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Quand l’invasion du Liban par Israël faisait naître le Hezbollah

<img src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/57be9772-a1f4-41c7-be60-bc200d4c151c/medium" /><p>Alors que le conflit actuel entre Israël et le Hamas risque plus que jamais de s’étendre à la région, notamment au Liban après l’assassinat ciblé du numéro 2 du Hamas à Beyrouth le 2 janvier 2024 et celui d’un haut chef militaire du Hezbollah six jours plus tard, nous poursuivons la publication de témoignages d’anciens délégués du CICR. Précisément sur la première intervention israélienne au Liban, en 1982, qui va laisser tant de traces de part et d’autre. Notre grand témoin est Carlos Bauverd, alors en charge du plus grand camp de prisonniers du monde, qui a par la suite occupé des fonctions importantes au sein de l’institution.</p><p>Dès 1979, les services secrets israéliens mènent au Liban une campagne d’attentats à la voiture piégée qui tuent des centaines de Palestiniens et de Libanais, civils pour la plupart. Un chroniqueur militaire israélien reconnaîtra plus tard qu’il s’agissait de pousser l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) de Yasser Arafat à commettre des actes terroristes afin de justifier une invasion du Liban. Celle-ci démarre le 6 juin 1982, sous l’appellation Paix en Galilée.</p><p>L’armée israélienne, puissante et expérimentée, soutenue par l&#39;Armée du Liban sud et les Phalanges libanaises, des milices libanaises majoritairement chrétiennes, entend réduire à néant les menaces que constituent les milices palestiniennes réfugiées au Liban depuis leur défaite du Septembre noir en Jordanie en 1970. Or la victoire de Tsahal au Liban, incontestable sur le plan militaire, se retourne en grande partie contre elle politiquement. Le mouvement Peace Now («La Paix maintenant») se renforce en Israël mais surtout, cette guerre aboutit à la création du Hezbollah parmi les populations chiites du Sud-Liban. Ce groupe armé va progressivement prendre une importance considérable, allié de la Syrie et soutenu par l’Iran. Quoi qu’il en soit, les violations du droit humanitaire durant le conflit vont renforcer le rôle du CICR dans la région.</p>
<h4><strong>Lire aussi</strong> <a href="https://www.heidi.news/explorations/cicr-un-demi-siecle-dans-les-coulisses-du-proche-orient/israel-palestine-liban-les-onze-anciens-du-cicr-qui-temoignent" rel="nofollow noopener" target="_blank">les biographies de nos onze témoins, anciens délégués du CICR en Israël, Palestine et Liban</a></h4>

<h2>Carlos Bauverd</h2>
<p><em>Alors âgé de 29 ans, Carlos Bauverd a derrière lui quatre ans de CICR durant lesquels il est passé du Nicaragua au Cambodge et d’Angola au Sinaï. Au Liban en 1982, il a pour mission de veiller sur les milliers de combattants palestiniens capturés par Israël dans son avancée rapide.</em></p><p>«Aux premiers jours de l&#39;invasion du Liban, je suis un des responsables des régions occupées par Israël. Peu après s’ouvre l’immense camp d’El-Ansar, sur un plateau balayé par le vent. C&#39;est un endroit absolument sinistre. Il se remplit rapidement, sa population va culminer, je pense, aux alentours de 30&#39;000 prisonniers et 1500 gardiens israéliens. C&#39;est une masse humaine considérable. Cela provoque des chocs chez les soldats israéliens, ou en tout cas les plus sensibles d&#39;entre eux, parce que c&#39;est à l’évidence une image concentrationnaire.</p>
<h4>«Pour la première fois, la Palestine combattante se retrouve nez à nez avec l&#39;armée israélienne.» </h4>
<p>C&#39;est un camp de tentes, avec des sections de barbelés et des chemins de rondes autour des sections, sillonnés en permanence par des chars de l&#39;armée. Cela fait un bruit terrifiant, jour et nuit, et soulève une poussière épouvantable qui envahit chaque minute de l’existence des prisonniers, jusqu’aux cuisines.</p><p>      <figure>
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          <img src="/placeholder.png" class="lazy" title="Le leader palestinien Yasser Arafat inspecte les dégâts causés par un violent bombardement israélien à Beyrouth-Ouest, le lundi 2 août 1982. (KEYSTONE/AP Photo/Mourad Raouf)" alt="7293674_highres.jpg" data-src="https://heidi-17455.kxcdn.com/photos/5a101099-5ede-4e34-8985-7a45ad09e08a/large"/>
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        <figcaption>Le leader palestinien Yasser Arafat inspecte les dégâts causés par un violent bombardement israélien à Beyrouth-Ouest, le lundi 2 août 1982. (KEYSTONE/AP Photo/Mourad Raouf)</figcaption>
      </figure>
</p><p>Pour la première fois, la Palestine combattante, si on peut l’appeler comme ça, se retrouve nez à nez avec l&#39;armée israélienne. Pendant toutes ces années de guerres et de crises, il n’y avait pas vraiment de contact direct et quotidien. Et là, ça dure des mois et ça crée un précédent au CICR: on comprend qu’on ne peut plus quitter le camp, physiquement, à la fin de la journée, sinon ça dégénère. Il y a eu des incidents graves, des confrontations et parfois des issues mortelles. Alors qu’en étant là, présents physiquement, ça crée une espèce d&#39;inhibition des deux côtés. On est une équipe d’une quinzaine de délégués, médecins compris.</p>
<h4>«On n’avait rien de plus intelligent à faire que de parler de nos trois cultures» </h4>
<p>Je prends la décision de rester dans le camp, et qu&#39;il y ait toujours au minimum deux délégués sur place, y compris la nuit. Pour rester bien neutre, j’alterne, je dors une nuit dans les sections des prisonniers, et une nuit avec les gardiens israéliens. Cela permet d&#39;avoir de longues soirées de discussions, qui tournent en séminaires de religions comparées. C’est le sujet principal. On parle de nos origines et du mode de fonctionnement de la judaïté, de l&#39;islam et de mon éducation dans le christianisme, même si on n’est pas des pratiquants. De manière tout à fait informelle, pendant ces soirées où on n’a rien de plus intelligent à faire que de parler de nos trois cultures, nous tissons des liens très forts qui permettent d’éviter un certain nombre de grosses casses dans ce camp.</p>
<h3>Des tunnels, pour s’évader</h3>
<p>«Ce qui n&#39;empêche pas certains événements très graves. D’abord, les prisonniers commencent à creuser des tunnels pour s&#39;évader. La méthode israélienne pour les dépister est de passer sur ces tunnels avec les chars. Les tunnels s&#39;effondrent et il y a parfois du monde dedans, c’est dramatique. Vouloir s’évader, c’est dans l’ordre des choses. En tout cas nous, les délégués du CICR, on n’est pas là pour l’empêcher ou le faciliter, comme alliés des gardiens ou des prisonniers.</p><p>Ensuite, les épurations. On a affaire à des combattants dans un univers concentrationnaire, et donc à un cortège de drames entre les prisonniers eux-mêmes.</p><a href="/articles/quand-l-invasion-du-liban-par-israel-faisait-naitre-le-hezbollah">Voir plus</a>

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