câble du Département d'État américain datant de 2009 et [publié par WikiLeaks](https://wikileaks.org/plusd/cables/09BRIDGETOWN769_a.html).

### Le silence de Roosevelt

Une fuite provenant du registre de propriété d'entreprises à Dubaï suggère que des voitures de luxe ont été offertes au Premier ministre par un homme d'affaires thaïlandais de l'industrie du jeu, ayant des liens avec de hauts responsables de la police thaïlandaise. En juin, la Cour suprême des Caraïbes orientales a suspendu l'immatriculation de l'une de ces voitures, une Jeep Wrangler, dans le cadre d'une enquête visant à déterminer si le cadeau violait la loi dominicaine.

«*Bien que de nombreux scandales entourant Skerrit relèvent autant de la politique de l'opposition que de cas de corruption prouvables, pris ensemble, ils dressent un tableau assez convaincant de Skerrit s'enrichissant aux dépens du peuple de la Dominique*», estime le même câble diplomatique américain.

Malgré les multiples tentatives de *Heidi.news* ou de ses partenaires, Roosevelt Skerrit n’a pas répondu à nos questions. Pas plus que les autorités du pays malgré nos multiples demandes écrites ou propositions de rencontres. Le Premier ministre a en revanche pris la parole à deux reprises lors de conférences de presse durant lesquelles il a fustigé l’opposition politique de son pays, assurant que celle-ci était en  «*connivence avec des journalistes pour propager des mensonges et des informations erronées* ».

### La Suisse passive

Les risques sécuritaires évidents que posent ces passeports achetables [ont poussé en juillet](https://www.foreign.gov.kn/2023/07/20/uk-introduction-of-visa-requirement-for-dominican-nationals-visiting-uk/#:~:text=19%20July%202023%20%E2%80%93%20The%20UK,the%20UK%2C%20including%20to%20visit.) 2023 le Royaume-Uni à révoquer le système de visa automatique accordé à son ancienne colonie en juillet dernier pour «*des risques de sécurité intérieure*» causés par le programme d’acquisition de citoyenneté. L’Union européenne, elle, ne semble pas vouloir faire de même pour l’instant, freinée par certains de ses membres ayant des pratiques similaires. Pourtant, suite à la multiplication des scandales, les risques de dérives des programmes de citoyenneté par investissements sont désormais reconnus par plusieurs institutions internationales, comme l’OCDE.

Un porte-parole de la Commission européenne a d’ailleurs confirmé à nos partenaires néerlandais de [Follow the Money](https://www.ftm.eu) que *«l’évaluation des systèmes d’achat de citoyenneté mis en place par \[la Dominique\] sont toujours en cours»* car ils peuvent entraîner «*des risques liés à l’infiltration de la criminalité organisée, au blanchiment d’argent, à l’évasion fiscale et à la corruption, et permettent à des ressortissants de pays tiers d’accéder à l’UE sans visa alors qu’ils y seraient autrement soumis.*»

En Suisse, aucune décision politique ou institutionnelle ne semble démontrer que les autorités ont pris la mesure de l’enjeu qui n’a jamais été abordé publiquement. Interrogé, le Département des Affaires Étrangères (DFAE) nous a renvoyé au Secrétariat d'État aux migrations (SEM). Aucun des deux n’a souhaité répondre à nos questions.

**Episode suivant:** La Dominique, paradis des pirates d’aujourd’hui

https://www.heidi.news/articles/comment-la-dominique-a-pris-la-tete-du-sulfureux-business-des-passeports-dores

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«Tu es belle, tu devrais devenir mère porteuse»: en Géorgie, nouvel eldorado de la GPA

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/b077779f-27e7-48df-a5ec-84bc5ebbc3b4/medium" /><p>La guerre en Ukraine a provoqué un afflux de parents en quête de mères porteuses en Géorgie. Dépassées par la demande, les agences de ce petit pays du Caucase ont commencé à importer des gestatrices depuis les pays pauvres d&#39;Asie centrale.</p><p>Dans les couloirs de la clinique Chachava, au cœur de Tbilissi, se massent des couples en attente de rendez-vous. Des femmes enceintes affaissées sur des chaises en plastique massent leur dos endolori. D&#39;autres tiennent des nouveau-nés qui pleurent à pleins poumons, le visage rougi par l&#39;effort. Des enfants en bas âge jouent à se pourchasser, slalomant entre les jambes des infirmières.</p><p>Si la maternité réservée aux résidents locaux à des airs d&#39;hôpital soviétique, l&#39;ambiance change du tout au tout dès qu&#39;on passe à l&#39;étage. Assis sur un canapé en cuir, un couple français remplit des formulaires dans une salle d&#39;attente lumineuse. En face d&#39;eux, des parents suédois jouent avec leur bambin en attendant leur tour.</p><p>Chachava est l&#39;un des principaux fournisseurs de gestation pour autrui (GPA) de Géorgie, ce petit pays du Caucase qui aimerait bien s’émanciper de la pesante tutelle russe. Privatisée en 2012, la clinique a commencé à proposer ce service quatre ans plus tard. Cible principale: les parents étrangers.</p><p>La Dre Keti Gotsiridze <em>(image d’illustration)</em>, une brune pétillante portant un carré de boucles broussailleuses, arrive en souriant. <em>«Vite, venez par ici</em>, souffle-t-elle en ouvrant la porte de son bureau. <em>J&#39;ai des patients qui m&#39;attendent. Cela ne s&#39;arrête jamais ces temps-ci.»</em></p>
<h3><strong>Pénurie de mères porteuses</strong></h3>
<p>Les services proposés aux couples vont du simple transfert d&#39;embryons congelés à une prestation «bébé garanti», la plus luxueuse. Cette dernière prévoit un nombre illimité de fécondations in vitro et de transferts d’embryons – et si cela ne suffit pas, un don d&#39;ovocytes par une tierce personne. Tout est fait pour obtenir un bébé au bout du chemin.</p><a href="/articles/tu-es-belle-tu-devrais-devenir-mere-porteuse-en-georgie-nouvel-eldorado-de-la-gpa">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/tu-es-belle-tu-devrais-devenir-mere-porteuse-en-georgie-nouvel-eldorado-de-la-gpa

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Curatelles qui dérapent à Genève: l'institution mise en cause répond à nos questions

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/49ca1c44-2a15-4122-9e10-ab137c593e73/medium" /><p>Que pensent les responsables de la curatelle à Genève des dérives majeures pointées dans notre enquête? A force d’insistance, nous avons obtenu une rencontre avec Pierre-Antoine Chatelan, président du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE) et de Séverine Müller, directrice du TPAE. L&#39;occasion de poser toutes les questions qui fâchent.</p><p>Cet entretien a été réalisé le 14 juin 2023, en amont de la diffusion de l’Exploration sur Heidi.news. Sur les conditions de la rencontre, extrêmement encadrée, on pourra se reporter <a href="https://www.heidi.news/newsroom/articles/curatelles-le-temps-infini-de-la-reforme-au-pays-de-calvin/edit" rel="nofollow noopener" target="_blank">à l’épisode précédent</a>. Le TPAE tient à préciser que les échanges concernent exclusivement les mesures de protection pour personnes majeures, seuls cas de figure documentés par notre enquête. Cette interview a été relue et amendée par le TPAE.</p>
<h5><strong>Heidi.news – Comment expliquer que la curatelle suscite un tel mécontentement, voire désarroi, chez les protégés et les familles rencontrés dans le cadre de cette enquête?</strong></h5>
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Réensauvagement: prêts à renouer avec la nature dans une prochaine Exploration?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/3e8532ef-d7cb-4295-b49d-be9672147a39/medium" /><p>Sous réserve de financement, notre prochaine grande Exploration de 2024 s&#39;attaquera à une idée vertigineuse: le réensauvagement du monde. Elle sera signée par notre journaliste Fabrice Delaye, qui a déjà signé «Vaccin ARN: La revanche des outsiders» et «Remettre l’énergie au milieu du village».</p><p>En parallèle de la crise climatique, la crise de la biodiversité est la principale menace pour notre environnement. La troisième extinction de masse déséquilibre les écosystèmes, accélérant l’extinction des espèces menacées et l’avènement d’espèces invasives. Y compris des microbes dangereux ou capables de bouleverser les écosystèmes dont nous tirons nos ressources de base.</p><p>Face à cette situation, l’ONU a décidé que la décennie 2020-2030 soit celle de la restauration des écosystèmes. En décembre 2022, 196 pays ont signé, le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal. Il fixe l’objectif ambitieux de protéger 30% de la surface terrestre et océanique d’ici 2030. Comment l’atteindre?</p>### **Le rewilding**

Dès la fin des années 1980, des naturalistes pionniers se sont convertis au concept radical de réensauvagement. Il ne s’agit plus seulement de protéger ce qui est menacé mais de restaurer et de régénérer ce qui a été perdu et de laisser la nature libre.

Ces projets commencent à porter leurs fruits. D’autres encore plus radicaux comme le clonage des derniers individus menacée, la désextinction d’espèces récemment disparues ou bien encore la création de zones de protection à l’échelle de continents se mettent en place. Signe que le temps du réensauvagement est arrivé, le mot entrera dans le dictionnaire en 2024.

### **Le projet**

Pour 2024, sous réserve de financement, *Heidi.news* vous propose de partir à la rencontre des réensauvageurs, hommes ou femmes, qui mènent ces initiatives. L’idée n’est pas de montrer des animaux féériques dans des paysages vierges (même si cela arrivera à l’occasion) mais les acteurs de ce mouvement, les résultats qu’ils obtiennent et les controverses qu’ils suscitent.

Les *rewilders* que nous avons déjà commencé à interviewer pour préparer cette exploration attendent nos journalistes pour témoigner sur ce futur possible.

Un futur qui interroge la place de «maître et possesseur de la nature» que nous a attribuée Descartes à l’aube de l’ère industrielle. Mais un futur attrayant, aussi, car comme le disait le père des naturalistes modernes, John Muir:

> «Il y a un amour de la nature sauvage dans le cœur de chacun d’entre nous.»

### **Les épisodes envisagés**

Huit épisodes sont d’ores et déjà envisagés, qui mèneront nos lecteurs dans un périple à travers le monde.

* Episode 1. Au Montana, milliardaires et cowboys affrontent écologistes et Indiens Blackfeet pour rendre la dernière prairie sauvage d’Amérique aux Bisons.

* Episode 2. En Patagonie où les inventeurs de The North Face et Patagonia convertissent les Pumeros chasseurs de puma en guides qui les protègent.

* Episode 3. Dans le Queensland Australien, on replante des eucalyptus pour que les chauves-souris gardent leurs virus mortels loin des hommes.

* Episode 4. Après avoir réintroduit le loup en Europe, les rewilders des Apennins relâchent des ours en Italie.

* Episode 5. En Grande-Bretagne, le Brexit donne des ailes à la politique agricole pour financer la reforestation de l’Ecosse par la City

* Episode 6. Au Mozambique, le parc du silence attend les premiers bébés éprouvette de rhinocéros.

* Episode 7. Du Yukon à Yellowstone et des monts Cantabriques aux Carpates, ces réensauvageurs qui pensent en continents et agissent en siècles.

* Episode 8. Au Portugal, avec l’ONG qui plante des forêts au fond des océans.

La rédaction de *Heidi.news* vous tiendra informés de la suite donnée à cette Exploration. Vous pouvez dès maintenant nous contacter à l’adresse *redaction@heidi.news* si vous souhaitez aider à financer ce projet.

https://www.heidi.news/articles/reensauvagement-prets-a-renouer-avec-la-nature-dans-une-prochaine-exploration

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Pourquoi y a-t-il plus de droitiers que de gauchers? [VIDEO]

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/a58337b0-82a6-41b3-bdb2-ca8553d2fd20/medium" /><p>Si vous regardez la vidéo ci-dessous sur un smartphone, il y a de grandes chances que vous le teniez dans votre main droite. C’est un fait: entre 8 et 9 personnes sur 10 sont droitières. Pourquoi ce n&#39;est pas 50-50? Ce dernier épisode de PopScience vous détaille le pourquoi du comment.</p><p>La question passionne les scientifiques et reste assez ouverte. D’ailleurs, <em>fun fact</em>: on peut être droitier ou gaucher pour la main, le pied, mais aussi pour l’œil ou l’oreille. Et pour savoir comment ça se décide, il y a plusieurs hypothèses, passons-les en revue:</p>
<ol>
<li>On peut penser que ça pourrait être <strong>génétique</strong>. Mais ce n’est pas si concluant: si les deux parents sont droitiers, l’enfant aura quand même quelques chances d’être gaucher. Et si les deux parents sont gauchers, l’enfant sera-t-il gaucher à quasi 100%? Non! Il n’a que 20 à 30% de chances d’être gaucher. La génétique n’est donc pas l’explication principale. Il arrive même que chez des vrais jumeaux, qui ont un génome identique, l’un soit droitier et l’autre gaucher.</li>
</ol>
2. Deuxième hypothèse: ce serait dans la **croissance** que se forgerait le fait d’être droitier ou gaucher. La préférence entre notre main droite et gauche se ferait dès la gestation. Quand on suce son pouce droit dans le ventre de sa maman, on a de grandes chances d’être droitier plus tard.

  3. La dernière et plus sérieuse, hypothèse, elle est liée à l’organisation de notre **cerveau**. Notre corps n’est pas aussi symétrique qu’on le pense. Notre cerveau se divise en fait en deux parties: l’hémisphère gauche et l’hémisphère droit. Est-ce qu’ils sont égaux et gèrent la même chose? Non, pas vraiment: en matière de mouvements et de sensations, la zone gauche du cerveau gère la partie droite du corps. Vous m’avez compris, la zone droite du cerveau gère le côté gauche du corps.

#### Voir aussi: [Pourquoi on est parfois mort de rire?](https://www.heidi.news/sciences/video-pourquoi-on-est-parfois-mort-de-rire)

Ces deux hémisphères ont aussi des spécialisations, nous a appris Paul Broca. En disséquant un patient incapable de parler, ce médecin anatomiste français a montré à la fin du 19e siècle qu’une aire bien précise du cerveau jouait un rôle central dans la production du langage. On appelle depuis cette partie du cerveau, l’aire de Broca.

Or, l’aire de Broca est située dans l’hémisphère gauche, et c’est cette asymétrie qui expliquerait qu’on soit le plus souvent droitier. La spécialisation de l’hémisphère gauche dans le langage déboucherait sur de meilleures aptitudes motrices dans la partie droite du corps.

Entre les mouvements fins de la bouche et de la langue, qui permettent de parler, et la motricité fine des membres, notamment de la main droite, il n’y a qu’un tout petit pas cérébral.

En somme, par effet de proximité dans le cerveau, on aurait plus de droitiers. D’ailleurs, on a remarqué que certains gauchers avaient un cerveau un peu différent: ils avaient l’aire de Broca à droite.

Et les droitiers, ils existent depuis des millions d’années. On a même estimé que les hommes préhistoriques étaient majoritairement droitiers quand on a analysé les peintures de grottes. Mais l’histoire ne dit pas s'ils tiendraient leur smartphone dans leur main droite, eux.

https://www.heidi.news/articles/pourquoi-y-a-t-il-plus-de-droitiers-que-de-gauchers-video

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Israël et le Moyen-Orient face au risque d'une «escalade régionale majeure»

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/cdfa5465-8984-47b3-877c-692c3d52caeb/medium" /><p>L&#39;attaque d&#39;ampleur qui a ciblé Israël samedi a fait des centaines de victimes et déclenché une profonde déstabilisation régionale. L&#39;état d&#39;urgence national est décrété et des milliers de réservistes sont appelés pour une contre-offensive d&#39;envergure qui ciblera Gaza.</p><p>Israël et la bande de Gaza se sont réveillés dans les débris et le sang ce dimanche matin. Vingt-quatre heures après le lancement par le Hamas de l’opération «<a href="https://www.bfmtv.com/international/moyen-orient/palestine/operation-deluge-d-al-aqsa-les-images-de-l-arrivee-en-paramoteur-des-combattants-du-hamas-en-isarel-en-israel_VN-202310070271.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">déluge d’Al-Aqsa</a>», les services de secours décomptent au moins <a href="https://www.liberation.fr/international/moyen-orient/le-hamas-revendique-une-vaste-attaque-contre-israel-des-roquettes-tirees-et-des-assaillants-infiltres-20231007_H7KRMBSGVFBWVJDHEOUODTSFLE/" rel="nofollow noopener" target="_blank">250 personnes tuées et 1’800 blessées</a> par les salves de milliers de roquettes et les incursions de centaines de combattants dans le sud d’Israël. Quelques heures après le déclenchement de cette attaque sans précédent, Tsahal, l’armée israélienne, a répliqué par l’opération «Glaives de fer», en ciblant des bâtiments et des sites stratégiques du Hamas à Gaza, faisant <a href="https://www.lepoint.fr/monde/attaque-du-hamas-contre-israel-313-morts-dans-la-bande-de-gaza-08-10-2023-2538462_24.php" rel="nofollow noopener" target="_blank">313 morts et 1’990 blessés</a>, a précisé dimanche matin le ministère de la santé palestinien.</p><p><strong>Pourquoi c’est important?</strong> Par son ampleur et l’incapacité des services de renseignement israéliens de prévenir le carnage, le «déluge d’Al-Aqsa» est la plus violente et la plus ambitieuse attaque du Hamas sur Israël de toute son histoire. Hormis les salves de <a href="https://www.sudouest.fr/international/moyen-orient/israel/des-centaines-de-roquettes-lancees-sur-israel-au-moins-une-femme-tuee-l-alerte-declenchee-16965952.php" rel="nofollow noopener" target="_blank">5’000 missiles</a>, les incursions par la mer, la terre et les airs ont complètement débordé les forces de sécurité israéliennes qui n’avaient pas encore repris le contrôle intégral des villes et hameaux du sud ce dimanche matin. Israël a déclenché l’<a href="https://www.lemonde.fr/international/live/2023/10/08/en-direct-attaque-du-hamas-contre-israel-l-armee-israelienne-effectue-des-frappes-sur-le-sud-du-liban-apres-des-tirs-sur-son-territoire-revendiques-par-le-hezbollah_6192981_3210.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">état d’urgence national</a>, les écoles sont restées fermées et le gouvernement a appelé à recruter tous les volontaires de la police à travers le pays, présageant une riposte massive.</p><a href="/articles/israel-et-le-moyen-orient-face-au-risque-d-une-escalade-regionale-majeure">Voir plus</a>

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Politique, violences conjugales et loi du secret

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/176f1ae2-d50e-488c-b4f5-23c983614ff0/medium" /><p>Nous publions ce matin un article sur les soupçons de violences conjugales de la part d’un candidat au Conseil des Etats. C’est pour moi l’occasion de réfléchir au secret qui entoure bien souvent ces affaires dans notre pays, et au rôle de la presse.</p><p>Il aurait évidemment été bien plus simple de ne pas publier ce qui suit, <a href="https://www.heidi.news/articles/exclusif-l-udc-vaudois-michael-buffat-rattrape-par-des-soupcons-de-violences-conjugales" rel="nofollow noopener" target="_blank">ni l’article détaillé que cet éditorial accompagne</a>. Je vous le résume:</p><p>- L’épouse du député UDC vaudois Michaël Buffat, candidat au Conseil des Etat le 22 octobre, aurait pris récemment refuge dans une institution pour personnes victimes de violences conjugales;<br/>- <em>Heidi.news</em> a pu consulter un procès-verbal d’audition en 2016 devant la justice vaudoise d’une précédente compagne de Michaël Buffat: elle fait état de coups à répétition et d’une menace avec une arme à feu lorsqu’elle a voulu le quitter.</p><a href="/articles/politique-violences-conjugales-et-loi-du-secret">Voir plus</a>

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EXCLUSIF: l’UDC vaudois Michaël Buffat rattrapé par des soupçons de violences conjugales

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/25e53f27-7557-4983-903f-712ddf79effd/medium" /><p>L’épouse du député UDC vaudois Michaël Buffat, candidat au Conseil des Etat le 22 octobre, aurait pris récemment refuge dans une institution pour personnes victimes de violences conjugales, a appris Heidi.news. Nous avons aussi pu consulter le procès-verbal de l&#39;audition en 2016 devant la justice vaudoise d’une précédente compagne de Michaël Buffat: elle fait état de coups à répétition et d’une menace avec une arme à feu lorsqu’elle a voulu le quitter.</p><p>Michaël Buffat, conseiller national vaudois et candidat UDC au Conseil des Etats, travaille à lisser son image, depuis qu’il est porté par l’Alliance vaudoise réunissant l’UDC, le PLR et Le Centre. En public, il se présente en figure locale, aimable et affable. Il en irait autrement dans le privé. Des proches et d’anciens proches le décrivent comme ayant des accès de colère, capable d’inspirer la peur et n’hésitant pas à recourir à la force physique, souvent sous l’emprise de l’alcool.</p><p>Quatre sources ont ainsi confirmé à <em>Heidi.news,</em> sous couvert de l’anonymat, que son épouse avait récemment dû passer dans un centre pour victimes de violences conjugales du canton de Vaud, alors que le couple traversait une séparation houleuse.</p>
<h3>«Des rumeurs»</h3>
<p>Son entourage et elle-même n’ayant pas souhaité répondre à nos questions, nous ne sommes pas en mesure, à ce stade, de détailler les agissements du politicien vaudois. Michael Buffat, contacté par <em>Heidi.news</em>, a affirmé: <em>«Ce n’est que des rumeurs, qui me fâchent énormément»</em>. Il n’a pas répondu aux questions plus précises envoyées par la suite.</p><p>Une amie, qui a côtoyé le couple ces dernières années, décrit une relation marquée par des conflits fréquents et une forme d’emprise de Michaël Buffat sur son épouse. <em>«Elle se confiait très peu et tentait de sauver les apparences. Mais il lui parlait souvent mal, avec agressivité, ainsi qu’à ses enfants issus d’une précédente union. Ils s’engueulaient souvent devant tout le monde»</em>. Plusieurs proches se souviennent d’avoir assisté à ces disputes. Il est arrivé que des soirées tournent court en raison de tensions insupportables et que l’épouse quitte les lieux avec ses enfants. A une reprise au moins, elle aurait pris une gifle avant.</p>
<h3><strong>Un précédent</strong></h3>
<p>Ce n’est pas la première fois que le député UDC vaudois de 44 ans, ancien cadre de la Banque cantonale vaudoise (BCV) et siégeant au Conseil national depuis huit ans, semble impliqué dans des faits de violence. <em>Heidi.news</em> a pu consulter le compte-rendu d’une audition judiciaire datant de 2016 d’une de ses compagnes précédentes, qui faisait état de coups et de menaces, y compris avec une arme à feu. Des faits qui remontent à 2013 et 2014.</p><p>L’ex-compagne de Michaël Buffat, que nous appellerons Christelle, <a href="https://www.letemps.ch/suisse/ludc-vaudois-michael-buffat-vise-une-plainte" rel="nofollow noopener" target="_blank">a déposé plainte contre lui le 31 juillet 2015</a>. Aujourd’hui, elle ne souhaite pas revenir sur cette affaire. Reste le compte-rendu de l’une de ses auditions devant le procureur, qui s’est tenue en février 2016. La plaignante faisait alors part à la justice des craintes qu’elle éprouvait face à l’homme dont elle avait partagé la vie pendant deux ans, un sentiment qui persistait plusieurs mois après leur séparation et qui l’aurait poussée à dénoncer les faits, même tardivement. <em>«Ma plainte est préventive, car Michaël Buffat est quelqu’un d’imprévisible qui me fait peur. Il m’a menacée à plusieurs reprises»</em>, a-t-elle déclaré au procureur.</p>
<h3>Couché sous la voiture</h3>
<p>Michaël Buffat et son ex-compagne se voyaient presque tous les jours, la plupart du temps chez lui, mais elle tenait à ce que chacun conserve son propre domicile. Le premier épisode de violence aurait eu lieu en juin 2013. Exaspéré qu’elle ne veuille pas emménager chez lui, à Vuarrens (VD), il aurait frappé Christelle d’un coup de poing à la mâchoire. Celle-ci aurait tenté de partir, mais Michaël Buffat se serait alors couché alors sous la voiture de sa compagne, lui disant qu’elle devrait lui rouler sur la tête. <em>«J’ai attendu une heure dans ma voiture, mais il est resté couché dessous et j’ai donc fini par sortir et retourner chez lui».</em></p><a href="/articles/exclusif-l-udc-vaudois-michael-buffat-rattrape-par-des-soupcons-de-violences-conjugales">Voir plus</a>

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Ce que j’ai appris en passant de la presse écrite au documentaire

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/10c1c039-2b4b-48f2-941a-88f9af2c2c0f/medium" /><p>La série d’articles que j’ai écrits pour <em>Heidi.news</em> au printemps 2021 sur l’histoire des recherches sur <a href="https://www.heidi.news/explorations/arn-messager-la-revanche-des-outsiders" rel="nofollow noopener" target="_blank">l’ARN messager</a> qui ont conduit à la mise au point des vaccins Covid et au-delà sur une révolution médicale, couronnée par un <a href="https://www.heidi.news/sante/dans-l-intimite-des-nobelises-de-l-arn-messager" rel="nofollow noopener" target="_blank">Nobel</a> cette semaine, est devenue la base d’un <a href="https://www.arte.tv/fr/videos/109391-000-A/les-aventuriers-de-l-arn-messager/" rel="nofollow noopener" target="_blank">documentaire</a> diffusé sur Arte le samedi 8 octobre 2023.</p><p>Je ne réfléchis pas souvent (suffisamment?) au pourquoi ou au comment de mon métier – j’essaie juste de le faire du mieux possible en demandant à beaucoup de gens le pourquoi et comment de leurs métiers. Mais puisque mon rédacteur en chef, Serge Michel, me le demande, je vais essayer de tirer pour vous quelques leçons du passage de la rédaction d’une série d’articles à une narration en images et en sons.</p>La télévision dispose évidemment de moyens plus importants que la presse écrite. La question n’est pas ici celle du confort de la chambre d’hôtel, mais des moyens humains que cela suppose. J’ai travaillé avec une équipe aussi talentueuse que rodée: Raphaël Hitier, le réalisateur, les cinéastes Laurent Chollet et Edward Bally, l’ingénieur du son Frédéric Heinrich, le monteur Alexandre Auque et Ségolène Dujardin, la productrice de [Découpages](https://decoupages.fr/), sans oublier les animateurs du studio [«Les astronautes»](https://www.lesastronautes.fr/). Mon rôle était de co-écrire le scénario sur la base de mes articles avec Raphaël puis d’aller sur les tournages co-interviewer (et gérer) nos interlocuteurs, grands scientifiques mais aussi fortes personnalités.

### **L’équipe, l’équipe, l’équipe**

Ce travail d’équipe et forcément de terrain (on ne parle pas ici d’actualités) est différent de celui du journaliste de presse écrite qui interagit avec son rédacteur en chef pendant la phase projet, puis avec son chef d’édition une fois son article livré, mais qui est seul pendant la phase d’enquête et d’écriture. S’agissant d’enquêtes, il (je) n’a souvent au départ qu’une vague idée de ce qu’il va effectivement trouver (et même parfois chercher).

![Capture d’écran 2023-10-06 à 17.59.37.png](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/6d147c79-7d23-41d1-a290-eb4b273e7596/large "Tournage chez BioNTeach avec Ugur Sahin./Heidi.news")

Cette incertitude a ses avantages, je vais y revenir. Mais la relative certitude dans laquelle un projet de documentaire doit évoluer – il a besoin du feu vert d’un diffuseur et engage un budget conséquent – repose sur ce travail d’équipe. Même quand il part d’une enquête écrite au préalable, le documentaire livré n’est pas exactement ce qui a été prévu.

Contrairement à la fiction, il doit adapter son récit à la réalité du terrain, des faits et de ses personnages. Le défi est de dépasser leurs inévitables incohérences et d’arriver à une vérité forcément simplifiée. C’est aussi le cas à l’écrit mais le besoin – la soif – d’images et de sons génèrent d’autres contraintes. Je ne compte plus les discussions avec Raphaël sur l’interprétation de ce qui est prioritaire scientifiquement ou humainement dans le récit.

### **Du chaos, la cohérence**

Dans ce chaos de science, d’enjeux économiques et sociétaux, de rapports de force et d’aventures humaines, c’est de la force de l’équipe qu’émerge le récit cohérent.

* C’est le chef opérateur qui propose un tournage à l’aurore dans les Rocheuses pour profiter de la beauté de la lumière et me demande de prêter ma veste de montagne à un prix Nobel parce que son bleu électrique ressortira mieux.

* C’est l’ingénieur du son qui propose d’enregistrer un train de marchandises entrant lentement dans Philadelphie pour ralentir le rythme de la narration.

* C’est le réalisateur qui demande une scène à cheval pour contextualiser la matière scientifique dans sa pâte humaine.

* C’est la productrice qui demande des images d’archive du drame de l’épidémie de sida parce que la recherche sur cette maladie a été la matrice de celle sur les vaccins ARN.

![Capture d’écran 2023-10-06 à 18.06.30.png](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/27f4b435-ba0e-4237-97ed-eb639dae39b8/large "Raphaël Hitier le réalisateur à l'Université de Colombie britannique. | Heidi.news / FD")

De la créativité des animateurs à celle du monteur, on n’en finirait pas d’énumérer ces coups de pinceaux auxquels il faut ajouter les inputs du diffuseur (Hélène Ganichaud et Alex Villard-Faure d’Arte) qui repèrent les incohérences, les manques et parfois les erreurs avec une précision de laser.

### **Une complémentarité à exploiter**

Mon travail habituel de journaliste de presse écrite commence avec une découverte, et se poursuit avec beaucoup de vérifications en aval, jusqu’à ce qu’émerge un angle qui va servir de moteur narratif.  Le documentaire fonctionne à l’inverse sur la base d’une histoire scénarisée, qui tolère des adaptations mais demande aussi beaucoup de mise en scène. Le documentaire est aussi un spectacle. Et quand pour faire un article de taille M, il faut un matériel de base L, un film réclame des ressources en XXL. Cela signifie des heures de rushs qui finissent à la corbeille.

![Capture d’écran 2023-10-06 à 17.59.55.png](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/f37cc541-aaab-4737-ab83-24ef56ff69c7/large "Fabrice Delaye entouré de Kati Kariko et Drew Weissman à l'Université de Pennsylvanie. | Heidi.news / FD")

En comparant les deux approches, je vois cependant une complémentarité et une piste pour une presse écrite qui cherche à réinventer son modèle d’affaires. Pourquoi ne pas plus collaborer?

Léger et flexible, le rédacteur récolte contacts, informations précieuses mais aussi métaphores, angles et idées de nature à informer l’équipe, de la rédaction du scénario à la post-production. A la fois scout et régisseur, il fait le repérage. S’il possède en plus une bonne idée de ce que les experts de la narration audiovisuelle recherchent, il peut aussi, en quelque sorte faire leurs courses, en matière d’anecdotes, de cadres de tournage, de «gueules» ou de voix. Identifier, aussi, les impasses et les pistes qui restent à creuser.

Cela peut faire gagner du temps et de l’argent à la production audiovisuelle. Mais surtout, *in fine,* je crois que les lecteurs comme les spectateurs y gagnent avec une qualité informative augmentée par cette collaboration et le champ d’approfondissement qu’elle permet.

En ce qui me concerne, j’ai en tout cas très envie de renouveler l’expérience.

https://www.heidi.news/articles/ce-que-j-ai-appris-en-faisant-un-documentaire

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«De partout et nulle part»: A Belgrade, ces milliers de Russes détestés de tous, y compris d’eux-mêmes

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/c8ff9446-a67d-4f57-b51c-1931f1ae3684/medium" /><p>Dans les années 1920, les Russes sont partis en masse pour s’établir notamment en Serbie. Un siècle plus tard, l’histoire se répète, sous l’effet de la guerre en Ukraine. Mais la communauté russe à Belgrade se signale par un paradoxe: en rupture avec son pays d’origine, elle ne montre aucune velléité de s’adapter à son pays d’accueil. Témoignages. </p><p><em>«Quand je suis arrivée à Belgrade, explique Nina, moscovite de 30 ans, une des premières choses que j&#39;ai faites, c&#39;était d&#39;ouvrir un compte Tinder et de sélectionner des hommes russes.»</em> </p><p>Installée dans la capitale serbe depuis septembre 2022, Nina exprime ce que vivent la grande majorité de ses compatriotes exilés en Serbie. Quelque 150&#39;000 Russes – leur nombre exact est inconnu – semblent très occupés à reproduire à Belgrade leurs routines moscovites et pétersbourgeoises. Cafés, restaurants, salons de coiffure et de massage, pédicure et manucure, salles de fitness, jusqu&#39;aux profils sur les applis de rencontre… Les Russes consomment presque exclusivement russe. </p><a href="/articles/de-partout-et-nulle-part-a-belgrade-ces-milliers-de-russes-detestes-de-tous-y-compris-d-eux-memes">Voir plus</a>

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Tessie Arpels, porte-étendard de luxe pour les animaux maltraités

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/be0d9742-a144-4a5e-a205-0023536f8d38/medium" /><p>La petite-fille du fondateur de la marque de haute joaillerie Van Cleef &amp; Arpels consacre sa vie, son cœur et son portefeuille au bien-être animal. Rencontre avec cette activiste invétérée. </p><p><em>«Il aurait fallu ne pas voir, mais une fois que le regard d’un animal a croisé le vôtre, c&#39;est très difficile de ne plus y penser»</em>, lance d’emblée Tessie Arpels. À quelques mètres de là, Mia, sa vieille chatte née dans une poubelle de Tel-Aviv, redresse légèrement la tête, comme pour acquiescer.</p><p>Nous rencontrons l’héritière de la maison Van Cleef &amp; Arpels, haute joaillerie et parfum depuis 1906, dans sa belle demeure genevoise. Chaque recoin, d’une propreté immaculée, est ornée de photos de bêtes rescapées des abattoirs et de messages inspirants du genre «<em>If you eat meat, you love pets, not animals</em>» («si vous mangez de la viande, vous aimez les animaux de compagnie, pas les animaux»).</p><a href="/articles/tessie-arpels-porte-etendard-de-luxe-pour-les-animaux-maltraites">Voir plus</a>

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Curatelles: le temps infini de la réforme au pays de Calvin

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/bdd5954e-3fd0-4ae4-bc66-4afa1840be81/medium" /><p>Ce n’est pas d’hier que date le constate de graves défaillances dans le dispositif de curatelles à Genève. En 2020, le Grand Conseil exhortait le gouvernement à agir sans délai. L’institution est donc entrée dans le temps de la réforme. A son rythme.</p><p>Un jour comme un autre? Presque, à un détail près. Le 14 juin 2023, date de notre rendez-vous avec Pierre-Alain Chatelan, le président du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE), coïncide avec la grève féministe. Une onde violette est sur le point de se répandre dans les rues du pays. Mais, il est encore trop tôt pour assister à l’ébranlement du cortège à Genève. Après plusieurs semaines d’échanges de courriels, l’entretien a été fixé un mercredi à 8h00 tapantes au Palais de justice.</p><p>Le président du TPAE n’est pas le seul à participer à cette entrevue matinale. Séverine Müller, la directrice du TPAE, est à ses côtés. De l’autre côté de la table, Aldo Maffia est présent en tant que représentant du Département de la cohésion sociale (DCS), où il occupe la fonction de directeur général de l’action, de l’insertion et de l’intégration sociale.</p><a href="/articles/curatelles-le-temps-infini-de-la-reforme-au-pays-de-calvin">Voir plus</a>

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Quand j'ai rencontré Kati Kariko et Drew Weissmann, les pionniers du vaccin ARN aujourd'hui nobélisés

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/d645e1e5-3f0a-4d24-a649-5310633d33c0/medium" /><p>Katalin Kariko et Drew Weissman ont reçu le prix Nobel de médecine 2023 pour leurs recherches sur la technologie de l’ARN messager, à l’origine des premiers vaccins Covid. Fabrice Delaye, auteur de notre Exploration sur les vaccins ARN, les avait rencontrés pour le tournage d&#39;un documentaire inspiré de son travail. Pour les lecteurs de Heidi.news, il relate son expérience. </p><p>C’est dans sa petite maison de la banlieue de Philadelphie que nous reçoit Katalin «Kati» Kariko en cet été 2023. «C’est mon mari qui a refait tous les parquets, les escaliers et une bonne partie des meubles», commence-t-elle par nous expliquer. A l’époque le couple, tout juste émigré de Hongrie pour s’installer aux Etats-Unis, ne roule pas sur l’or.</p>
<h3><strong>Une collection de médailles</strong></h3>
Je suis aux Etats-Unis avec une équipe d’Arte (Raphaël Hitier, Laurent Chollet et Frédéric Heinrich), afin de tourner un documentaire inspiré de mon Exploration «[Vaccin à ARN messager: la revanche des outsiders](https://www.heidi.news/articles/ce-qui-se-passe-dans-votre-bras-au-moment-du-vaccin)». Nous faisons le tour du pays, d’une côte à l’autre, pour rencontrer les protagonistes de cette fabuleuse épopée scientifique, dont on commence juste à récolter les fruits.

![kariko garage ok.jpg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/4fa86884-fe59-41c1-8852-e211ffeb4cc5/large "Kati Kariko dans son garage à Philadelphie, devant l’atelier de son mari. | Heidi.news / FD")

Toujours modeste, Kati Kariko nous fait visiter son atelier et son garage, avant de nous laisser enfin filmer l’incroyable collection de prix scientifiques dans son bureau. Lasker, Louis Jeantet, Grande Médaille de l’Académie des sciences… Plus de deux cents récompenses, à l’exception d’une, la plus prestigieuse de toutes: le Nobel.

#### Lire notre Exploration: [Vaccin à ARN messager: la revanche des outsiders](https://www.heidi.news/articles/ce-qui-se-passe-dans-votre-bras-au-moment-du-vaccin)

Il aura suffi d’être patient. La chercheuse d’origine hongroise vient de se voir décerner le prix Nobel 2023 de médecine, avec l’Américain Drew Weissman, qui l’a repêchée à l’Université de Pennsylvanie dans les années 1990 quand sa carrière tanguait.

### **Un couple improbable**

Difficile d’imaginer deux personnalités plus opposées. Kati Kariko est volubile, directe, elle rit souvent et parle fort — y compris pour critiquer son *alma mater*. Drew Weissman est précis, il donne l’impression de peser chaque mot et n’en dit jamais un de trop. C’est la seule personne que je connaisse dont on *entende* distinctement le point à la fin des phrases.

![ARN2.jpeg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/56c8ce51-c911-4f6e-af1a-34fcdc777b14/large)

Interviewé d’abord quelques mois plus tôt à l’occasion d’une conférence à la National Science Academy en Californie, Drew Weissman avait aussi révélé un caractère de pince-sans-rire, avec une distance ironique sur les choses de la vie. Une hauteur de vue qui fait écho à sa manière d’observer les questions scientifiques pour en extraire la substantifique moelle. C’est un pédagogue remarquable et s’il est rigoureux au point d’en être intimidant, il sait faire preuve d’empathie.

### **Rencontre à la photocopieuse**

L’empathie est probablement ce qui scellé le rapprochement de ces deux chercheurs, à la faveur d’une rencontre fortuite devant une photocopieuse de UPenn. Fraichement arrivé sur le campus depuis le laboratoire d’Anthony Fauci aux National Institute of Health, Drew Weissman se laisse expliquer les règles tacites de l’établissement par Kati Kariko.

«Elle s’est vantée de pouvoir tout faire avec son ARN», me confiait-il, sans masquer son scepticisme d’alors. De fait, Weissman travaille depuis dix ans à la mise au point d’un vaccin contre le VIH. Comme le programme n’avance pas, il décide de changer d’axe de recherche et commence à collaborer avec Kati Kariko pour tester l’ARN messager. Ensemble, ils vont découvrir comment empêcher que l’organisme ne détruise l’ARN messager étranger injecté avec le vaccin, pour lui laisser le temps d’agir.

### **De l’indifférence à la gloire**

Aujourd’hui, l’histoire paraît écrite, mais à l’époque, les deux chercheurs d’exceptions se sentent un peu seuls au monde, snobés par beaucoup de leurs collègues comme par l’industrie pharmaceutique. Drew Weissman dit ne pas avoir reçu le moindre coup de téléphone, suite à la publication en 2005 de leur principale découverte — celle qui motivera la remise de leur Nobel 17 ans plus tard.

Pour autant, Weissman et Kariko savent pertinemment que la science est une activité collective. Ils disent eux-mêmes que si leurs contributions ont permis de franchir un obstacle majeur sur la voie des vaccins ARN, cette découverte bénéficie de décennies d’autres recherches. Ce n’est d’ailleurs que le début de l’histoire, tant le potentiel médical de l’ARN s’annonce immense.

![ARN5.jpeg](https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/bbc58fcf-af06-42fa-b18b-4244fef9eee7/large "Norbert Pardi dans son laboratoire à UPenn. | Heidi.news / FD")

En seront-ils? Après quelques années chez BioNTech, Kati Kariko a pris sa retraite et se consacre surtout à promouvoir les femmes dans la science. Mais elle a pris soin de transmettre son labo à un jeune chercheur venu de la même ville qu’elle en Hongrie, Norbert Pardi.

Quant à Drew Weissman, il dispose de son propre bâtiment pour son labo de recherche sur les applications de l’ARN, sur le campus de UPenn à Philadelphie. HIV, grippes, cancers, maladies cardiovasculaires, les possibilités de l’ARN messager commencent seulement à se dévoiler.

*<br/>Le documentaire [Les Aventuriers de l’ARN messager](https://www.arte.tv/fr/videos/109391-000-A/les-aventuriers-de-l-arn-messager/) , de Raphaël Hitier et Fabrice Delaye, sera diffusé sur Arte le 7 octobre 2023 à 22h20.*

https://www.heidi.news/articles/dans-l-intimite-des-nobelises-de-l-arn-messager

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Le climat fait évoluer les animaux plus vite que les Pokémon [VIDEO]

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/325a8748-96e4-4428-80ae-24494786777e/medium" /><p>Des ours au régime sec, des oiseaux avec des becs plus larges... Le climat a des effets sur l&#39;évolution des animaux à très court terme, explorés dans ce nouvel épisode de PopScience.</p><p>Dans PopScience, on utilise la Pop Culture pour expliquer la science. Parfois, elle a un coup d’avance. C’est ce qu’ont remarqué des scientifiques: les animaux évoluent. Et pas seulement au fil de millions d’années de cycles de reproductions successifs, mais aussi à cause du climat.</p><p><strong>L’évolution, c’est quoi?</strong> Le fait que les animaux évoluent, c’est pas bien nouveau et ce n’est pas réservé aux Pokémon. Pour faire simple: lors de la reproduction d’une espèce, des différences peuvent apparaître:</p>* un bec plus court,

* un cou plus long,

* des oreilles gigantesques.

#### Lire aussi: [C’est quoi ce bec? La crise du climat change la forme des animaux](https://www.heidi.news/climat/c-est-quoi-ce-bec-la-crise-du-climat-change-la-forme-des-animaux)

Parfois, ces différences peuvent être un avantage. Et quand c’est le cas, ces animaux évolués se reproduisent et propagent leur nouvelle forme. Les autres, moins adaptés, survivent et se reproduisent moins bien. C’est la sélection naturelle.

**L’évolution et le climat.** L’adaptation par la sélection naturelle se fait par rapport à l’environnement. Et vous me voyez venir, le changement climatique aussi affecte la faune, de différentes façons:

* Il y a ceux qui migrent vers des régions plus fraîches,

* ceux qui adaptent leur reproduction ou leur migration

* et il y a ceux qui évoluent en modifiant, par exemple, la taille des parties de leurs corps par exemple.

C’est le résultat d’[une étude publiée en 2021](https://www.cell.com/trends/ecology-evolution/fulltext/S0169-5347(21)00197-X?utm_source=EA), par des biologistes australiens. Ces chercheurs ont démontré que la queue, les oreilles ou les becs, qu’on appelle les appendices, avaient tendance à devenir de plus en plus gros.

Par exemple:

* chez certains perroquets australiens, la taille du bec a augmenté de 4 à 10% depuis 1871,

* on a observé des souris avec des oreilles plus grandes que leurs ancêtres,

* et des chauves-souris avec des ailes plus longues.

Ces résultats viennent globalement confirmer les théories d’un célèbre zoologue de la fin du 19e siècle, Joel Asaph Allen. D’après la règle empirique qui porte son nom, plus une espèce vit sous un climat chaud, plus elle tend à posséder de longs appendices.

#### Voir aussi: **[Avec la biodiversité, nous vivons dans un réseau social géant](https://www.heidi.news/climat/avec-la-biodiversite-nous-vivons-dans-un-reseau-social-geant-video)**

Le changement climatique joue aussi un rôle sur la taille des corps.  [Une étude américaine de 2019](https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/ele.13434) a étudié la taille de 70’000 oiseaux migrateurs, sur quarante ans. Résultats: les corps deviennent de plus en plus petits, mais l'envergure de leurs ailes est plus grande. Pourquoi? Parce que c’est plus efficace pour refroidir leur température corporelle.

De leurs côtés, les ours polaires aussi sont au régime sec à cause du climat. L'ONG Polar Bear International a surveillé les habitants des banquises, en particulier les femelles. La hausse des températures dans ces régions polaires affecte leur gabarit, elles ont perdu en moyenne 65 kg et 5 cm entre 1980 et 2010.

**Les prédictions.** Et les prochaines évolutions? En 2020, [des biologistes s’étaient essayés au difficile exercice de la prédiction](https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0960982220308198). Ils ont voulu savoir à quoi allait ressembler la faune du futur. Par exemple, ils ont estimé que si la planète se réchauffait de 5 degrés:

* les rats auront des queues plus longues de 2,5 mm,

* les oiseaux, des becs plus larges de 20 à 70%,

* et que la couleur de certaines espèces de chouettes sera plus foncée.

#### Voir aussi: [Les arbres peuvent être obèses, et c’est notre faute](https://www.heidi.news/climat/les-arbres-peuvent-etre-obeses-et-c-est-notre-faute-video)

Par contre, si ces changements d’environnement arrivent trop vite, et que les espèces n'ont pas le temps d'évoluer pour survivre, ce sont les conditions parfaites pour une extinction de masse.

https://www.heidi.news/articles/le-climat-fait-evoluer-les-animaux-plus-vite-que-les-pokemon-video

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Aux Etats-Unis, le «shutdown» évité aux frais de l’aide à l’Ukraine

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/82bff65b-ad2a-4ce7-9c9a-fb1ce6f1967e/medium" /><p>Samedi, le Congrès américain a adopté en dernière minute une mesure d’urgence pour financer l’administration fédérale, évitant ainsi sa paralysie. Mais dans le texte, aucune trace de l&#39;aide à l&#39;Ukraine.</p><p>Il s’en est fallu de peu. Samedi, quelques heures avant que ne sonne la fin de l’année fiscale, le Congrès américain s’est accordé sur une mesure d’urgence pour financer l’administration fédérale. Evitant ainsi le «shutdown», c’est-à-dire la suspension des services fédéraux, qui aurait laissé 1,5 million de fonctionnaires sans salaire et perturbé une <a href="https://www.nytimes.com/article/government-shutdown.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">multitude de services et d’organismes</a> (les parcs nationaux, le trafic aérien, certains musées, les systèmes de santé, l’aide alimentaire). Jusque-là, aucun projet de loi de finances n’avait recueilli suffisamment de voix pour être adopté.</p><p>Toutefois, le soulagement est provisoire: l’arrangement n’est valable que quarante-cinq jours. Les élus devront donc rapidement plancher sur un projet plus durable afin d’éviter de repartir pour un tour le 17 novembre prochain.</p><a href="/articles/aux-etats-unis-le-shutdown-evite-aux-frais-de-l-aide-a-l-ukraine">Voir plus</a>

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Panneaux solaires: serons-nous bientôt tous des producteurs d'électricité?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/3d6d9ae7-cde9-473d-8887-af0df87275e2/medium" /><p>En Allemagne ou au Danemark, les coopératives de producteurs-consommateurs d’énergie renouvelable ont donné un coup de fouet à la transition énergétique. La loi sur l’énergie discutée actuellement par le Parlement suisse devrait favoriser de telles initiatives citoyennes. Mais certaines communes se sont déjà lancées.</p><p>Un des problèmes connus du déploiement des énergies renouvelables en Suisse, c’est le manque de main d’œuvre spécialisée. Mais donnez ce genre de projet à une coopérative de consommateurs-producteurs et ils viendront avec des solutions aussi originales qu’efficaces.</p><p>Avec deux de ses camarades, Wael Assaidi, élève de 11e au collège de la Coquerellaz à Ecublens, vient de passer une journée sur la toiture de l’établissement, visseuse en main, à aider les <em>solaristes</em> à monter des structures de panneaux solaires. <em>«On m’a dit que c’est un nouveau métier alors j’ai voulu essayer. Et c’était cool»</em>, commente le jeune homme.</p><a href="/articles/panneaux-solaires-serons-nous-bientot-tous-des-producteurs-d-electricite">Voir plus</a>

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L'histoire de la petite Bridget, née handicapée d'une GPA et abandonnée en Ukraine

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/6dff1d5e-7e4c-45e3-a928-223cdab74564/medium" /><p>Née handicapée d’une GPA en Ukraine, Bridget a été abandonnée par ses parents américains et placée dans un orphelinat près de Zapporijjia, avant d’être adoptée par un autre couple américain après le début de l’invasion russe. Son histoire révèle la face sombre d’une industrie où la vie n’est pas toujours protégée comme elle le devrait.</p><p>Philip Graves se brosse les dents, un soir de janvier 2011, lorsque son épouse, Kristie, arrive en coup de vent dans la salle de bains. <em>«Nous devons adopter un autre enfant»</em>, s&#39;exclame-t-elle, les yeux brillants.</p><p>Les Graves en ont déjà quatre, Owen, Kara et Ethan, leurs enfants biologiques, et Eliana, une fillette souffrant de <em>spina bifida</em>, une malformation des vertèbres, qu&#39;ils ont adoptée en Arménie en 2017, à l&#39;âge de trois ans.</p><a href="/articles/l-histoire-de-la-petite-bridget-nee-handicapee-d-une-gpa-et-abandonnee-en-ukraine">Voir plus</a>

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Quand y aura-t-il enfin un seul dossier électronique du patient pour tout le monde?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/cac81167-420d-4504-a5ea-f0d2a7105883/medium" /><p>Le dossier électronique du patient souffre de fédéralisme aigu: derrière ce nom se cachent huit communautés de référence et trois plateformes techniques, pas compatibles entre elles. Un système nébuleux, mais qui devrait à terme se simplifier.
<br/><br/>
<em>Cet article a été réalisé dans le cadre d&#39;un partenariat avec la plateforme e-santé <a href="https://fr.abilis.ch/" rel="nofollow noopener" target="_blank">Abilis</a>, avec soutien financier sans immixtion éditoriale, dans le contexte de notre <a href="https://www.heidi.news/evenements/masterclass-soigner-avec-le-dossier-electronique-du-patient" rel="nofollow noopener" target="_blank">masterclass sur le DEP</a>.</em></p><p>C’est la proposition choc de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS)  <a href="https://www.gdk-cds.ch/fr/la-cds/communiques-de-presse/detail/dossier-electronique-du-patient-la-conference-des-directrices-et-directeurs-de-la-sante-propose-une-centralisation" rel="nofollow noopener" target="_blank">tombée le 11 septembre</a>: «L’approche décentralisée choisie pour le dossier électronique du patient (DEP) ne s’est pas avérée judicieuse jusqu’ici. C’est pourquoi le DEP devrait désormais être piloté et financé de manière centralisée et uniforme. La CDS prône une fusion des huit fournisseurs de DEP certifiés en une seule et unique institution d’exploitation».</p><p><strong>Pourquoi une telle proposition.</strong> Dans le cadre de la révision complète de la loi fédérale sur le dossier électronique du patient <a href="https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/strategie-und-politik/nationale-gesundheitsstrategien/strategie-ehealth-schweiz/umsetzung-vollzug/weiterentwicklung-epd.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">lancée en juin dernier par le Conseil fédéral</a>, la CDS a tenu à proposer une simplification radicale de ce dossier. Cette évolution sera notamment abordée durant la masterclass organisée par <em>Heidi.news</em> pour mieux «soigner avec le dossier électronique du patient».</p>#### S’inscrire à notre masterclass: [Soigner avec le Dossier électronique du patient](https://www.heidi.news/evenements/masterclass-soigner-avec-le-dossier-electronique-du-patient)

**De quoi on parle.** Ce qu’on appelle le dossier électronique du patient est une interface numérique décentralisée, reposant sur plusieurs solutions technologiques gérées par différents organismes privés certifiés par la Confédération. Difficile de faire plus compliqué pour un système censé devenir — selon les mots du Conseil fédéral — «[un pilier du système de santé](https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/das-bag/aktuell/medienmitteilungen.msg-id-96137.html)».

#### Lire aussi: [Berne fait le forcing sur le dossier électronique du patient, boudé par les Suisses](https://www.heidi.news/sante/berne-fait-le-forcing-sur-le-dossier-electronique-du-patient-boude-par-les-suisses)

A cette difficulté de conception s’ajoute le fait que le DEP a été pensé pour les patients et pas vraiment pour les soignants. En pratique, les systèmes informatiques primaires des médecins, hôpitaux et autres professionnels de santé ne sont pas compatibles avec le DEP.

Prenons l’exemple d’un cabinet médical désirant téléverser des documents médicaux dans le dossier électronique de son patient. Il doit extraire lesdits documents de son système informatique, les télécharger sur son ordinateur, s’identifier sur la plateforme internet du DEP, y trouver le bon patient et y téléverser les documents un à un — sans oublier de renseigner les métadonnées de la pièce ajoutée au DEP.

«Le transfert des documents patients représente un travail chronophage pour les soignants», commente le Dr Dominique Bünzli, président de la société neuchâteloise de médecine, qui poursuit:

> «Essayez d’imaginer ce que cela représente pour un médecin qui reçoit entre 10 et 20 patients par jour alors que chaque patient génère plusieurs documents pertinents lors de sa prise en charge… Cet exercice n'est tout simplement pas praticable à large échelle au quotidien.»

De leur côté, les patients sont confrontés à des choix cornéliens: quelle solution privilégier et quelle identité électronique adopter. Parce qu’ouvrir un DEP implique de devoir se doter d’une identité électronique. Sans eID, pas de DEP!

Concrètement, un patient romand a plusieurs solutions différentes pour ouvrir son dossier électronique ([il en existe huit au niveau national](https://www.dossierpatient.ch/professionnels/adopter-dep)):

* Abilis est actif dans toute la Suisse romande

* Mon dossier santé n’est disponible qu’à Neuchâtel

* Cara est actif à Fribourg, Genève, Jura, Valais et Vaud

Pour ce qui est de l’identité électronique, les patients romands ont aussi le choix entre [plusieurs fournisseurs](https://www.dossierpatient.ch/identites-electroniques-certifiees):

* TrustID

* SwissID

* GeneveID

* VaudID-Santé

Mais toutes les identités électroniques ne donnent pas accès à tous les dossiers électroniques. Ainsi, les identités électroniques vaudoises et genevoises ne permettent de se connecter qu’au système Cara. SwissID, identité électronique de la Poste, ne donne pas accès au DEP d’Abilis. En fait, seul TrustID de la société Elca permet d’accéder à toutes les plateformes DEP disponibles dans le pays.

**Problèmes d’interopérabilité.** Cette offre, plus confuse que profuse, souffre d’une limitation majeure: l’absence d’interopérabilité entre les différents systèmes. Un problème connu, mais qui n’est pas encore résolu: tous les systèmes ne «parlent» pas encore la même langue…

Patrice Hof, secrétaire général de Cara:

> «Notre système est actuellement interopérable avec tous les fournisseurs utilisant la plateforme développée par la Poste *(soit la grande majorité des DEP du pays, ndlr)*. 
>
> La Poste et Abilis *(solution dévelopée par les pharmaciens du pays, ndlr)* sont en train de corriger les derniers dysfonctionnements. Une prochaine mise à jour devrait alors permettre d’activer l’interopérabilité entre Cara et Abilis.
>
> AD Swiss *(système réservé aux professionnels de santé, ndlr.)* n’est interopérable avec personne puisque ce fournisseur n’est toujours pas en service, ce qui commence à poser un véritable problème d’équité: les prestataires de soins affiliés à ADSwiss n’ont aucune obligation d’utiliser le DEP puisqu’il n’est pas en service, alors que les prestataires affiliés aux autres communautés se plient aux exigences de la loi.»

Chez Abilis *(partenaire de cet article, ndlr.)*, on confirme que les différents systèmes proposés par la Poste seront interopérables à celui d’Abilis d’ici la fin de l’année 2023.

Mais chez eHealth Suisse, organe de coordination entre la Confédération et les cantons pour l’introduction du DEP, on est moins optimiste. Isabelle Gassmann-Hofmänner, du service communication, risque une estimation:

> «L'interopérabilité nationale entre tous les fournisseurs de DEP sera assurée au 4e trimestre 2024».

https://www.heidi.news/articles/quand-y-aura-t-il-enfin-un-seul-dossier-electronique-du-patient-pour-tout-le-monde

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On partage 25% de gènes en commun avec la banane [VIDEO]

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/77adea7d-7899-4ff5-b012-601d77a2336c/medium" /><p>Connaissez-vous vraiment toute votre famille? Et si certains logaient dans votre panière à fruits? Dans cette vidéo de PopScience réalisée en collaboration avec l&#39;Institut suisse de bio-informatique (SIB), vous allez en apprendre plus sur vos origines.</p><p>Quand vous montez un meuble Ikea, vous avez besoin d’une notice. Pour notre corps, c’est un peu la même chose. Pour le corps humain, mais aussi pour l’ensemble des êtres vivants sur Terre, cette notice, qu’on appelle l’information génétique, est stockée dans nos cellules, dans notre ADN, et plus précisément dans certaines régions de notre ADN appelées gènes. L’être humain possède 20’430 gènes. Mais à quoi servent-ils?</p><p><strong>Ces gènes pour savoir qui on est.</strong> Si on analyse les gènes d’Usain Bolt, il est possible que l&#39;on découvre qu’il a des prédispositions pour le sprint. Si on analyse les gènes de Bart et Lisa Simpsons, on saura qu’ils sont frères et sœurs. Bart et Lisa partagent d’ailleurs presque 100% de leurs gènes, puisqu&#39;ils les ont tous hérité de leurs ancêtres proches: leurs grand-parents, par exemple.</p>#### Voir aussi: **[Pourquoi on ne ressemble pas à ses frères et sœurs?](https://www.heidi.news/sciences/pourquoi-on-ne-ressemble-pas-a-ses-freres-et-s%C5%93urs-video)**

**Ces gènes pour connaître** **nos ancêtres.** L’analyse de notre patrimoine génétique nous a permis de savoir que les chimpanzés sont nos cousins. Si c’était évident pour Tarzan, ça ne l’était pas forcément pour tout le monde. Pour le savoir, on a comparé l’information génétique d’un humain et celle d’un autre primate. Résultat: nous partageons 98% de nos gènes. On estime que notre ancêtre commun a vécu il y a environ 6 millions d’années.

Et là où c’est surprenant, c’est qu’on a aussi des cousins un peu plus éloignés:

* Le chien: 95 % de gènes en commun

* Le moustique: 49% de gènes en commun

Et nous n’avons pas de la famille seulement parmi les animaux:

* La banane: 27% de gènes en commun

* La tomate: 22% de gènes en commun

**Concentrons-nous sur la banane.** Vous pouviez imaginer que nous sommes aussi proches de la banane ? En fait, nous et le bananier, on a un ancêtre commun qui vivait il y a 1,5 milliard d’années. 

Et comment peut-on estimer ce chiffre? Pour répondre à cette question, les scientifiques utilisent des outils bio-informatiques et cherchent ces fameux gènes en commun entre deux espèces, que l’on appelle des orthologues. Ils peuvent ainsi comparer les séquences deux à deux: 20’430 gènes humains avec les 36’000 gènes de la banane pour retrouver ceux qui se ressemblent le plus. Cela représente beaucoup, beaucoup, beaucoup de calculs.

#### Lire aussi: **[Le génome humain séquencé en entier – ah bon, ce n’était pas déjà le cas?](https://www.heidi.news/sciences/le-genome-humain-sequence-en-entier-ah-bon-ce-n-etait-pas-deja-le-cas)**

C’est comme ça que les scientifiques ont découvert que 25% de nos gènes ont un équivalent reconnaissable chez la banane! Ces gènes en communs codent pour des protéines qui sont indispensables à la vie de l’homme et de la banane, comme la fabrication de l’ADN ou la fabrication d’autres protéines. 

Par contre, les gènes qui codent la photosynthèse ou la fabrication de la vitamine C ne sont présents que chez la banane; les gènes qui codent pour des protéines impliquées dans le fonctionnement des neurones ou la fabrication des os ne sont présents que chez l’homme.

**LUCA, le même ancêtre pour tous.** Le fait qu’on ait des gènes communs avec des animaux, des champignons ou même des plantes, ça veut dire une chose: il y a un lien évolutif qui unit tous les organismes vivants. En gros, on a tous le même ancêtre.

Et les scientifiques continuent de le chercher : ce dernier ancêtre commun universel est appelé LUCA. Pour l’identifier, il faut d’abord identifier quels sont les gènes qu’on retrouve chez tous les organismes vivants, des bactéries à l’homme, en passant par les champignons et les plantes. Il y en aurait environ 1000.

#### Pour aller plus loin:

* [LightOfEvolution.org](https://lightofevolution.org/)

* [OhMyGenes.org](https://ohmygenes.org/)

* [Les activités grand public du SIB](https://www.sib.swiss/about/activities-for-the-public)

https://www.heidi.news/articles/on-partage-25-de-genes-en-commun-avec-la-banane-video

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Face à des curateurs indélicats, la détresse de certains protégés

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/b630197e-8c07-4a14-8313-de2e746138f3/medium" /><p>Vieillissante, Edwige a dû souscrire aux services d’un avocat curateur pour prendre soin de sa fortune. Nicolas a dû composer avec le curateur nommé par le tribunal pour sa mère âgée, dont il souhaitait pourtant s’occuper. Tous deux gardent un souvenir cuisant de leur expérience, s’étant senti infantilisés et dépossédés.</p><p>En janvier 2019, Edwige <em>(prénom modifié)</em>, sous curatelle depuis six mois, a rendez-vous à l’étude de son curateur. De retour à son domicile, elle est tellement secouée qu’elle ne peut s’empêcher de glisser quelques mots sur l’entrevue dans un mail envoyé à une connaissance : </p><p>«<em>Bonjour XX,</em></p><p><em>Je sors d’un entretien avec Me Elaret [nom modifié à sa demande], le curateur.</em></p><p><em>Lamentable. 30 minutes pendant lesquelles il m’a démolie par ces remarques :</em></p><p><em>Que je dépense plus que je gagne.</em></p><p><em>Que je n’ai aucune notion de la réalité.</em></p><p><em>Que je devrais commencer par réduire mon train de vie.</em></p><p><em>Que j’ai choisi un avocat qui me coûte cher, alors que je n’en ai pas besoin. (…)</em> </p><p><em>Que la curatelle devrait être définitive car je n’ai pas de capacité de discernement.</em></p><p><em>Bref, je dégringole à nouveau. (…)</em></p><p><em>Bien amicalement.</em></p><p><em>Edwige</em>.»</p><a href="/articles/face-a-des-curateurs-indelicats-la-detresse-de-certains-proteges">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/face-a-des-curateurs-indelicats-la-detresse-de-certains-proteges

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Le dossier électronique du patient souffre, mais se soigne

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/69cf5735-9f41-41e5-8ec0-2ee7bda87a5e/medium" /><p>Boudé par la population et vertement critiqué par les professionnels de la santé, le dossier électronique du patient souffre d&#39;un désintérêt quasi généralisé. Un constat qui pousse les différents acteurs de ce dossier à améliorer l&#39;outil pour renforcer son utilité.
<br/><br/>
<em>Cet article a été réalisé dans le cadre d&#39;un partenariat avec la plateforme e-santé <a href="https://fr.abilis.ch/" rel="nofollow noopener" target="_blank">Abilis</a>, avec soutien financier sans immixtion éditoriale, dans le contexte de notre <a href="https://www.heidi.news/evenements/masterclass-soigner-avec-le-dossier-electronique-du-patient" rel="nofollow noopener" target="_blank">masterclass sur le DEP</a>.</em></p><p>Les mots sont durs: «échec», «scandale», «gabegie», «fiasco». Le moins qu’on puisse dire, c’est que le dossier électronique du patient (DEP) génère une avalanche de critiques sévères de la part des professionnels de la santé. Du côté de la population, il peine également à convaincre. Que faire pour que cet outil numérique, censé «<a href="https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/das-bag/aktuell/medienmitteilungen.msg-id-96137.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">devenir un pilier du système de santé</a>», prenne son envol?</p>
<h4>Lire aussi: <a href="https://www.heidi.news/cyber/le-dossier-electronique-du-patient-devient-enfin-un-vrai-enjeu-national" rel="nofollow noopener" target="_blank">Le dossier électronique du patient devient (enfin) un vrai enjeu national</a></h4>
**Pourquoi on en reparle.** La complexité du dossier électronique du patient rebute. Même les personnes les mieux disposées à son égard reconnaissent les failles du dispositif, accessible à tous depuis deux ans. Pourtant, le DEP est censé faciliter et améliorer l’échange de données entre patients et soignants. Pour comprendre les enjeux, *Heidi.news* organise une masterclass pour mieux «soigner avec le dossier électronique du patient».

#### S’inscrire à notre masterclass: [Soigner avec le Dossier électronique du patient](https://www.heidi.news/evenements/masterclass-soigner-avec-le-dossier-electronique-du-patient)

**<section class=box> Quelques chiffres**

D’après les données en date de fin août 2023, le dossier électronique du patient, c’est:

* 25'213 DEP ouverts en Suisse.

* Trois plateformes techniques (La Poste, BINT et AD Swiss).

* Huit communautés de référence, dont une à l’usage exclusif des professionnels de la santé.

* 14% des cabinets médicaux connectés.

* 50% des hôpitaux connectés.

* 4% des pharmacies connectées.

* 38% des EMS connectés.**</section>**

**Le contexte.** Lancé en 2021 après de nombreuses années de gestation, le DEP se heurte à la réticence des professionnels de santé. Une [évaluation menée dans la région lausannoise](https://www.cara.ch/Htdocs/Files/v/7103.pdf/DEPBiopole/Rapport_final2_221122.pdf) entre novembre 2021 et 2022, commandée par Cara, montre l’ampleur du défi:

> «Il ressort de cette étude que les valeurs ajoutées attendues du DEP ne sont pas encore expérimentées dans la pratique. Les freins sont actuellement perçus comme plus importants que les bénéfices, ce qui amène parfois à une perception d’un outil non utile, difficilement utilisable et donc pas utilisé par les professionnels.
>
> De leur côté, les patients qui se motivent pour aller au bout de la procédure d’inscription se retrouvent le plus souvent face à un DEP vide et non utilisé par leurs répondants de santé.»

Pour que l’outil soit utilisable, utilisé et utile, un changement de paradigme est nécessaire, selon les auteurs de l’évaluation présentée en mars 2023 lors d’une conférence à Lausanne. Nathalie Rizzotti, co-autrice, relevait:

> «Il est nécessaire de prioriser le développement du DEP comme un système de santé publique avec une orientation client, pour les citoyens. Cela demande de considérer les professionnels de santé comme des partenaires faisant partie intégrante du système devant délivrer le service en tant que fournisseurs de prestations.»

Conçu pour les patients, le DEP est censé devenir un service de santé publique utilisé par tous et en priorité par les soignants. La Confédération a décidé de pousser en ce sens à la fin du mois de juin, en proposant une [refonte de la Loi fédérale sur le dossier électronique du patient](https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/das-bag/aktuell/medienmitteilungen.msg-id-96137.html). La procédure de consultation dure jusqu’au 19 octobre, pour une entrée en vigueur envisagée en 2027. Les quatre principales évolutions prévues sont:

* Une affiliation obligatoire pour les professionnels de la santé du secteur ambulatoire

* Le DEP pour tous les assurés

* Un financement durable et répartition claire des compétences entre la Confédération et les cantons

* La mise à disposition des données du DEP pour la recherche

#### Lire aussi: [Berne fait le forcing sur le dossier électronique du patient, boudé par les Suisses](https://www.heidi.news/sante/berne-fait-le-forcing-sur-le-dossier-electronique-du-patient-boude-par-les-suisses)

**Amélioration en continu.** En attendant cette évolution législative, les différents acteurs du secteur avancent et mettent déjà en place de nombreuses améliorations. A commencer par eHealth Suisse, organe de coordination entre la Confédération et les cantons pour l’introduction du DEP, qui «travaille actuellement sur le développement de l’ordonnance électronique, du carnet d’allergie et d’intolérance, du rapport de transition électronique, des demandes de tests de laboratoire ou de radiographie et du passeport d’urgence», énumère Isabelle Gassmann-Hofmänner, du service communication d’eHealth Suisse.

A ces projets s’ajoutent deux éléments concrets qui doivent être intégrés rapidement dans le DEP:

* Le carnet de vaccination électronique, d’ici à fin 2023;

* le plan de médication, d'ici à juin 2024.

**Les évolutions romandes.** Les évolutions au niveau national doivent être implémentées par les huit fournisseurs de DEP certifiés dans le pays, dont trois sont actifs en Suisse romande: Cara pour les cantons de Genève, du Valais, de Vaud, de Fribourg et du Jura; Mon dossier santé à Neuchâtel; Abilis pour tous les cantons.

Chez Abilis *(partenaire de cet article, ndlr.)*, qui propose le seul DEP actif au niveau national, les améliorations en cours portent sur l’extension du réseau de pharmacies habilitées à ouvrir un DEP. Madiha Favre, directrice marketing et communication chez Ofac Group, coopérative professionnelle des pharmaciens suisses qui gère la plateforme numérique Abilis:

> «500 pharmacies ont déjà signé le partenariat Abilis. A ce jour près de 60 pharmacies sont prêtes à ouvrir des DEP et 70 d’ici fin septembre. Le processus de certification et de formation pour être habilité à ouvrir des DEP explique ce délai.»

Du côté de Cara, des améliorations supplémentaires sont prévues. Patrice Hof, secrétaire général, commente:

> «Les actions prioritaires de Cara portent sur deux axes: embarquement des professionnelles et des professionnels de santé et simplification du processus d’ouverture d’un dossier.»

Ainsi, les «laboratoires du groupe Medisupport publient automatiquement leurs rapports dans le dossier des patients depuis le printemps dernier», poursuit Patrice Hof. Depuis le mois de juin dernier, Cara a aussi mis en place une rémunération pour les médecins et pharmaciens qui accompagnent leurs patients lors de l’ouverture d’un DEP.

Une nouvelle étape importante est encore prévue dès le mois d’octobre: le raccordement du DEP à [Pulse Medica](https://www.pulsemedica.ch), application de gestion de l’activité médicale et paramédicale. Patrice Hof:

> «Le raccordement des systèmes primaires *(des cabinets médicaux, ndlr.)* simplifie radicalement l’utilisation du DEP par les professionnels de santé et permet une meilleure adhésion des cabinets.»

Du côté des patients, les démarches pour ouvrir un DEP ont été simplifiées: plus besoin d’attendre ses codes d’accès temporaires par courrier postal pour accéder à l’outil numérique. D’ici à la fin de l’année, il devrait également être possible d’ouvrir son dossier directement avec son identité électronique (eID). Enfin, une demande de publication de documents a été intégrée au processus d’ouverture d’un DEP. Cela permet aux patients d’obtenir un dossier documenté dès son ouverture.

https://www.heidi.news/articles/le-dossier-electronique-du-patient-souffre-mais-se-soigne

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«Pour être curateur, il faut être rigide»: l’avocat mis en cause dans notre enquête s’exprime

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/bb0448b6-b809-4503-bd53-361e9f8f48f4/medium" /><p>Mis en cause par des protégés ou des proches de protégés rencontrés dans le cadre de cette enquête, Maître Luc Elaret, avocat-curateur à Genève, a accepté de rencontrer Heidi.news, sous réserve qu’aucun dossier précis ne soit abordé et que son nom ne soit pas cité. Selon sa conception, le curateur est «un chien de garde».</p><p>L’affaire s’est révélée plus facile qu’anticipé. Quelques heures après avoir été approché par e-mail, Maître Luc Elaret <em>(nom modifié à sa demande)</em> accepte le principe d’un entretien. Le nom de cet avocat, connu sur la place de Genève pour multiplier les mandats de curateur, est revenu plusieurs fois dans la bouche de témoins rencontrés dans le cadre de cette enquête, en des termes très peu élogieux.</p><p>Dans <a href="https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/curatelle-cherement-payee-j-ai-besoin-de-savoir-si-je-me-suis-fait-rouler-dans-la-farine" rel="nofollow noopener" target="_blank">l’épisode 3</a>, un ancien policier de 50 ans l’ayant eu comme curateur pour des problèmes d’addiction et d’anxiété, nous le décrit comme «<em>très sec, arrogant presque».</em> Il s’indigne d’avoir reçu une facture – 25’000 francs en deux ans et demi – bien supérieure à la somme annoncée par l’avocat en début de curatelle. Dans <a href="https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/qui-se-souvient-d-emilie" rel="nofollow noopener" target="_blank">l’épisode 1</a>, nous décrivions la situation d’Emilie, 96 ans, qui s’est indignée des manières brusques de Luc Elaret avant, perdant en autonomie au fil des ans, de se murer dans sa maison.</p>
<ul>
<li><p>«<em>J’ai toujours plaisir à évoquer une partie de mon métier. Par contre, nous sommes bien d’accord sur le fait qu’il ne s’agira en aucune façon d’évoquer tel ou tel dossier en particulier</em>, précise l’intéressé. <em>Ma conception du secret est absolue.»</em></p></li>
<li><p>Dans un nouvel échange le lendemain, Luc Elaret pose une deuxième condition: prendre connaissance à l’avance des questions qui lui seront posées. Le cadre de l’interview s’annonce contraint, mais l’enquête exige que nous le rencontrions. Nous nous plions à cette demande.</p></li>
<li><p>La troisième condition sera formulée après l’entrevue. <em>«Je n’entends pas être cité nommément dans votre article»</em>, écrit Me Elaret après avoir, dit-il, sollicité sans succès le TPAE pour être délié du secret concernant ses protégés.</p></li>
</ul>

<h3><strong>Ambiance glaciale</strong></h3>
<p>Nous nous retrouvons à son étude le jour convenu, sous une météo déjà estivale. Pourtant, dès les politesses d’usage échangées, l’ambiance vire au glacial. Physique sec, petites lunettes, lèvres pincées et costume anthracite, l’avocat-curateur est sur la défensive. Il se racle la gorge et s’agace: «<em>J’ai l’impression d’être agressé, je ne comprends rien</em>», dit-il, avant d’insister pour faire cette mise au point : «<em>Je suis avocat généraliste. L’activité de curateur n’est pas mon travail principal. Je travaille depuis de longues années dans le domaine de la protection de l’adulte et de l’enfant, pour une partie de mon temps seulement. Je n’ai pas envie qu’on me colle une étiquette professionnelle.</em>»</p><p>À mesure que les minutes s’égrènent, l’atmosphère se décrispe. L’avocat se détend, s’anime sur sa chaise, et finit par se révéler intarissable. À dire vrai, l’entretien relève plus de la conversation à sens unique que de l’interview journalistique: les conditions fixées interdisent d’aborder des points précis soulevés par les protégés de Me Elaret ou de le faire réagir aux affirmations mettant en cause son travail ou son comportement. Pas de place pour les  questions qui fâchent: les dés sont pipés. Nous le laissons donc s’exprimer sur la vision qu’il a de son métier, des personnes sous protection en général et des rapports entre les curateurs privés et le TPAE.</p>
<h3>Témoignage d’un curateur décrié</h3>
<p>Quand le rendez-vous s’achève, deux heures se sont écoulées pendant lesquelles Me Elaret a parlé sans quasiment s’interrompre. L’auteure de ces lignes a noirci les pages d’un demi cahier de notes d’où ne transpire pas une empathie excessive. En voici les extraits les plus intéressants ou révélateurs.</p><a href="/articles/pour-etre-curateur-il-faut-etre-rigide-l-avocat-mis-en-cause-dans-notre-enquete-s-exprime">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/pour-etre-curateur-il-faut-etre-rigide-l-avocat-mis-en-cause-dans-notre-enquete-s-exprime

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Curatelles: lettre ouverte aux députés genevois

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/bb0448b6-b809-4503-bd53-361e9f8f48f4/medium" /><p>J’adresse une lettre ouverte aux membres du Grand Conseil. Car les découvertes de notre enquête sur les curatelles dans le canton sont inquiétantes. Car le parlement s’est déjà penché à de nombreuses reprises sur le sujet. Le système piloté par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE) semble sourd aux avertissements, plaintes et recours des «protégés» ou de leurs proches.</p><p><strong>Mesdames et Messieurs les députés,</strong></p><p>Je me permets de vous signaler une enquête en cours de publication sur <em>Heidi.news,</em> à propos d&#39;un sujet qui a déjà occupé le Grand Conseil. Le 28 février 2020, vous-même ou vos prédécesseurs avez prié le Conseil d&#39;Etat de mettre de l&#39;ordre dans les curatelles, avec le vote de <a href="https://ge.ch/grandconseil/data/loisvotee/MV02616.pdf" rel="nofollow noopener" target="_blank">la motion 2616</a>. D’autres débats et motions l’ont précédé, un rapport de la commission des Droits de l’Homme lui a succédé (en août 2021).</p>Mais… Le problème semble loin d'être réglé.

Notre journaliste, Angélique Mounier-Kuhn, est partie du cas d'une vieille dame enfermée chez elle, apparemment contre son gré, pendant que les gouvernantes qui lui ont été imposées font la fête dans son jardin. Depuis des années, les avertissements des voisins ou des amis restent lettre morte. Puis la pelote a été déroulée, avec d'autres cas. Cinq articles sont en ligne, plusieurs autres vont suivre. [Voici la page pour suivre l'avancée de l'enquête](https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar).

**Dans l'épisode paru jeudi** ([cliquez ici pour lire gratuitement l'article](https://www.heidi.news/articles/curatelle-cherement-payee-j-ai-besoin-de-savoir-si-je-me-suis-fait-rouler-dans-la-farine/gifts/Fb86RUSaBJiKcpusektmJXmGjq1hHw9NPq83GSoR)), on découvre que les protégés ignorent combien va coûter leur curateur et sont débités à leur insu.

Un avocat genevois, connu pour cumuler ce genre de mandats, témoigne de pratiques tarifaires curieuses. Alors qu'il promet à un ancien de la police cantonale que cela ne coûtera que 200 à 400 francs par mois, il facture jusqu'à 1130 francs par mois à son «protégé».

**S'agit-il de malheureux cas isolés**, comme le soutient le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE)? Ou est-ce révélateur de la défaillance d’un système qui a tardé à se remettre en cause et frise désormais l’embolie?

Dès la publication des premiers épisodes de cette enquête, nous avons reçu une avalanche d’autres témoignages de la part de nos lecteurs et au-delà. Beaucoup d’amertume dans leurs lettres: «Nous aussi regrettons d'avoir mis le doigt dans l'engrenage infernal du TPAE», dit l’une. «Quand on est dedans, on sent que ça peut très vite basculer dans le cauchemar, si on n'obtempère pas. En face, les curateurs nous infantilisent», écrit une autre.

**L'an dernier, nous avons révélé** avec nos confrères du *Temps* que des éducateurs et infirmiers du Foyer de Mancy avaient frappé des enfants autistes, les avaient privés de nourriture ou laissés dans leurs excréments. Cela a déclenché une [enquête importante](https://www.heidi.news/education/rapport-sur-mancy-tout-le-monde-en-prend-pour-son-grade-a-commencer-par-mme-torracinta) de votre sous-commission de gestion – et l'histoire n'est sans doute pas terminée.

Toutes proportions gardées, il y a un point commun avec ce que nous avons découvert pour les curatelles. Dans les deux cas, il s’agit d’êtres vulnérables, que les personnes mandatées pour prendre soin d’eux, sous l’égide de la puissance publique, ont failli à protéger.

**Gageons que ces nouvelles révélations** sauront intéresser les membres de votre assemblée, dans le cadre de la mission de contrôle de l’action publique qui vous échoit.

Bien à vous,\
Serge Michel

https://www.heidi.news/articles/curatelles-lettre-ouverte-aux-deputes-genevois

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Le prix de la vie: comment devient-on mère porteuse?

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/3c226ac4-a0ba-4aa0-be45-c39cd19735b9/medium" /><p>Prise dans le flux de véhicules remplis de réfugiés qui engorgent la frontière avec la Pologne, juste après l&#39;invasion russe, <strong>Katya</strong> repense à la chaîne d&#39;évènements qui l&#39;a amenée à se retrouver à l&#39;arrière de cette voiture, enceinte de sept mois avec le bébé d&#39;une autre. La jeune femme ukrainienne de 24 ans a grandi à Zhytomyr, non loin de Kiev.</p><p>A 16 ans, elle perd sa mère. Quatre ans plus tard, son père décède à son tour dans un accident de la route. Agée à l&#39;époque de 20 ans, elle a déjà une fille de trois ans, dont le père a disparu dans la nature. <em>«Je me suis retrouvée du jour au lendemain avec ma sœur de 8 ans, et mon frère de 19 ans à charge»</em>, livre-t-elle. Elle se met à chercher du travail. <em>«Mais je vis à Novohrad-Volynskyi, une petite ville où il n&#39;y a guère d&#39;opportunités.»</em></p>
<h3><strong>Une publicité sur Facebook</strong></h3>
<p>Un jour, Katya aperçoit une publicité sur Facebook pour la gestation pour autrui (GPA). <em>«Je ne ferais jamais cela à mon corps»</em>, se dit-elle d’instinct. Mais les mois passent et l&#39;argent ne rentre pas, alors elle se résout à contacter le numéro figurant sur l&#39;annonce.</p><p>Une première grossesse en 2019 finit en fausse couche et l&#39;agence la laisse tomber. Par bouche-à-oreille, elle entend alors parler de NestAndCo, une agence qui a bonne réputation dans le milieu. En septembre 2021, elle tombe enceinte au premier essai du bébé d&#39;un couple irlandais d&#39;origine roumaine. La voici mère porteuse.</p><p>Elle rencontre Adriana, la mère, à Kiev avant le transfert de l&#39;embryon, puis à nouveau lors de l&#39;échographie des 20 semaines. Elle l&#39;aime bien. Lorsque celle-ci lui propose de fuir à Cracovie, en Pologne, au début des hostilités, elle prend un taxi pour Lviv, à l&#39;ouest du pays, avec sa fille Anya, 6 ans, et y retrouve la responsable locale de l&#39;agence, qui l&#39;embarque dans sa voiture à destination de la frontière.</p>
<h3><strong>De 20 à 25’000 francs la gestation</strong></h3>
<a href="/articles/le-prix-de-la-vie-comment-devient-on-mere-porteuse">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/le-prix-de-la-vie-comment-devient-on-mere-porteuse

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Curatelle chèrement payée: «J’ai besoin de savoir si je me suis fait rouler dans la farine»

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/c2e2208d-d937-44e9-8a1f-2ec49ae118f5/medium" /><p>Une personne sous protection n’a souvent pas la moindre idée de ce que va coûter la rémunération de son curateur, qui sera directement prélevée sur sa fortune. L’avocat genevois Luc Elaret (nom modifié) a ainsi facturé ses services à un ancien policier 3,7 fois plus cher qu’un autre curateur, à mandat équivalent. «Les protégés sont captifs», dénonce un expert. Certains en viennent à devoir vendre leur maison.</p><p>Patrick Spitzner ne décolère pas. Il dit vouloir «<em>lancer l’alerte</em>». <a href="https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/curatelles-a-geneve-mode-d-emploi" rel="nofollow noopener" target="_blank">Dans l’épisode précédent</a>, nous avons évoqué les circonstances de la mise sous curatelle de cet ancien de la police cantonale de Genève: des addictions et des dépenses compulsives contre lesquelles il pensait se prémunir en sollicitant des mesures de protection. </p><p>Aussi, en août 2019, c’est plutôt avec soulagement qu’un des seuls témoins ayant accepté d’apparaître à visage découvert dans cette enquête accueille la décision du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE) de le placer au bénéfice d’une curatelle de représentation et de gestion administrative ainsi que patrimoniale.</p><a href="/articles/curatelle-cherement-payee-j-ai-besoin-de-savoir-si-je-me-suis-fait-rouler-dans-la-farine">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/curatelle-cherement-payee-j-ai-besoin-de-savoir-si-je-me-suis-fait-rouler-dans-la-farine

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Comment Anzère a construit son chauffage renouvelable pendant que Crans-Montana cafouillait

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/ff148e6f-e5f2-4066-a415-4bed4c0e02e1/medium" /><p>C’est l’histoire de deux communes et stations de ski valaisannes qui se sont lancées dans la construction d’un réseau de chauffage à distance au bois renouvelable. Mais alors que la modeste Anzère est parvenue à relier une centaine de bâtiments et chauffe 80% des lits de la station, Crans-Montana a fait face à 700 oppositions. Et elle n’a toujours pas de chaufferie. Parce que les communes du Haut Plateau n’ont pas eu la chance d’avoir le moteur d’un entrepreneur. </p><p>L’adjectif dynamique qualifie souvent les entrepreneurs, au point de paraître cliché. Toutefois, dans le cas de Markus Mann, il est justifié. La foulée et les gestes de cet entrepreneur allemand, fidèle à la station d’Anzère depuis que son père y a acheté un appartement en 1971, sont rapides. Et son débit de parole tout autant. Avec un enthousiasme communicatif qui n’est peut-être pas étranger au succès du réseau de chauffage à distance au bois qu’il a construit pour la station valaisanne.</p>
<h3><strong>7000 lits chauds</strong></h3>
<a href="/articles/comment-anzere-a-construit-son-chauffage-renouvelable-pendant-que-crans-montana-cafouillait">Voir plus</a>

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Et si l’obésité pouvait aider à combattre le cancer [VIDEO]

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/74640fc2-12b0-47b0-9ac0-8d0f21162bbb/medium" /><p>Le cancer, c&#39;est un peu une guerre entre un ennemi et votre système immunitaire. Et dans cette guerre, l’obésité, elle joue un peu le rôle d’espion ou plutôt d’agent double.  C&#39;est le sujet de ce PopScience réalisé en collaboration avec Ma Thèse en 180 secondes. Dans cet épisode, Eloïse Dupuychaffray, de l&#39;Université de Genève, nous détaille ses recherches.</p><p>«Pour comprendre l’effet de l’obésité sur notre corps, je regarde comment le cancer se développe chez des souris: des mâles, des femelles, mais surtout des souris toutes menues, et des souris bien grassouillettes. Ce qu’on observe, c’est que le cancer est beaucoup plus agressif chez les souris obèses.</p><p>Bon, pas très surprenant, mais c’est ensuite que ça devient intéressant. Ces petites souris, nous avons essayé de les soigner avec un traitement appelé immunothérapie. Bon, vous allez me dire, qu’est-ce que c’est que cette invention encore?</p>### L’immunothérapie, coach de notre immunité

Dans notre corps, nous avons plein de petites cellules qui patrouillent comme une armée, prêtes à nous défendre contre toutes sortes de dangers. Cette équipe de cellules, c’est notre système immunitaire. Mais, le problème, c’est que nos cellules sont parfois fatiguées, pas très attentives, ce qui permet au cancer de s’installer et d’envahir tout notre corps.

#### Voir aussi: [nos vidéos PopScience sur la santé](https://www.heidi.news/videos/popscience)

L’immunothérapie, c’est un peu comme un coach pour notre système immunitaire qui rassemble ces joueurs à la mi-temps. La stratégie avec l'immunothérapie, c'est de réapprendre à notre propre système immunitaire, c'est-à-dire dire nos cellules de défenses, à détecter et à détruire le cancer. Et là, fin du match, le cancer devrait avoir disparu.

Pour ça, revenons à mes petites souris. Je leur ai donné de l’immunothérapie, et ça a plutôt bien diminué le cancer… chez les femelles seulement. Par contre, chez les souris mâles, l’immunothérapie n’a fonctionné que chez les souris obèses. Bizarre, non? Parce qu’on vous dit d’abord que l’obésité, c'est mauvais, ça augmente le risque de cancer, et maintenant on dit que les mâles devraient être obèses pour guérir? Ça n’a pas de sens!

### L’obésité, un avantage?

Fantastique n’est-ce pas? Oui, en théorie, parce qu’en réalité ce traitement ne fonctionne pas chez tout le monde. On essaie donc de comprendre ce qui fait que l'immunothérapie fonctionne ou pas. En particulier, dans mon projet, on regarde l'effet de l'obésité.

On a vu que l'immunothérapie marche plutôt bien chez les souris mâles obèses, mais pas chez les mâles non obèses. On regarde donc ce qu'il y a chez les mâles obèses qui rendrait l'immunothérapie plus efficace.

C’est pour cela que je regarde d’un peu plus près mes souris mâles pour comprendre comment l’obésité peut les aider à guérir avec l’immunothérapie, et surtout, comment cet avantage, je peux l’utiliser chez les autres souris, pour que toutes, mâles, femelles, menues ou grassouillettes, puissent guérir du cancer. Mais attention, sans pour autant leur donner les problèmes liés à l’obésité.»

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De Zurich à New York, la quête impossible de l'avocat suisse des animaux

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/d6c58ce4-b904-4d24-9f87-93cb661cdcb9/medium" /><p>Soutenu par quelque 200 organisations animalistes, l’avocat suisse Antoine Goetschel, qui préside la Global Animal Law GAL Association, tente désespérément d’introduire à l’ONU une convention au nom de ses protégés non humains. Une quête aux allures de supplice de Sisyphe.</p><p>Une silhouette de dandy se dessine à l’arrêt de tram de Klusplatz, à Zurich. Dans la foule de ce quartier populaire, Antoine Goetschel, un des premiers avocats des animaux au monde et notre hôte du jour, se démarque des passants par son allure distinguée. Nous sommes en pleine canicule, mais l’homme porte un costume. «<em>Soigner son apparence, c’est important</em>», précise-t-il, ajustant un petit foulard à motifs qui sort de sa poche.</p><p>Je suggère qu’un bouledogue complèterait son look à merveille. «<em>Les animaux de compagnie, ce n’est pas mon univers,</em> rigole l’avocat. <em>Je les aime bien, mais je n’ai pas besoin d’en avoir chez moi. Ce sont mes clients.</em>»</p><p>Quelques rues plus loin, nous voici arrivés à destination. Une étroite cage d’escalier encombrée nous mène jusqu’à une petite caverne d’Ali Baba. Des statues plaquées or de bouddhas et de divinités tibétaines prennent la poussière devant des toiles, broderies, photos de famille, un trampoline et un «<em>super cristal</em>» qui pèse son demi-quintal. Posés sur un canapé en cuir satiné, nous entamons une interview qui va durer quatre heures.</p><a href="/articles/de-zurich-a-new-york-la-quete-impossible-de-l-avocat-suisse-des-animaux">Voir plus</a>

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Curatelles à Genève, mode d’emploi

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/8b8de4fd-c887-4721-9a71-0906a6a090bd/medium" /><p>Vieillissement de la population, montée de l’individualisme, complexité administrative: le nombre d’adultes sous curatelle ne cesse d’augmenter en Suisse. Ils étaient plus de 100&#39;000 à bénéficier de mesures de protection en 2021. La nouvelle loi introduite en 2013 a mis l’accent sur la préservation de l’autonomie et une personnalisation de l’accompagnement en fonction des besoins des personnes concernées.</p><p>Edwige (prénom modifié à sa demande) n’oubliera jamais le coup de téléphone reçu d’un membre de sa famille à l’été 2018. Elle était alors en vacances à l’étranger. <em>«Regarde dans ta boîte mails, quelque chose d’important t’attend»</em>, l’enjoint son interlocuteur. La Genevoise se précipite sur son ordinateur et ouvre un document à l’entête du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE). Depuis plus d’un an, la pétillante septuagénaire est victime d’une arnaque. Pour tromper sa solitude, elle a, à la suggestion d’un membre de sa famille, fait une rencontre sur Internet. Mais alors qu’elle commence à s’attacher, ce pseudo-amoureux lui demande des virements importants pour de prétendues raisons humanitaires. Habituée à soutenir des causes, Edwige tombe dans le piège. A plusieurs reprises.</p><p>En balayant le courriel, elle découvre que, sans l’en informer, ses proches, inquiets de ne pas arriver à lui faire entendre raison, l’ont signalée au TPAE. Le tribunal a estimé que les intérêts d’Edwige étaient suffisamment menacés pour ordonner des mesures superprovisionnelles, c’est-à-dire prises avant instruction et sans audition de la personne concernée, ni évaluation d’un psychiatre. D’autorité, Edwige a été placée sous curatelle. Elle est privée de l’exercice de ses droits civils (mais les droits politiques sont maintenus), ne reçoit plus son courrier et n’a plus accès à ses comptes. <em>«Ma vie suivait tranquillement son cours. Et soudain, le choc»</em>, frémit-elle au souvenir de ce courriel.</p>
<h3>Un policier sous curatelle</h3>
<p>Pour Patrick Spitzner, 50 ans aujourd’hui, le processus a été moins brutal. En 2019, cet ancien policier cantonal à Genève, l’un des deux seuls témoins de notre enquête à accepter de livrer son expérience de la curatelle à visage découvert, prend conscience que ses dépenses compulsives le mettent financièrement en danger. Atteint d’anxiété et d’addictions, il convient avec son médecin traitant d’adresser un signalement au TPAE en avril. <em>«Nous l’avons fait pour que je puisse être protégé de moi-même»</em>, se remémore le Genevois. Quelques semaines plus tard, le Tribunal institue une mesure de curatelle.</p><p>Que leur démarche ait été volontaire, comme celle de Patrick, ou que leur curatelle leur ait été imposée, à l’image d’Edwige ou d’Emilie rencontrée <a href="https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/le-lit-est-fait-le-frigo-est-plein-qu-est-ce-que-cela-peut-bien-vous-faire" rel="nofollow noopener" target="_blank">dans les précédents épisodes</a>, la Suisse comptait fin 2021 un total de 100’593 adultes au bénéfice de mesures de protection. D’année en année, ce chiffre ne cesse de progresser: 96’885 en 2019, 89’605 en 2016. Les mesures de protections concernaient ainsi 14,04 Suisses pour 1000 habitants à fin 2021 (16,29 dans le canton de Genève), contre 13,79 en 2019 et 12,97 en 2016.</p>
<h3>Augmentation en flèche</h3>
<p>Genève n’échappe pas à la tendance, comme le montre le graphique ci-dessous.</p><p><strong><br/>      <figure>
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          <img src="/placeholder.png" class="lazy" title="Source: Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant" alt="" data-src="https://lh6.googleusercontent.com/yEunWn69vV-oRHn_-YazY_3-Nd99mA2lzP2evQRK9jDbKj5BoffuXn0H4XN6xAWQd6p6U9Flxu6HuqvpSGwsRM0Z-8nzvAkIraOHVlDbY2cz4hzeTFJ-huogzAheWhSrsBWVnM9bt_sNPRwtf7jgkQ"/>
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        <figcaption>Source: Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant</figcaption>
      </figure>
</strong></p><p><em>«L’une des explications à cette progression continue réside dans l’allongement de la durée de vie et les progrès de la médecine»</em>, estime Diana Wider, secrétaire générale de la Conférence en matière de protection des mineurs et des adultes (COPMA), l’organisme intercantonal qui coordonne la coopération entre cantons, Confédération et organisations nationales.</p><p>La Suisse est désormais <a href="https://www.rts.ch/info/suisse/13741888-les-suisses-en-tete-de-classement-de-la-longevite-mondiale.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">championne du monde de la longévité</a>. On y recense aujourd’hui 1888 centenaires (des femmes à 75%), contre 787 en 2000 et 377 en 1990. D’après Daniela Jopp, professeure à l&#39;Université de Lausanne, une fille sur trois et un garçon sur quatre nés après 2000 deviendront à leur tour centenaires. Corollaire du vieillissement de la population, le nombre de personnes atteintes de pathologies telles que Alzheimer ou d’autres formes de démence gagne sans cesse du terrain. Selon la fondation Alzheimer Suisse, 32’200 nouveaux cas sont détectés chaque année (des femmes à 66%). A ce rythme, l’organisation évalue que près de 315 400 personnes pourraient être touchées d’ici 2050, ce qui signifie que personne ne sera à l’abri de compter un proche au bénéfice de mesures de protection dans son entourage et/ou d’être personnellement concerné.</p>
<h3><strong>La montée de l’individualisme</strong></h3>
<p>Outre les gains dans l&#39;espérance de vie, des évolutions sociétales entrent aussi en ligne de compte. Diana Wider, qui est également professeure à la Haute école spécialisée de Lucerne, pointe ainsi «la montée de l’individualisme»: <em>«Les familles n’apportent plus le même soutien qu’autrefois à leurs aînés. Il y a vingt ans, il était encore courant de s’occuper de ses parents. Aujourd’hui, on se sent plus libre de les laisser vieillir dans un établissement médico-social (EMS). A cela s’ajoute le formalisme administratif: avec Internet, il est devenu très compliqué pour elles de remplir le moindre formulaire et les personnes âgées ont de plus en plus besoin d’être accompagnées dans leurs démarches.»</em></p><p>La curatelle est la mesure phare du droit de la protection de l’adulte et de l’enfant régi par le Code civil (articles 360–455). En Suisse, elle se décline sous quatre formes, appliquées en fonction de l’état de la personne concernée, qui vont de la plus légère à la plus restrictive en matière d’autonomie, les trois premières pouvant être combinées entre elles. A titre d’exemple, la curatelle de portée générale, celle qui s’est imposée à Edwige, est prévue pour les personnes ayant particulièrement besoin d’être aidées parce que l’autorité de protection a estimé qu’elles ne jouissaient pas de leur discernement. La curatelle de Patrick se limitait à des mesures de gestion et de représentation.</p>
<h3><strong>Quatre types de curatelles</strong></h3>
<p>Voici les caractéristiques de ces différentes curatelles <a href="https://justice.ge.ch/fr/theme/protection-de-ladulte" rel="nofollow noopener" target="_blank">telles que présentées sur le site</a> du Pouvoir judiciaire du canton de Genève:</p><a href="/articles/curatelles-a-geneve-mode-d-emploi">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/curatelles-a-geneve-mode-d-emploi

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Le dessin de la semaine: Monsieur prix demande le gel des primes maladie

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/e00987f8-01ef-45b2-9b1a-e926cdba6bbb/medium" /><p>Le Surveillant des prix Stefan Meierhans a réuni le 5 septembre à Berne les organisations suisses de consommateurs. Le renchérissement était au centre des discussions. Parmi les mesures demandées figurent le gel des primes maladie et la diminution des frais bancaires.</p><p>L&#39;organisation d&#39;un tel sommet a été jugée nécessaire vu la forte hausse des charges financières qui pèsent sur les consommateurs et consommatrices, et les raisons parfois opaques de cette évolution, a insisté Stefan Meierhans. Les organisations et le Surveillant des prix se sont mis d&#39;accord pour collaborer de manière ciblée sur ce dossier.</p><p>Les soucis financiers auxquels sont confrontés les Suisses et Suissesses vont croissant. On le voit entre autres à la multiplication des annonces envoyées chaque jour aux organisations de protection des consommateurs et au Surveillant des prix, a rappelé celui-ci.</p>

https://www.heidi.news/articles/le-dessin-de-la-semaine-monsieur-prix-demande-le-gel-des-primes-maladie

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A Samsø, au Danemark, les éoliennes paient l’université des enfants

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/3ac1af16-c247-4e38-8aa0-a8e478bf8292/medium" /><p>Comment faire accepter la construction d’éoliennes sur le terrain? Heidi.news a suivi un groupe d’énergéticiens suisses sur l’île-commune de Samsø, devenue autonome en électricité verte dès 2007. Comment? Grâce à une participation des citoyens, à la fois clients et bénéficiaires. Bonne nouvelle, nos énergéticiens ont décidé de s’inspirer de cette approche en Suisse.</p><p><em>«Regardez! On aperçoit les éoliennes de Samsø»</em>. Index tendu sur le pont du ferry, le professeur Stéphane Genoud ne cache pas son plaisir de venir revisiter cette commune exemplaire de la transition énergétique, sur une île de la mer intérieure du Danemark. Il l’a découverte via le projet de l’un de ses étudiants.</p><p>Cette fois, le chercheur en énergie de la Haute Ecole du Valais (HES-SO) est accompagné par la direction et le conseil d’administration d’une petite entreprise électrique romande, la Société électrique des forces de l&#39;Aubonne (SEFA). Stéphane Genoud les a convaincus de faire 14 heures de train et de bateau pour venir s’inspirer de ce qu’a accompli Samsø.</p><p>      <figure>
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          <img src="/placeholder.png" class="lazy" title="Le professeur Stéphane Genoud de la HES-SO Valais.  | Heidi.news / FD" alt="IMG_6133 - copie.jpg" data-src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/346c7d0d-526e-47db-8cc0-e2f4ef3cad1c/large"/>
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        <figcaption>Le professeur Stéphane Genoud de la HES-SO Valais.  | Heidi.news / FD</figcaption>
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</p><p>L’entreprise a pour projet de dresser entre 4 et 7 éoliennes à Bienne, en terre helvète où les turbines sont loin d’être en odeur de sainteté. En Suisse, un projet éolien prend au minimum 20 ans pour aboutir. Encore faut-il que les porteurs du projet aient le temps et la volonté de surmonter les oppositions locales, qui ne manquent jamais de surgir.</p>
<h4><strong>Lire: <a href="https://www.heidi.news/explorations/black-out-le-talon-d-achille-electrique-de-la-suisse/eoliennes-a-sainte-croix-le-long-supplice-des-pales" rel="nofollow noopener" target="_blank">Eoliennes: à Sainte-Croix, le long supplice des pales</a></strong></h4>
<p>Pour l’heure, les cadres de SEFA sont tout ouïe quand l’enseignant explique qu’ici au Danemark, c’est la participation citoyenne qui a été la clé du succès. <em>«Les éoliennes paient les études des enfants»</em>, résume Stéphane Genoud. Depuis le pont du ferry pour Samsø, on dénombre dix turbines <em>«offshore»</em>, à quoi s’ajoutent onze turbines construites à terre, pour 3700 habitants. Avec ses neuf millions d’habitants, la Suisse en compte 42. Cherchez l’erreur.</p>
<h3><strong>A l’académie énergétique</strong></h3>
<p>Les cadres de la SEFA découvrent le lendemain le modèle de turbine employé à Samsø, à l’Ernergi Akademi, dans le petit port de Ballen. Le centre, installé dans un bâtiment évoquant l’architecture viking à la sauce «énergie positive», a été créé en 2007 pour diffuser le modèle local de transition énergétique. Il fait face à une demande qui ne se dément pas.</p><p>Ses clients: des collectivités publiques du monde entier, de l’île de Lombok en Indonésie à la région du Piémont en Italie, en passant par la commune d’Ogata au Japon. Si ses statuts ne lui permettent pas de dégager des profits, l’académie se finance en vendant à hauteur de 8 millions de couronnes danoises (1 million de francs) par an ses conseils.</p><p>      <figure>
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          <img src="/placeholder.png" class="lazy" title="Michael Kristensen resposnable des projets de l&#39;Energi Akademi.  | Heidi.news / FD" alt="IMG_6151 - copie.jpg" data-src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/271eaebe-4635-4887-a4b2-6531a75d1c84/large"/>
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        <figcaption>Michael Kristensen resposnable des projets de l&#39;Energi Akademi.  | Heidi.news / FD</figcaption>
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</p><p>Chef de projet à l’Energi Akademi, Michael Kristensen, qui est aussi pompier et coach du club de foot local, nous explique que son île est devenue un modèle de transition énergétique par le produit de deux concours.</p><a href="/articles/a-samso-au-danemark-les-eoliennes-paient-l-universite-des-enfants">Voir plus</a>

https://www.heidi.news/articles/a-samso-au-danemark-les-eoliennes-paient-l-universite-des-enfants

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Masterclass: Soigner avec le Dossier électronique du patient

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/1a0516fe-c966-4bfd-96c2-ac82f3a224f3/medium" /><p>L’adoption du dossier électronique du patient (DEP) patine en Suisse. Seuls 19’481 dossiers étaient ouverts dans le pays à la fin avril 2023, alors que l’objectif des 20’000 aurait dû être atteint à la fin 2022. La Confédération entend désormais inverser la tendance et «booster» le DEP. Alors que le champ d’application du DEP doit être étendu à tous les secteurs de soins, cette masterclass a pour but d’aider les professionnels de santé à y voir plus clair.</p><p>La masterclass <em><a href="https://www.heidisolutions.news/soigner-avec-le-dep" rel="nofollow noopener" target="_blank">Soigner avec le Dossier électronique du patient</a></em> vous permettra d’avoir une vision globale et pratique des enjeux liés au dossier électronique du patient. Elle aborde <strong>non seulement les opportunités, mais aussi les risques et les contraintes</strong>.<br/><br/><strong>Jeudi 21 septembre à 17h</strong> à notre rédaction (Avenue du Bouchet 2, 1209 Genève).</p><p><strong>Pourquoi participer?</strong></p>Cette masterclass vous apportera des **conseils pratiques** et une **vision claire des enjeux**, notamment en matière de **protection des données**. Vous aurez en main **les clefs pour déterminer comment et pourquoi travailler avec le dossier électronique du patient**.\
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Cette masterclass explore l'utilisation du DEP à travers:

* Le témoignage de Dominique Bünzli, président de la société vaudoise de médecine, qui parlera de son expérience avec le dossier électronique du patient;

* L’expertise de Sébastien Fanti, avocat technologue, et ancien préposé à la protection des données pour le canton du Valais;

* Les explications du Dr. David Volz, Docteur ès Sciences techniques de l’EPFL, et directeur du Département prestations à l’OFAC, la coopérative professionnelle des pharmaciens suisses.

  Les discussions seront animées par Annick Chevillot, journaliste santé Heidi.news.\
  \
  La masterclass sera suivie d'un **apéritif de réseautage**.

  **Qui est concerné?**

  Cette masterclass est destinée aux professionnels de santé (médecins, infirmières libérales, physiothérapeutes…) et à toute personne amenée par sa profession à travailler avec et à utiliser le dossier électronique du patient.

[Lien pour l’inscription](https://www.heidisolutions.news/soigner-avec-le-dep)

Cette Masterclass a été organisée avec le soutien d’[Abilis](https://fr.abilis.ch "Abilis").

*Abilis est une une communauté de référence certifiée au sens de la loi fédérale sur le Dossier électronique du patient (DEP). Cette plateforme, nationale et interprofessionnelle, propose à la population l’ouverture d’un DEP dans une des nombreuses pharmacies partenaires à travers tout le pays. Création d’un identifiant électronique et ouverture du dossier électronique sont effectuées en quelques minutes avec l’accompagnement de l’équipe de la pharmacie. Abilis est une initiative d’Ofac, la coopérative professionnelle des pharmaciens suisses avec la participation de pharmaSuisse.*

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Ukraine, ce pays où les femmes portent les enfants des autres

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/59b0ec18-c3d5-4f1b-9f4b-4f84b98f7504/medium" /><p>Depuis 2015, l’Ukraine est devenue le principal pays au monde pour la gestation pour autrui, du fait du retrait des principaux pays asiatiques. De quoi permettre à Mercedes, en Argovie, à Cathy et Adriana en Irlande, de devenir enfin mères. Moyennant une somme très inférieure à ce qu&#39;aurait coûté la procédure dans l’autre grand pôle mondial de la GPA: les Etats-Unis.</p><p>A 51 ans, <strong>Mercedes</strong> n&#39;était pas une candidate idéale pour la gestation pour autrui (GPA). La Suissesse avait déjà deux enfants adultes, d&#39;un premier mariage, et à son âge, il ne serait pas évident de produire des embryons de bonne qualité. Pourtant, elle et son mari Roland voulaient ardemment un autre enfant, le premier pour lui. Après plusieurs fécondations in vitro (FIV) ratées, accompagnées de fausses couches, la GPA semblait la seule voie possible.</p><p>En décembre 2020, alors que l&#39;épidémie de Covid-19 fait encore rage, cette thérapeute d&#39;origine portugaise quitte son pavillon au milieu de la campagne argovienne à destination de Kiev. Sur place, elle rencontre les responsables d’une agence trouvée en ligne, Vittoria Vita, qui lui présentent différents forfaits de prestations. Elle choisit l&#39;option VIP, pour un coût de 50&#39;000 euros.</p>
<h3>Mères sur catalogue</h3>
<p><em>«Pour cette somme, on me garantissait un bébé»</em>, dit-elle de sa voix douce. Elle aurait droit à un nombre illimité de FIV et de transferts d&#39;embryons. En cas d&#39;échec, l&#39;agence s’engage à utiliser les ovocytes d&#39;une donatrice. En raison de son âge, elle passe directement à la seconde option. La donatrice doit rester anonyme, mais Mercedes se voit offrir de la choisir dans un catalogue contenant <em>«des photos avec des informations sur son poids, sa taille, la couleur des yeux de ses parents et même ses plats préférés.»</em></p><p>La fécondation, avec les ovocytes de la donneuse et le sperme de son mari, donne six embryons. Pour maximiser les chances de succès, l&#39;agence les teste pour repérer des anomalies chromosomiques, comme la trisomie 21. Cela permet aussi de connaître le sexe du futur bébé. <em>«On nous a dit qu&#39;il y avait trois filles et trois garçons,</em> glisse Mercedes. <em>Mon mari voulait un fils alors nous avons choisi un embryon mâle.»</em></p>
<h3><strong>Un enfant conçu à quatre</strong></h3>
<p>Peu après, Mercedes rencontre celle qui sera la mère porteuse: Yuliia. Mère célibataire de deux enfants, 8 et 11 ans, elle vit à Jitomir, une ville modeste à 140 kilomètres à l&#39;ouest de Kiev. La grossesse prend au premier essai. S&#39;ensuivent neuf mois de communication via WhatsApp. <em>«Yuliia ne parlait pas l&#39;anglais et moi pas l&#39;ukrainien, alors nous utilisions une app de traduction instantanée,</em> explique la Suissesse. <em>Elle nous envoyait des photos de son ventre et des échographies, nous parlait de son quotidien.»</em></p><p>Mi-février 2022, alors que Yuliia est sur le point d&#39;accoucher, Mercedes embarque à nouveau pour Kiev. Mais elle a le cœur lourd. Si près du but, elle se demande si elle n&#39;a pas commis une grosse erreur. <em>«Est-ce que je l&#39;aimerai, ce bébé? Ressentirai-je le même amour inconditionnel pour lui que pour mes deux autres enfants que j&#39;ai portés?»</em>, s&#39;interroge-t-elle.</p><p>Ces questions la taraudent durant tout le vol. A l&#39;arrivée, elle apprend que son fils Cristiano vient de naître et se précipite à l&#39;hôpital. A la vue du nourrisson, ses craintes s&#39;évaporent. <em>«Coup de foudre au premier regard»</em>, souffle-t-elle, son soulagement encore perceptible.</p>
<h3>Mères porteuses en fuite</h3>
<p>L&#39;expérience de Mercedes reflète celle des 2000 à 3000 couples qui se tournaient vers la gestation pour autrui en Ukraine chaque année avant la guerre. Le pays a émergé comme une destination de premier plan pour cette pratique aux alentours de 2015, lorsque plusieurs pays asiatiques l&#39;ont prohibée. <em>«Le gouvernement indien a interdit la GPA pour les couples étrangers homosexuels en 2013, puis pour tous les non-Indiens en 2015»</em>, explique William Houghton, patron de l’agence américaine Sensible Surrogacy, créée pour aider les couples à naviguer la GPA.</p><a href="/articles/ukraine-ce-pays-ou-les-femmes-portent-les-enfants-des-autres">Voir plus</a>

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