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Curatelles à Genève, mode d’emploi

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/8b8de4fd-c887-4721-9a71-0906a6a090bd/medium" /><p>Vieillissement de la population, montée de l’individualisme, complexité administrative: le nombre d’adultes sous curatelle ne cesse d’augmenter en Suisse. Ils étaient plus de 100&#39;000 à bénéficier de mesures de protection en 2021. La nouvelle loi introduite en 2013 a mis l’accent sur la préservation de l’autonomie et une personnalisation de l’accompagnement en fonction des besoins des personnes concernées.</p><p>Edwige (prénom modifié à sa demande) n’oubliera jamais le coup de téléphone reçu d’un membre de sa famille à l’été 2018. Elle était alors en vacances à l’étranger. <em>«Regarde dans ta boîte mails, quelque chose d’important t’attend»</em>, l’enjoint son interlocuteur. La Genevoise se précipite sur son ordinateur et ouvre un document à l’entête du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (TPAE). Depuis plus d’un an, la pétillante septuagénaire est victime d’une arnaque. Pour tromper sa solitude, elle a, à la suggestion d’un membre de sa famille, fait une rencontre sur Internet. Mais alors qu’elle commence à s’attacher, ce pseudo-amoureux lui demande des virements importants pour de prétendues raisons humanitaires. Habituée à soutenir des causes, Edwige tombe dans le piège. A plusieurs reprises.</p><p>En balayant le courriel, elle découvre que, sans l’en informer, ses proches, inquiets de ne pas arriver à lui faire entendre raison, l’ont signalée au TPAE. Le tribunal a estimé que les intérêts d’Edwige étaient suffisamment menacés pour ordonner des mesures superprovisionnelles, c’est-à-dire prises avant instruction et sans audition de la personne concernée, ni évaluation d’un psychiatre. D’autorité, Edwige a été placée sous curatelle. Elle est privée de l’exercice de ses droits civils (mais les droits politiques sont maintenus), ne reçoit plus son courrier et n’a plus accès à ses comptes. <em>«Ma vie suivait tranquillement son cours. Et soudain, le choc»</em>, frémit-elle au souvenir de ce courriel.</p>
<h3>Un policier sous curatelle</h3>
<p>Pour Patrick Spitzner, 50 ans aujourd’hui, le processus a été moins brutal. En 2019, cet ancien policier cantonal à Genève, l’un des deux seuls témoins de notre enquête à accepter de livrer son expérience de la curatelle à visage découvert, prend conscience que ses dépenses compulsives le mettent financièrement en danger. Atteint d’anxiété et d’addictions, il convient avec son médecin traitant d’adresser un signalement au TPAE en avril. <em>«Nous l’avons fait pour que je puisse être protégé de moi-même»</em>, se remémore le Genevois. Quelques semaines plus tard, le Tribunal institue une mesure de curatelle.</p><p>Que leur démarche ait été volontaire, comme celle de Patrick, ou que leur curatelle leur ait été imposée, à l’image d’Edwige ou d’Emilie rencontrée <a href="https://www.heidi.news/explorations/a-geneve-de-la-curatelle-au-cauchemar/le-lit-est-fait-le-frigo-est-plein-qu-est-ce-que-cela-peut-bien-vous-faire" rel="nofollow noopener" target="_blank">dans les précédents épisodes</a>, la Suisse comptait fin 2021 un total de 100’593 adultes au bénéfice de mesures de protection. D’année en année, ce chiffre ne cesse de progresser: 96’885 en 2019, 89’605 en 2016. Les mesures de protections concernaient ainsi 14,04 Suisses pour 1000 habitants à fin 2021 (16,29 dans le canton de Genève), contre 13,79 en 2019 et 12,97 en 2016.</p>
<h3>Augmentation en flèche</h3>
<p>Genève n’échappe pas à la tendance, comme le montre le graphique ci-dessous.</p><p><strong><br/>      <figure>
        <picture>
          <img src="/placeholder.png" class="lazy" title="Source: Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant" alt="" data-src="https://lh6.googleusercontent.com/yEunWn69vV-oRHn_-YazY_3-Nd99mA2lzP2evQRK9jDbKj5BoffuXn0H4XN6xAWQd6p6U9Flxu6HuqvpSGwsRM0Z-8nzvAkIraOHVlDbY2cz4hzeTFJ-huogzAheWhSrsBWVnM9bt_sNPRwtf7jgkQ"/>
        </picture>
        <figcaption>Source: Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant</figcaption>
      </figure>
</strong></p><p><em>«L’une des explications à cette progression continue réside dans l’allongement de la durée de vie et les progrès de la médecine»</em>, estime Diana Wider, secrétaire générale de la Conférence en matière de protection des mineurs et des adultes (COPMA), l’organisme intercantonal qui coordonne la coopération entre cantons, Confédération et organisations nationales.</p><p>La Suisse est désormais <a href="https://www.rts.ch/info/suisse/13741888-les-suisses-en-tete-de-classement-de-la-longevite-mondiale.html" rel="nofollow noopener" target="_blank">championne du monde de la longévité</a>. On y recense aujourd’hui 1888 centenaires (des femmes à 75%), contre 787 en 2000 et 377 en 1990. D’après Daniela Jopp, professeure à l&#39;Université de Lausanne, une fille sur trois et un garçon sur quatre nés après 2000 deviendront à leur tour centenaires. Corollaire du vieillissement de la population, le nombre de personnes atteintes de pathologies telles que Alzheimer ou d’autres formes de démence gagne sans cesse du terrain. Selon la fondation Alzheimer Suisse, 32’200 nouveaux cas sont détectés chaque année (des femmes à 66%). A ce rythme, l’organisation évalue que près de 315 400 personnes pourraient être touchées d’ici 2050, ce qui signifie que personne ne sera à l’abri de compter un proche au bénéfice de mesures de protection dans son entourage et/ou d’être personnellement concerné.</p>
<h3><strong>La montée de l’individualisme</strong></h3>
<p>Outre les gains dans l&#39;espérance de vie, des évolutions sociétales entrent aussi en ligne de compte. Diana Wider, qui est également professeure à la Haute école spécialisée de Lucerne, pointe ainsi «la montée de l’individualisme»: <em>«Les familles n’apportent plus le même soutien qu’autrefois à leurs aînés. Il y a vingt ans, il était encore courant de s’occuper de ses parents. Aujourd’hui, on se sent plus libre de les laisser vieillir dans un établissement médico-social (EMS). A cela s’ajoute le formalisme administratif: avec Internet, il est devenu très compliqué pour elles de remplir le moindre formulaire et les personnes âgées ont de plus en plus besoin d’être accompagnées dans leurs démarches.»</em></p><p>La curatelle est la mesure phare du droit de la protection de l’adulte et de l’enfant régi par le Code civil (articles 360–455). En Suisse, elle se décline sous quatre formes, appliquées en fonction de l’état de la personne concernée, qui vont de la plus légère à la plus restrictive en matière d’autonomie, les trois premières pouvant être combinées entre elles. A titre d’exemple, la curatelle de portée générale, celle qui s’est imposée à Edwige, est prévue pour les personnes ayant particulièrement besoin d’être aidées parce que l’autorité de protection a estimé qu’elles ne jouissaient pas de leur discernement. La curatelle de Patrick se limitait à des mesures de gestion et de représentation.</p>
<h3><strong>Quatre types de curatelles</strong></h3>
<p>Voici les caractéristiques de ces différentes curatelles <a href="https://justice.ge.ch/fr/theme/protection-de-ladulte" rel="nofollow noopener" target="_blank">telles que présentées sur le site</a> du Pouvoir judiciaire du canton de Genève:</p><a href="/articles/curatelles-a-geneve-mode-d-emploi">Voir plus</a>

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